© Peuples Noirs Peuples Africains no. 36 (1983) 76-95



LIVRES LUS

Thomas MPOYI-BUATU

« RÊVES INTERDITS », poèmes suivis de « LA RÉVOLTE DES GRIOTS » et de « RÊVES RETROUVÉS » d'Ada Ugah [1]

Ada Ugah est un jeune écrivain nigérian (il n'a que vingt-cinq ans), à la fois poète et critique littéraire. Autre caractéristique : bilingue, il écrit aussi bien en français qu'en anglais. C'est assez peu commun pour être signalé. Par ailleurs, il est membre de l'Imo Poetry Club du Nigeria et de l'Association des auteurs de langue française à Sherbrooke au Canada, plus précisément au Québec (ou à Québec comme disent les Québécois).

En tant que critique et poète, il a publié l'année dernière, en Angleterre et en anglais (of course), un recueil intitulé : « Naked Hearts »[2] qu'il faudrait traduire littéralement et au singulier : « Cœur nu », puisqu'il est question d'innocence dans le recueil. L'ouvrage se voulait à la fois recueil non conformiste et était précédé d'une étude critique au titre significatif : « Anatomy of Nigerian poetics » (Anatomie de la poétique nigériane). D'emblée, l'étude attaque le « mythe de la nudité » (« The myth of Nakedness »). Elle est précédée d'une citation de Fanon qui en donne bien le ton : « Se souvenant de leurs lectures faites dans les livres européens, ils en viennent imperceptiblement non pas à être une réplique de l'Europe mais sa caricature. »

L'étude se concentre exclusivement sur la poétique nigériane. [PAGE 77] L'auteur tient à le souligner en montrant la spécificité de la démarche poétique.

Aussi dit-il en ouverture de son texte : « Formellement, le champ de la poétique semblait n'attirer que ceux qui étaient versés dans l'art de l'interprétation poétique. »

En sept articles, il dissèque la nature spécifique de la poétique nigériane. La volonté d'aller à la rencontre d'un certain nombre d'idées reçues s'accompagne d'un tempérament polémique affirmé dès les titres des articles. Le premier explique pourquoi une anatomie de la poétique nigériane est nécessaire. Le second pose la question : « Où en est la poésie nigériane ? : Obscurantisme poujadiste ou simplicité d'un "Kindergarten" (d'un jardin d'enfants). » Le troisième s'intéresse à la réaction des pères de la poésie nigériane moderne vis-à-vis des critiques « Bolekaja »[3] (en gros, les critiques qui les vilipendaient). Les articles quatre à six tentent d'analyser le problème de la dichotomie dans l'interprétation poétique : par exemple : « bolekajaïsme ou néo-négritude », etc. On le voit l'étude se veut à la fois sérieuse et polémique. Les poèmes qui suivent l'étude tournent tous autour du thème de l'innocence.

Le recueil directement écrit en français est une sorte de regard anatomique sur les curieux agissements des Occidentaux. Le poète inverse les rôles et proclame son droit de regard sur le monde, une sorte de « droit de réponse » de l'Afrique à l'Europe.

D'ailleurs, l'auteur de la préface, Jack Corzani (éditeur spécialisé dans les livres antillais), ne s'y trompe pas : « A défaut d'écrire des thèses sur nous (mais cela ne lui était nullement interdit, bien des Africains, bien des Antillais l'ont fait et le font encore), Ada Ugah nous a à son tour, dans ses poèmes, observés, photographiés. Les clichés ne sont peut-être pas plaisants. Ne faisons pas comme certains gouvernements africains : ne saisissons pas la pellicule pour la détruire. Sachons au contraire en tirer profit. »

La première partie du recueil est intitulée : « Rêves interdits » et sous-titrée « Europe des Européens ». Elle [PAGE 78] commence par un « droit de réponse ». Elle se poursuit par une partie intitulée plus spécifiquement « Rêves interdits » où les subdivisions numérotées de I à III déroulent au sein des quatrains une série de titres célèbres ou rendus tels comme : l'Afrique mal partie, l'Afrique déboussolée, l'Afrique bloquée, l'Afrique étranglée, l'Afrique trahie, l'Afrique aux Africains, l'Afrique aliénée, l'Afrique sans défense. Ces titres négatifs et défaitistes provoquent de la part du poète un « droit de réponse » qu'il intercale entre les quatrains comme un refrain et un leitmotiv :

    J'irai là-bas
    Et tout voir
    Et tout raconter
    Ici et maintenant
    Sur l'Europe des Européens.

Suit une série de « maux » européens, telle « mère trahie », abandonnée par les siens, tel Ayatollah à Berlin, tel « monologue dramatique de la mère de Bobby Sands », tel Ayatollah dollar (prière quotidienne des banquiers européens) :

    Seul
    Devant toi
    Soumis suis-je à tes lois

telle pax Americana... Tous ces maux commandent un refrain qui revient comme un leitmotiv et un droit de réponse à la série des maux africains :

    Une larme mon amour
    Une seule arme versée
    Pour l'Europe des Européens

(variantes :

    Pour l'Europe soumise aux lois d'Ayatollah dollar
    Pour le sort de l'Europe bloquée
    Pour l'Europe mal partie
    Pour l'Europe hyperdéveloppée).

