© Peuples Noirs Peuples Africains no. 55/56/57/58 (1987) 340-528
ou les Comptes Fantastiques d'Ahmadou Ahidjo,
En publiant le document qu'on va lire, nous exauçons, avec quel plaisir il est vrai ! le souhait du responsable camerounais, résidant là-bas, qui nous l'a fait parvenir. Aucune déontologie ne peut nous plier aux consignes de secret de la Banque Mondiale, qui excluent de fait les peuples de la connaissance de leurs propres affaires pour en faire le privilège exclusif des capitalistes, des hauts fonctionnaires internationaux, des aventuriers et des mercenaires, tous personnages coalisés pour maintenir l'Afrique dans la dépendance et la pauvreté. Comme le suffrage universel et libre, comme la liberté d'expression, comme le droit d'aller et de venir sur le territoire national, ou d'en sortir, l'information est un bien inaliénable des populations, et la rendre effective est une obligation de conscience pour tout intellectuel noir digne de ce nom. Complaisant, certes, créditant les dictateurs d'une gestion méritoire, quitte à minimiser des cas de prévarication flagrante, comme l'affaire de la Cellucam, incapable par aveuglement ou par complicité idéologique de prévoir la débâcle financière où le pays barbote actuellement, le rapport offre pourtant un double intérêt pour le profane. D'une part, il permet pour la première fois aux Camerounais d'avoir enfin sous les yeux, à propos du pétrole, des chiffres qui, même s'ils sont manipulés à la source, constituent tout de même un ordre de grandeur qui vaut mieux que le néant qui caractérisait cette activité jusqu'ici. Mais surtout, comparées à la politique d'austérité que mène Paul Biya, les apparentes suggestions du rapport de la Banque Mondiale se révèlent sous leur vrai jour, c'est-à-dire des injonctions auxquelles le perroquet du Renouveau se conforme docilement : ainsi, le dernier budget, présenté par le gouvernement camerounais comme le fruit de ses débats internes, recouvre singulièrement le montant évalué près d'un an plutôt par la mission de la Banque. C'est dire que le Cameroun est gouverné par une institution capitaliste internationale, sans consultation des populations, sans aucun débat public, sans même qu'elles aient jamais connu les données de leur situation économique. Si ce n'est pas là une nouvelle forme de colonisation, alors, les mots n'ont aucun sens. On ne le dira jamais assez : la dépendance n'est pas seulement une indignité, c'est aussi la pire infirmité. Rien de tel pour disposer un peuple à l'effort de développement économique que la liberté. Rien de tel que la domination pour l'en détourner, n'en déplaise aux nationaux-tiersmondistes. Si, le premier janvier 1960, l'indépendance du Cameroun avait été effective, ce pays auquel ne manquent ni les ressources [PAGE 341] en matières premières ni les hommes, en serait sans doute aujourd'hui au même niveau de développement économique et d'ambition que la Corée du Sud. Au lieu de quoi voilà bientôt trente ans que ses protecteurs s'acharnent à l'aligner sur les pays les plus pauvres du monde. Et, du train où vont les choses, ils y seront bientôt parvenus. P.N.-P.A. Post-scriptum : Aux dernières nouvelles, les négociations engagées secrètement par Paul Biya et le F.M.I. seraient sur le point d'aboutir. L'événement se produirait dans quelques semaines, un mois tout au plus. Dans la situation où se trouve le perroquet du Renouveau, dont les bravades démagogiques ne trompaient personne, il ne pourrait s'agir que d'une capitulation sans condition. Aussi futé que les roitelets nègres du dix-neuvième siècle, ses dignes prédécesseurs, le petit dictateur intérimaire n'aura pas hésité longtemps à brader aux négriers étrangers, en échange d'une poignée de verroterie, un pays qu'il vient de ruiner. Voilà donc un homme que tout disqualifiait, et qui, tout seul, comme ça, d'une signature, va condamner le Cameroun à la forme de colonialisme la plus avilissante. [PAGE 342]
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La Banque Mondiale A N'UTILISER QU'À DES FINS OFFICIELLES
CAMEROUN
18 février 1987
Afrique de l'Ouest
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Parité fixe : 50 francs CFA = 1 franc français
