© Peuples Noirs Peuples Africains no. 52 (1986), couverture.



CAMEROUN :
ON PREND LES MEMES ET ON RECOMMENCE...

C'est le destin de la caste compradore, véritable syndicat de prédateurs dont fatalement l'avidité augmente sans cesse, de se rétrécir progressivement pour accroître la part de gâteau de chacun, de s'enfermer dans un ghetto, de se marginaliser à la longue et, finalement, de se couper de la réalité. Paul Biya et sa clique en sont déjà là, apparemment, si l'on en juge par le dernier remaniement ministériel – passe-temps préféré du président, certes, mais cette fois franchement caricatural, particulièrement grotesque. Le système Biya en est venu à se parodier lui-même. Manque-t-il d'imagination? Est-il déjà complètement usé ? Dès que l'exigence populaire de liberté se fait un peu pressante, le président procède à un remaniement. Et maintenant vous allez voir ce que vous allez voir ! s'écrie l'encenseur de service à Jeune-Afrique. En réalité, on parle déjà du prochain remaniement, et pour cause !

Autre nouvelle : à quelque chose malheur est bon puisque cette très tardive parution, que nous expliquerons plus tard, nous permet du moins de dénoncer sans délai un personnage extrêmement dangereux dont je demande à mes amis de s'écarter si d'aventure il reparaissait. Sous prétexte de porter à l'écran Le Pauvre Christ de Bomba, un certain Rudolf Steiner, citoyen allemand domicilié à Berlin-Ouest, se disant producteur et metteur en scène de cinéma, s'est beaucoup démené au Cameroun en novembre dernier. On l'a vu prendre des initiatives qui, quelle surprise ! trahirent chez lui un intérêt démesuré, non pour le cinéma, mais pour les dirigeants politiques locaux et, paradoxalement, pour la famille de l'auteur qui n'a rien de commun avec eux.

Renseignements pris à bonne source, ce Rudolf Steiner est tout bonnement un agent de la C.I.A. mis temporairement à la disposition de Paul Biya pour pénétrer les milieux intellectuels camerounais. Il faut croire que c'est là une besogne de plus en plus ardue; et Biya doit maintenant aller chercher des agents si loin, c'est bien que les autres espions, camerounais, français, etc. se laissant repérer trop facilement, sont désormais réduits à l'impuissance. Sans les espions, son arme absolue, que va devenir le système Biya ?

Mongo Beti

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