Et dans un « dictionnaire des Ayatollahs » : le poète fait le constat suivant : [PAGE 79]

    Les Ayatollahs aux barbes noires
    Ne sont plus les disciples d'Idi Amin
    Les Ayatollahs sont les geôliers des Basques
    Les Ayatollahs sont les militaires polaires
    Les Ayatollahs sont nombreux ici.

La deuxième partie du recueil intitulée : « La révolte des griots » enchaîne une série de retraites : celle de Senghor pour souhaiter celle des militaires conseillers, celle d'Ahmadou Ahidjo (dans un poème intitulé : Lettre ouverte à Mongo Beti) pour souhaiter l'avènement de la démocratie africaine... La partie intitulée explicitement : « La révolte des griots » suit l'évolution de la révolte : il y a un « avant », un « pendant », et un « après ». (C'est-à-dire au seuil de la révolution.) Avant, pendant et après, le peuple chante :

    Siguidi baba, bayaete baba
    Lobengula sigidi ! Sigidi !
    Baba bayaete ! Bayaete !

Et au seuil de la Révolution, un poète anonyme chante :

    Il faut brûler ces comédies outrancières
    Il faut enterrer les bourgeois parasitaires
    Il faut achever la chute des seigneurs
    O Lobengula sigidi ! Sigidi !
    Baba, bayaete ! Bayaete !
    Sidi Lobengula bayaete Lobengula.

Un poème intitulé « Empire Batouala » est dédié à Ange Patassé, réfugié politique.

La troisième partie du recueil concerne les « Rêves retrouvés ». C'est une sorte de réponse apaisée aux tourments d'un monde angoissant.

Le poète peut acquiescer :

    Demain à la même heure
    Je retrouverai mes rêves
    Sourire intérieur
    Rire matinal des fleurs
    Mère à la recherche de ses enfants
    Afrique des enfants du fleuve... [PAGE 80]

L'élément liquide constitue le lieu d'élection d'un apaisement total comme si ses incessants bercements disaient quelque chose qui ressemblerait beaucoup à l'innocence.

Cette poésie, moins naïve qu'elle ne paraît, tente surtout de tourner en dérision un monde déshumanisé, quel que soit l'endroit du monde où l'on se trouve. « L'homme est toujours le même », constate désabusé le poète. On peut tout de même, à travers ce constat amer et l'entreprise poétique, ne pas suivre le schématisme du « droit de réponse » mais l'expérience tentée intéresse surtout en ce que l'auteur a voulu l'inscrire dans une écriture poétique réfléchie. Que la simplicité des termes et expressions utilisés ne trompe pas. Il y a un jeu de construction et de mots assez habile, c'est d'autant plus instructif à noter que la langue poétique est celle qui souffre le plus d'une pratique bilinguiste. L'auteur a su maîtriser suffisamment le français pour exprimer les contrariétés d'un « cœur nu ».

Th. MPOYI-BUATU

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« ANTHOLOGIE DE LA LITTÉRATURE IVOIRIENNE » par Amadou Koné, Gérard D. Lezou, Joseph Mlanhoro[4]

Cette anthologie se place d'emblée dans une lignée d'ouvrages ayant l'ambition fort louable de présenter un vaste échantillon de textes donnés comme représentatifs d'une littérature nationale. Récemment, il s'est publié une anthologie de la poésie camerounaise[5] et Mukala Kadima-Nzuji, donnait à sa préface intitulée : « Plaidoyer pour des littératures africaines nationales », la conclusion suivante : « Notre souhait est que, très vite, chaque pays africain se dote d'au moins une anthologie nationale la plus complète possible, ouverte à toutes les expériences, à toutes les sensibilités littéraires qui s'y [PAGE 81] développent ou s'y exercent. De telle sorte que, un jour, de la somme de toutes les anthologies nationales, se dégage peu à peu un corpus des textes les plus significatifs des diverses littératures, qui autorise enfin des essais de théorisation plus poussés. »

La conclusion est belle en ce qu'elle fait de chaque démarche anthologique nationale une contribution et une étape qui, additionnée à d'autres démarches anthologiques nationales, devront aboutir à une vision théorique globale de ce que l'on pourrait appeler effectivement la littérature africaine. Fort bien ! Seulement, il n'est pas question que cela s'effectue sans préalables. Les auteurs de cette anthologie ont tenu à affirmer le côté « travail de pionniers » de leur entreprise. C'est ce que dit explicitement la quatrième page de couverture : « Pour la première fois, un livre fait le point sur la littérature ivoirienne naissante et propose un vaste échantillon de textes soulignant l'originalité de notre littérature nationale. Cette première anthologie sera sans aucun doute utile à tout Ivoirien qui s'intéresse à l'évolution de son pays et également à tous ceux qui s'intéressent à la Côte d'Ivoire et à sa culture. »

A priori, l'anthologie entend montrer l'originalité de la littérature ivoirienne à n'importe quel Ivoirien ainsi qu'à tout étranger « cultivé » ! Autrement dit, c'est une anthologie qui n'est pas tout à fait un manuel.