TAUX DE CHANGE
Ce rapport est basé sur les travaux d'une mission qui a séjourné deux semaines au Cameroun en février 1986, principalement pour apporter une assistance à la préparation du Sixième Plan de Développement dans des domaines spécifiques, ainsi que sur les analyses économiques et sectorielles réalisées par la Banque au cours des dernières années. La mission était composée de MM. F. Laporte, P. Berlin, M. Kranjec et Pedro Alba. MM. de la Taille (Consultant, Agriculture), B. van Waes et H. Hansen (Transports) ont contribué à la mission en ce qui concerne la préparation du Sixième Plan. Mlle Sa'adat (Assistante de Recherche) a contribué à la préparation des projections à long terme. Une deuxième mission, composée de M. Laporte et Mlle Sa'adat s'est rendue au Cameroun en novembre 1986 pour discuter le projet de préparation avec les autorités. [PAGE 345]
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MÉMORANDUM ÉCONOMIQUE Table des matières
1. Évolution de l'investissement fixe
PRODUIT INTÉRIEUR BRUT, 1984 (a)
(à la fin de décembre 1985) en millions de dollars
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The definition of a particular social indicator may vary between countries or within one country over time. For instance, different countries define "urban area" or "safe water" in different ways.
AREA (thousand square kilometres) GNP PER CAPITA (US$) GNP per capita estimates at current market prices, calculated by the conversion method used for the World Bank Atlas, 1986.
POPULATION AND VITAL STATISTICS
FOOD, HEALTH AND NUTRITION
LABOR FORCE
HOUSING
EDUCATION
INCOME, CONSUMPTION, AND POVERTY RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS 1. L'évolution de l'économie camerounaise au cours des sept dernières années (1979-85) a été fortement influencée par les nouvelles ressources pétrolières. En 1985[1] la part du pétrole avait atteint plus de 17 % du PIB et représentait quelque 45 % de recettes totales de l'État. Les revenus extérieurs nets du pétrole, déduction faite des coûts en devises de la production pétrolière, constituaient quelque 35 % du total des recettes d'exportations de biens et services. Pendant cette période, les revenus pétroliers ont permis une augmentation substantielle de l'investissement du pays et de la demande intérieure, ce qui a entraîné une croissance rapide de l'économie. L'épargne nationale est passée de 19 pour cent, du PIB en 1978 à environ 34 % en 1985. Le produit national brut par tête est passé de moins de 500 dollars à environ 800, ce qui représente une croissance réelle de 6 à 7 % par an en termes de FCFA. Conscient de leur caractère temporaire, l'État a utilisé ses recettes pétrolières avec prudence et le Cameroun constitue un exemple parmi les pays exportateurs de pétrole à revenu moyen pour la modicité de son endettement extérieur et la stabilité financière intérieure et extérieure qu'il a su maintenir dans un contexte international instable et défavorable. 2. Les bouleversements intervenus dans le marché mondial du pétrole placent le Cameroun devant un défi. La chute des cours du pétrole brut non seulement affecte directement les recettes pétrolières mais encore entraîne dans les conditions actuelles de coûts de production et de partage des revenus entre l'État et les compagnies pétrolières une réduction des réserves économiquement récupérables. L'ajustement nécessaire de l'économie camerounaise au déclin pétrolier va donc devoir se faire plus rapidement et plus radicalement qu'il n'était prévu auparavant. Au-delà du seul ajustement nécessité par la chute de ses recettes pétrolières et leur disparition probable à moyen terme, le Cameroun est confronté à un autre problème structurel, qui est celui d'établir les conditions d'une croissance soutenue dans le long terme à un niveau qui permette de créer des emplois en nombre suffisant pour faire face à l'augmentation rapide de la population. L'objectif du présent rapport est de faire un examen des principaux développements économiques et financiers depuis 1978, d'évaluer l'impact de la production pétrolière sur ces développements et d'analyser les ajustements qu'il serait nécessaire d'apporter à