Pour les auteurs, ce ne sont pas les « beaux textes » qui font l'originalité de cette littérature. C'est au moins une manière de se situer négativement par rapport à des anthologies (et surtout des manuels) de littérature venant de France.

Voici comment, dans leur introduction générale intitulée : « Sur la littérature nationale », ils dégagent la caractéristique principale de leur choix : « Il s'agit de suivre l'évolution de notre littérature écrite, d'en examiner les principaux thèmes, enfin de situer son originalité. »

Justement, cette fameuse originalité, on ne voit pas très bien comment elle est située. D'abord, dans la même introduction générale, les auteurs récusent le critère linguistique comme suffisant « à déterminer la nationalité d'une littérature donnée ». Ils enchaînent : « La langue n'étant plus un critère commode puisque ne coïncidant plus avec [PAGE 82] la nation, on peut considérer qu'une littérature nationale est simplement une littérature écrite par des éléments d'une nation donnée et exprimant les préoccupations de la nation, quelle que soit la langue utilisée. »

J'ajoute en passant qu'il est très commode, parce que simpliste, d'évacuer de cette manière-là les problèmes complexes du critère linguistique pour une littérature nationale.

L'originalité serait à rechercher donc dans « les préoccupations d'une nation ». Que nous dit-on de la nation ivoirienne dans cette anthologie ?

D'abord, les auteurs la divisent en deux parties. La première va des origines à 1968, subdivisée en quatre chapitres correspondant à quatre genres : les mythes, le théâtre avant l'indépendance, la poésie à ses débuts, les débuts du roman; avec, concernant ces genres, quelques auteurs représentatifs.

Pour le théâtre, à cette époque-là, il y a Dadié, Gadeau et autres Amon d'Aby. Pour la poésie, on retrouve le même Dadié et puis Bognini, etc. Les débuts du roman s'effectuent grâce à Aké Loba, à Dadié (encore lui), à Nokan...

Déjà, dans cette partie, on se demande pourquoi la date de 1968 a été prise en considération. Pourquoi peut-on retenir les mythes comme un genre ? Que représente exactement l'école de Ponty puisque son influence est si déterminante sur l'éclosion et la production théâtrale ? Le type d'informations données dans le deuxième chapitre concernant le théâtre avant l'indépendance se limite à des lapalissades : « Avant l'indépendance, trois auteurs sortis tous les trois de l'école William Ponty, berceau du théâtre à l'époque, représentent le théâtre écrit ivoirien. »

Ces renseignements hautement historiques sont censés être connus de tout le monde. Par conséquent, il est inutile de s'y étendre. Ou alors, on porte un jugement de valeur a posteriori sur l'école W. Ponty : « L'influence de Ponty semble déterminante : le théâtre ne s'intéresse qu'à un aspect folklorique de la vie et tourne le dos aux problèmes cruciaux de l'époque : le problème colonial et ses conséquences. »

Justement, pourquoi les élèves de Ponty ne pouvaient-ils pas aborder le problème colonial au théâtre ? [PAGE 83]

C'est à ce genre de question qu'une anthologie rigoureuse aurait répondu dans un historique qui aurait montré les contraintes particulières imposées à un genre littéraire ou à des genres littéraires par un environnement fait de rapports de force.

Quant à la présentation des textes eux-mêmes, elle est purement nominale (elle n'essaie même pas d'être descriptive) et trop souvent banalement paraphrasique. Voici comment est présenté un extrait de « Kwao Adjoba » d'Amon d'Aby : sous le thème : « La solidarité » : « Un des aspects du théâtre avant l'indépendance, c'est l'expression des valeurs traditionnelles. On nous présente ici la solidarité d'un village envers Mango, un membre de la collectivité et qui relève d'une grave maladie. » C'est plat et la formulation est à peine correcte !

Ensuite, la seconde partie va de 1968 à nos jours. Le choix de 1968 n'est toujours pas expliqué. Un premier chapitre est consacré à l'essor du théâtre (essor est écrit avec un « t », c'est sûrement une faute d'impression !). On y retrouve des gens comme Dadié, Koné, Zadi... Un second chapitre est consacré à la nouvelle poésie. L'ancienne, elle était comment déjà ? Zadi, Adiaffi et beaucoup d'autres. Et un troisième chapitre qui relate le dynamisme de la fiction moderne. Sans doute à cause des écrivains comme Ahmadou Kourouma ou Adiaffi.

D'une manière générale, l'anthologie pèche par un manque cruel de perspective critique sérieuse. Les genres sont donnés pour évidents. Il n'existe aucune étude interne de textes. Il en découle bien évidemment que l'originalité tant prisée, on a du mal à la trouver dans l'ensemble de l'anthologie puisque aussi bien tous les thèmes relevés, on peut les retrouver dans une autre littérature nationale. Si l'existence de ce type d'anthologie est nécessaire, et même souhaitable, ça ne peut tout de même pas être à n'importe quelle condition. Il s'agit de poser des préalables. Puisque les auteurs ont écarté le critère de « beaux textes », il ne leur était pas interdit d'étudier de près les structures des textes qu'ils nous présentaient.

Qui sait si ce n'était pas dans ces structures que pouvait se dégager une certaine « beauté » et surtout une réelle originalité ? A quoi ça sert de faire des déclarations d'intention sur l'abandon du souci de « beaux textes », [PAGE 84] c'est-à-dire du souci de se conformer à un modèle ou à des modèles, si, réellement, à travers toute l'anthologie, le modèle érigé en norme (et cela revient comme un leitmotiv et de façon massivement diffuse à travers l'opposition que je juge superficielle et même artificielle entre modernité et traditionalisme) est l'Occident ?

Ces préalables à une vraie originalité se trouvent dans l'étude appropriée des textes en tant qu'engendrant leurs propres structures réelles.

Je souscris volontiers à ce que Kadima-Nzuji dit dans la préface citée plus haut quand il suggère que « le malaise de la critique africaine trouve son origine – fondamentalement – dans ce qu'elle manque de curiosité et d'audace ». Notamment quand elle se veut conformiste et ne prend en compte que les « beaux textes ». Alors que les littératures non conformes au modèle telles qu'apparaissent un certain nombre de celles présentées ici, sont plus conformes à leurs propres structures.

Mais il n'y a qu'une étude sérieuse qui peut en dégager la cohérence. Or cette étude pourrait, dit Kadima, « si elle est menée avec rigueur, c'est-à-dire en tentant d'en abstraire des lois qui régissent et expliquent leur fonctionnement en tant qu'ensemble de textes donnés à lire comme textes littéraires, ou en tant que constituant un phénomène sociologique véritable, pourrait permettre à la critique africaine de se renouveler ».

C'est tout le fond du problème !

Disons que s'il manque à cette anthologie une perspective critique rigoureuse et si ses présupposés méthodologiques sont quelque peu fantaisistes en vertu de ce que je viens de relever précédemment, il est non moins évident qu'elle nous offre tout de même un document de travail (quelque incomplet qu'il soit) dans la mesure où les textes eux existent, qu'on peut les étudier plus finement et en tirer un meilleur parti.

Th. MPOYI-BUATU

[PAGE 85]

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« DICTIONNAIRE DES ŒUVRES LITTERAIRES NEGRO-AFRICAINES DE LANGUE FRANÇAISE »[6]
(sous la direction d'Ambroise Kom)

Ce dictionnaire (volumineux parce que faisant tout de même 672 pages, mais d'un maniement relativement aisé) est le fruit d'une des politiques de l'Agence de Coopération (organisme officiel de la francophonie, à la fois multigouvernemental et se voulant autonome vis-à-vis des pays membres) consistant à financer des entreprises comme l'élaboration de ce dictionnaire. Individus ou institutions soumettent les projets que l'Agence examine pour les refuser, les modifier ou simplement les accepter. En ce qui concerne le domaine de l'édition, le terme de coédition appliqué à la collaboration entre l'Agence et les Editeurs n'est que purement nominale, l'Agence n'étant pas à proprement parler une maison d'édition.

Le dictionnaire a été établi sous l'autorité « scientifique » d'Ambroise Kom, qui signe l'avant-propos et l'introduction. Il a par ailleurs rédigé des notes concernant un certain nombre d'œuvres.

Dans l'avant-propos, l'auteur explique que l'objectif du dictionnaire était au départ de livrer au public une somme exhaustive d'articles portant sur les œuvres d'imagination produites en Afrique noire de langue française des origines à nos jours. Les difficultés matérielles ont limité l'objectif à la volonté de « produire un document pouvant servir de point de départ à une histoire générale et complète des littératures du continent noir ». Ce qui fait que le critère retenu n'a pas été celui de la qualité de l'ouvrage

La division des ouvrages à recenser se répartit en trois groupes et s'inspire de celle du « dictionnaire des œuvres [PAGE 86] du Québec » (1978). Les œuvres importantes bénéficient d'articles allant de 1000 à 2000 mots; les œuvres mineures ou peu connues d'articles de 300 à 500 mots; les œuvres intermédiaires, catégorie moyenne des œuvres recensées, en comportent de 500 à 1000 mots.

Cette classification est un peu fantaisiste parce que faite, non d'après l'importance intrinsèque de l'ouvrage, mais d'après l'accueil critique reçu.

En fin de volume, il est donné deux index : un index alphabétique des auteurs présentés et un index des genres, précédé d'une précision qui n'est pas banale : « on s'est aussi risqué à un index des genres..., index purement indicatif tant il est vrai, on le sait, que de nombreux ouvrages africains défient le découpage traditionnel des genres ». Une liste des collaborateurs et leur institution d'attache clôt les deux index. En tout, quatre-vingt-treize universitaires ou critiques, d'une vingtaine de pays.

L'introduction d'Ambroise Kom esquisse un panorama un peu trop rapide et forcément schématique de la littérature négro-africaine qui n'est rien d'autre d'après la définition qui en est donnée, que « la production littéraire des Négro-Africains portant sur les réalités africaines ». Définition un peu passe-partout et qui se caractérise surtout par le manque évident de subtilité.

Les réalités africaines, la belle affaire !

L'introduction reste un peu trop marquée par la problématique de la Négritude, même si l'auteur annonce que l'ère de la négritude est révolue et souligne que « de nos jours, l'écrivain africain se donne le recul nécessaire pour réfléchir sur son art ».

Alors, les réalités africaines apparaissent comme le pôle attractif de tous les commentaires ou comme le phare guidant l'analyse de toutes les œuvres. C'est ce que l'on peut voir à travers l'analyse d'un certain nombre d'ouvrages.

Batouala n'a pas été retenu ici. Il parle pourtant des réalités africaines. J. Chevrier l'inclut par exemple dans son « Anthologie africaine »[7] et Désalmand le considère comme l'un des vingt-cinq romans clés de la littérature négro-africaine[8]. Peut-être a-t-on pensé que René Maran, [PAGE 87] Antillais et ancien administrateur colonial, ne parlait pas vraiment des réalités africaines. Doguicimi, figure en bonne place, et l'on tient à souligner l'aspect particulier de la culture traditionnelle qui en sous-tend le récit. René Maran en a parlé comme d'un « chef-d'œuvre... qui tient de l'Iliade et de la Chanson de Geste... avec sa fin qui est d'une sauvage et cruelle grandeur ».

« L'aventure ambiguë » bénéficie d'un traitement de faveur et on en parle en plus de 1000 mots. Mais l'auteur de l'article est tellement obnubilé par l'idée d'un commentaire montrant l'opposition entre l'Occident et l'Afrique, qui figure dans le roman de façon artificielle, qu'il en oublie de parler du problème réel qui est celui de présenter l'Islam comme modèle de spiritualité du Nègre. Voici comment Jean-Pierre Makouta-Mboukou, auteur de l'article, mène son analyse : « La pensée de l'auteur s'appuie sur un emploi approprié de certains mots grammaticaux tels que nous, nôtre ( ... ) Ces nous et ces nôtre représentent bel et bien le "Nègre" ou si l'on veut, la race noire, par opposition au vous qui représente l'Occident. »

En fait de race noire, il s'agit simplement des Diallobé ayant à ce point assimilé l'Islam qu'ils en viennent à le présenter comme une forme de spiritualité typiquement africaine opposable à un Occident matérialiste. La confusion apparaît nettement dans le récit à travers les artifices de style. La plupart des commentateurs de ce roman en sont victimes du fait qu'ils en restent à une analyse purement sémantique du texte.

Pour rester dans le domaine de la religion, Le Pauvre Christ de Bomba est bien traité, comme pratiquement tous les ouvrages de Mongo Beti. Si l'auteur de l'article, Fernando Lambert, reconnaît que le thème principal du Pauvre Christ... est bien celui de la religion, il tient à ajouter que « l'univers romanesque du Pauvre Christ de Bomba est, en fait, plus complexe. C'est la société coloniale dans son ensemble qui est représentée et qui est [PAGE 88] montrée en porte-à-faux par rapport à la société africaine ». Suit ensuite une brève analyse serrée de la structure du roman.

En fait, c'est le départ entre une approche purement sémantique (ou de contenu) et une approche faisant des structures d'une œuvre la genèse du contenu, qui détermine le degré de rigueur d'un commentateur. C'est ce qui fait que l'analyse de Devoir de Violence est la plus séduisante et la plus pertinente qui se puisse lire dans le « Dictionnaire » en ce qu'elle montre la manière particulière dont Yambo Ouologuem forge un contenu à partir d'une forme : « L'un des mérites du Devoir de violence tient au fait que l'aspect formel s'avère consubstantiel au fond. C'est-à-dire que l'auteur cherche à "faire violence" non seulement au style de son œuvre mais aussi à la conception traditionnelle du roman. »

En tant qu'il engendre un sens, l'aspect formel est aussi la caractéristique des Soleils des indépendances d'A. Kourouma. L'œuvre bénéficie également d'un traitement de faveur...

Ces quelques exemples montrent assez que les commentaires valent ce que valent leurs auteurs. Et d'après les commentaires, on peut grossièrement tracer les groupe(s) auxquel(s) appartiennent leurs auteurs. On s'aperçoit ainsi qu'il existe des écoles. En gros, j'en distinguerai trois :

– une école américaine,
– une école africaine,
– une école française.

* L'école américaine est surtout intéressée par le contenu. Ceci est à mettre en rapport avec un certain regain des études africaines en Amérique, destinées à valoriser l'histoire de la communauté noire. Il serait injuste de prétendre que cette école ne s'intéresse qu'au contenu. A preuve, l'analyse qu'une certaine Claire L. Dehon, de l'Université du Kansas, fait du Roi miraculé. Elle prend en compte les mécanismes particuliers du récit. Mais elle s'attache d'avantage encore au contenu et fait quelquefois des affirmations quelque peu catégoriques en déclarant, au passage (et l'on soumet cette affirmation à l'appréciation de l'intéressé), que « Beti prêche donc une assimilation partielle de la civilisation française » ! [PAGE 89]

* L'école africaine : avec le dynamisme particulier de l'école nigériane spécialisée dans la littérature francophone et plus attentive aux formes ! Elle comprend des personnalités comme Kester Echemin, Victor O. Aire (c'est à lui qu'on doit l'éclairante analyse du Devoir de violence), Samuel Adeojo, Femi Ojo-Ade, Noureini Tidjani-Serpos, etc.

Dans cette école africaine, on peut distinguer des féodalités comme celle qu'exerce le couple Chemain sur la littérature congolaise (toutes les notes relatives à Henri Lopes, Tchicaya U Tamsi, à Tati-Loutard, à Sylvain Bemba... sont de leur cru). Certains critiques congolais n'ayant pu briser le monopole de fait qu'exerce le couple Chemain sur les lettres congolaises ont préféré aller ailleurs. C'est le cas de Jean-Pierre Makouta-Mboukou.

Il existe une certaine école zaïroise, même si on peut noter ici l'intervention envahissante d'une universitaire américaine : Danielle Chavy Cooper.

L'école camerounaise a existé, mais la plupart de ses représentants n'exercent plus au Cameroun. Melone enseigne en France et Ambroise Kom enseigne à l'Université de Rabat.

* Dans l'école française, il faut distinguer les critiques qui restent attachés à la thématique de la négritude comme Michel Hausser (de Bordeaux), Robert Pageard ou même Claude Wauthier. Il est tout naturel qu'un Hausser ou un Pageard parlent de Senghor, par exemple, qui a tout lieu d'être satisfait au vu de ce qui est dit ici de lui !

Ensuite, il y a certaines personnalités comme Michel Fabre (angliciste, à l'origine) qui s'intéressent à certains documents francophones comme Doguicimi ou Karim, roman sénégalais.

Il y a quelques amateurs éclairés comme Bernard Magnier[9] sensibles au style.

Et puis des hommes comme Bernard Mouralis, au regard un peu neuf et plus attentif à l'aspect narratif d'un récit. Son analyse des romans de Mudimbe est caractéristique d'une approche critique rigoureuse ! [PAGE 90]

On pourrait poursuivre l'inventaire, en ce qui concerne l'école française, avec des gens comme Chevrier ou Désalmand.... qui à eux deux constituent tout un monde... Mais ils ne figurent pas dans ce dictionnaire.

Voilà donc le visage de ce « dictionnaire des œuvres littéraires négro-africaines de langue africaine des origines à 1978 ». Il a l'avantage d'exister comme m'a dit quelqu'un, mais cela seul ne suffit pas. Encore faut-il prendre la littérature négro-africaine au sérieux et prendre le parti d'approches critiques beaucoup plus rigoureuses, dont certaines des approches ici apparaissent comme des bricolages non inventifs. Il faudra pour cela cesser de considérer la littérature négro-africaine comme un élément de curiosité, prendre la littérature au pied de la lettre, prendre les auteurs africains au sérieux, c'est-à-dire comme des écrivains. Et l'écriture est une discipline et une morale exigeantes.

Th. MPOYI-BUATU

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L'ENSEIGNEMENT DES LITTERATURES
AFRICAINES A L'UNIVERSITÉ

Ce vaste thème a fait l'objet d'un colloque[10] tenu il y a deux ans à Brazzaville pendant deux jours (23 et 24 janvier 1981) et organisé par le Département de Littératures et Civilisations Africaines de l'Université Marien Ngouabi.

Le thème pouvait paraître alléchant, en même temps qu'il était propice à susciter des joutes passionnées dans la mesure où il s'agissait d'un thème dont l'enjeu idéologique est inscrit dans son énoncé même. Ceci explique en partie l'impasse à laquelle a abouti le colloque en ce qui concerne la définition de la spécificité de l'œuvre littéraire africaine. [PAGE 91]

Tous les genres ont fait l'objet d'une communication. Les inévitables Chemain étaient de la partie. Lui, parlait du roman initiatique et elle, de la critique littéraire. L'enseignement de la Poésie a fait l'objet d'une communication de Marie Seguin. Bekate-Meyong a parlé de l'enseignement du théâtre négro-africain à l'université. Sony Labou Tansi, qui s'est fait un peu piégé, s'est situé, de façon quelque peu malencontreuse, face à la polémique. C'était le seul créateur à être présent au colloque. Paul Ndouna s'en est pris à l'enseignement en langue française, « facteur de néo-colonisation », d'après lui.

Tandis qu'André-Patient Bokiba, comme en écho à la communication d'Arlette Chemain, faisait le constat amer d'une « littérature d'Afrique », soumise à une « critique d'Occident ». A la fin, ont suivi des débats dont la caractéristique principale était la confusion.

D'une manière générale, il est frappant, à la lecture de ces communications, de constater l'absence totale de toute réflexion sur la spécificité du phénomène littéraire en tant que tel. Il en aurait peut-être découlé une conception moins molle de la littérature telle qu'elle se manifeste dans toutes les communications.

Pourtant, le rapport introductif semblait bien poser le problème au départ : « Définir les finalités de l'enseignement des littératures africaines à l'Université, réfléchir sur nos méthodes d'enseignement, les textes que nous faisons figurer dans nos programmes, le discours que nous tenons sur eux, c'est à quoi nous convie le présent colloque. »

Elo Dacy, l'auteur du rapport introductif, enchaîne sur le fait que tout ensemble culturel véhicule une conception spécifique de l'art en général, de la littérature en particulier. Et que le choix du corpus procède, dans le domaine français, d'une conception hiérarchisée de la littérature. Le choix repose en fait sur la notion de « grands auteurs » ou de « grands et beaux textes ». D'où enseigner la littérature, c'est apprendre à lire les grands auteurs.

Le choix du corpus est exactement le même dans les universités africaines. A ce choix très limité, se mêle la censure politique trop courante en Afrique, qui interdit certains auteurs. Cette méthode est issue d'une pédagogie de l'identification à un modèle : modèle esthétique, modèle moral, modèle idéologique. L'auteur en vient à appeler [PAGE 92] de ses vœux une critique littéraire africaine parce qu'« en ne peut valablement analyser les œuvres littéraires africaines que si on tient compte des circonstances de leur production, de la situation historique, économique, politique, sociale et culturelle dans laquelle elles sont créées ».

« La critique littéraire africaine doit pouvoir choisir parmi les apports de l'histoire, de la sociologie, de la linguistique, des méthodes critiques contemporaines, les faits pertinents à l'éclairage du fait littéraire africain. »

Ce dernier point, malgré le contresens que l'auteur fait à propos du structuralisme, est en fait un appel du pied à toutes les approches critiques occidentales. Au passage, on ne voit pas très bien ce qu'il appelle les « réalités africaines », auxquelles devrait s'ouvrir et s'adapter la critique occidentale.

Ces « réalités africaines » feront dire à l'auteur de la communication sur l'enseignement de la poésie africaine que « les correspondances que le poète découvre ou construit sont le plus souvent, dans la poésie française, le fait d'un individu, tandis que celles que recrée le poète africain de langue africaine (comme sans doute de toute autre langue) relèvent d'abord d'un choix collectif ».

Alors que le début de la communication commençant par l'affirmation générale suivant laquelle « quel que soit le continent auquel il appartienne, le vrai Poète ( ... ) a toujours vécu intensément et simultanément toutes les dimensions de l'homme, au rythme de l'univers ». De l'individu ou du collectif, qu'est-ce qui se rapproche le plus de l'Univers ? D'abord que peut bien vouloir signifier la notion de l'Individu en poésie ? Toutes ces contradictions visent simplement à montrer que « la poésie africaine est beaucoup plus proche de l'oralité que sa sœur européenne ».

Il n'y a que du côté du théâtre où s'est amorcée une véritable approche de la spécificité de la littérature africaine, même si ses propres mécanismes de fonctionnement ont à peine été esquissés.

En fin de compte, que ce soit ceux (Africains pour la plupart) qui revendiquent haut la main et le trémolo dans la voix, l'avènement d'une critique littéraire africaine, ou ceux (Occidentaux pour la plupart) qui ne voient dans cette critique africaine qu'une application plate et non [PAGE 93] réfléchie des méthodes critiques occidentales, tous peuvent souscrire à cette véritable déclaration de guerre d'Arlette Chemain :

    « Nous écartons la tentation d'une critique littéraire spécifique pour l'Afrique qui l'enfermerait dans une négritude retrouvée. »

Elle milite, elle, pour une « critique anthropologique »... intégrant linguistique, ethnologie, sociologie... et qui, dit-elle, permettra de combler le hiatus, le fossé qui se creuse entre littératures orales et littératures écrites. Oui, parce que pour notre auteur, « la critique est une science dont le but ultime est d'élaborer une science des productions de l'esprit humain ». La science étant par définition universelle, il est évident qu'il suffit de simples aménagements pour qu'elle puisse servir à éclairer toutes les manifestations particulières de la fiction. Autrement dit les méthodes critiques occidentales rendent très bien compte des littératures africaines.

Ces affirmations catégoriques un peu abstraites sont illustrées, dans un souci d'être concret, par des exemples.

Ainsi donc les enseignements du Lukàcs du « roman historique », du Goldmann des « structures mentales et création culturelle » permettent-ils de rendre compte de « Doguicimi » de Paul Hazoumé, de « Soundjata épopée mandingue » de Djibril Tamsir et même de rendre compte du « Devoir de violence » de Yambo Ouologuem. Les méthodes du structuralisme génétique ont permis à Arlette Chemain de rendre compte de « Ville cruelle »[11]. Quant au structuralisme en tant que tel, il rend compte des « Soleils des Indépendances » de Kourouma ainsi que de « Perpétue on l'habitude du malheur ». En ce qui concerne ce dernier roman, Arlette Chemain utilise la théorie de Roland Barthes, décrite dans la revue Communication (no 8, 1966), nous apprenons ainsi que chaque enquête constitue une séquence narrative :

1) enquête à Ngiva Egueleu,
2) à Nteuleuleu,
3) à Oyolo,
4) à Fort-Nègre. [PAGE 94]

« Chacun de ces sous-ensembles comporte la succession des fonctions : départ (du village), quête de l'information, épreuve constituée par le refus de l'information, obtention de renseignements, et retour. » Voici l'analyse la plus piquante : « Le récit de l'exécution de l'amant de cœur, Zeyang, constitue une prolepse entre la mort de Perpétue et le châtiment de l'aîné par Wendelin. L'amplitude de l'analepse que constitue la reconstitution écrite de la vie et de la mort de Perpétue, est supérieure à sa portée. » C'est très clair et c'est vraiment pertinent. Et l'auteur ajoute, prévenante : « le jargon structural est employé à dessein ». Ben voyons ! Qui ne l'avait pas encore compris ?

Par contre, c'est la « Morphologie du Conte » de Vladimir Propp qui expliquera à merveille « L'ivrogne dans la brousse » de Tutuola, etc.

Rien d'étonnant, donc, au regard de ce qui précède, à ce qu'il n'y ait pas de place pour une critique littéraire africaine spécifique.

Toutes ces communications ont buté sur un problème assez simple en apparence, mais en apparence seulement : qu'entend-on par littérature ? C'est l'absence d'une réflexion axée sur la spécificité de la littérature qui les a tous fait prendre des envols vers des généralités absolument inaptes à accoucher d'une réalité quelconque en ce qui concerne la littérature africaine.

Toutes les interventions tendaient à faire de la littérature africaine un sous-chapitre de la littérature française, donnée non seulement comme norme, mais comme norme universelle. L'application mécanique de ces méthodes est à l'origine des assertions à peine croyables des gens comme Arlette Chemain. A la lire, on se demande si elle est capable de lire un texte ou si ce qui l'intéresse c'est de savoir d'abord de quelle manière telle œuvre s'adapte à la méthode si savante d'un tel ou d'un tel. Les gens dont elle utilise les méthodes ont d'abord lu ce dont ils parlent et ont essayé d'en dégager des mécanismes de fonctionnement internes. Toute œuvre de création comporte avant tout ses propres structures. Contrairement à tous ceux qui croient à l'illusion d'une critique littéraire scientifique, l'œuvre littéraire en tant que telle est rétive à la science. Tout au plus admet-elle la rigueur. Barthes lui-même, qu'Arlette Chemain et ses disciples citent souvent [PAGE 95] sans le comprendre, a renoncé à la prétention d'une critique littéraire scientifique. La spécificité de la littérature africaine ne sera découverte que lorsque seront prises en compte les véritables littératures africaines (c'est-à-dire celles écrites en langues africaines).

Celles-là comportent des fonctionnements spécifiques dont l'oralité n'est qu'une des modalités. Et puis l'oralité procède d'une technique rigoureuse. Si on l'avait étudiée plus attentivement, on n'en serait pas toujours à faire toutes ces comparaisons faciles et un peu oiseuses entre elle et l'écriture. De cette étude sérieuse, il aurait résulté un savoir tout à fait particulier propre à ébranler toutes les méthodes d'exportation et propre à orienter dans des directions nouvelles la finalité de tout enseignement de la littérature africaine !

Les littératures africaines exophones (écrites en français, anglais ... ) ne sont que des manifestations périphériques et un peu abâtardies de quelque chose de profond qui s'exprimerait véritablement si tous, nous avions le courage de nous exprimer dans nos langues maternelles respectives[*].

Tout le reste n'est que... littérature !

Thomas MPOYI-BUATU


[1] Ed. Naaman de Sherbrooke, Québec, Canada, 1983.

[2] Merlin Brooks Ltd, Braunton, Devon, 1982.

[3] « Come down and let's fight » : littéralement : « descends et viens te battre ». Terme en usage dans les transports en commun en Nigeria occidental.

[4] Editions Céda, Abidjan, 1983.

[5] Editions Silex.

[6] Une coédition de l'A.C.C.T. (Agence de Coopération Culturelle et Technique) et des Editions Naaman de Sherbrooke, Québec, Canada, 1983.

[7] Céda, Hatier.

[8] Cf. Profil formation, no 361, Hatier, 1981. L'expression « roman clé » est plus que contestable. De même que la tendance à présenter les vingt-cinq romans retenus comme des curiosités touristiques parce que l'auteur les pare d'étoiles notifiant leur degré de lisibilité (à la manière dont on parle d'un hôtel, 1, 2, 3 étoiles) et présente son petit livre comme un « guide pratique, une sorte de guide bleu de la littérature noire ».

[9] Qui s'occupe par ailleurs de « Notre Librairie », publication ministérielle, spécialisée dans la littérature négro-africaine.

[10] Sa transcription a donné lieu à une brochure (mal imprimée) de 83 pages publiée par l'Université dans la série : « Colloques de la Faculté des Lettres et des Sciences humaines »

[11] In « Présence francophone », no 13,1975. Référence donnée par A. Chemain elle-même.

[*] [NDLR] Assertion étonnante dont la revue laisse bien entendu la responsabilité à Th. Mpoyi-Buatu.