l'économie pour absorber le déclin pétrolier et établir les conditions de la croissance pour le long terme. [PAGE 362] 3. Il convient de souligner que la qualité, la couverture et l'actualité des données statistiques au Cameroun laissent à désirer, ce qui rend difficile une analyse rigoureuse. En outre, le secret placé par les autorités sur les données concernant le secteur pétrolier et les transactions liées au pétrole, qui ne sont prises en compte qu'en partie dans les comptes nationaux, dans les comptes de l'État, dans la balance des paiements et dans les réserves officielles, ne facilite pas l'analyse. La mission a apporté les ajustements nécessaires aux données officielles pour mieux prendre en compte les transactions pétrolières et a procédé à un grand nombre d'estimations pour pallier à l'insuffisance des statistiques officielles. Ces estimations doivent être traitées avec prudence et les résultats qui en découlent considérés comme des ordres de grandeur. 4. Avec les réserves faites ci-dessus, la croissance du PIB aurait été d'environ 10 % par an de 1978 à 1985. Le PIB non pétrolier aurait cru d'environ 8 % par an, alors qu'avant l'apparition du pétrole l'économie avait progressé en moyenne de 5 % par an (1967-78). L'investissement, favorisé par une épargne nationale en augmentation rapide, a été le principal déterminant de la croissance, en particulier au cours des trois années 1979-81. L'investissement fixe est passé de 21 % du PIB en 1978 (18 % en 1976) à près de 25 % en 1981. Par la suite, l'effort d'investissement a été maintenu autour de 25 % du PIB jusqu'en 1985. De 1978 à 1981 c'est l'investissement des entreprises, dont une part importante a été financée par l'État, qui a crû le plus rapidement. Ce n'est qu'à partir de 1983 que l'investissement direct de l'État a augmenté, et en proportion de l'investissement total, et par rapport au PIB, en conformité avec les objectifs du Cinquième Plan de Développement qui entendait favoriser le développement rural, les secteurs sociaux et l'infrastructure administrative. En revanche, tandis que le secteur traditionnel continuait à faire preuve d'une grande vitalité, l'investissement des entreprises dans le secteur industriel s'est sensiblement ralenti pendant cette période. Un fait préoccupant a été la faiblesse de l'investissement étranger depuis 1979-80, en dehors du secteur pétrolier. 5. La croissance globale élevée s'est accompagnée de certains déséquilibres dans le développement relatif des différents secteurs. Ce sont les secteurs de la construction et des services, y compris la fonction publique, et, dans une moindre mesure, les cultures vivrières qui ont enregistré les taux de croissance les plus élevés. La croissance du secteur manufacturier a été relativement élevée mais des distorsions dans le système de protection et d'incitations ont suscité le développement d'industries à forte intensité de capital et généralement orientées vers le marché intérieur. En outre, cette croissance dissimule une faible efficacité et une contribution limitée à l'épargne et à la création d'emplois pour ce qui est des entreprises publiques, qui constituent une part importante de la valeur ajoutée du secteur. La production des cultures de rente, quant à elle, est restée pratiquement stagnante, en raison, outre l'impact de la sécheresse de 1983, d'une politique de prix et d'encadrement du secteur peu stimulante pour les exploitants. Ces déséquilibres [PAGE 363] illustrent, bien que de façon limitée, le « syndrome pétrolier » qui se manifeste par des pressions inflationnistes et par des distorsions dans la structure de la production en faveur des biens et services non échangeables. Bien qu'il ne se soit pas produit d'accélération notable de l'inflation intérieure pendant la période 1979-85 sur la base des indices officiels, les prix intérieurs ont augmenté sensiblement plus vite que les prix à l'exportation, ce qui tendrait à indiquer des divergences dans la croissance respective des prix des biens échangeables et non échangeables et, par conséquent, une augmentation du taux de change réel. 6. Au plan des infrastructures économiques et sociales les progrès ont été variables. Des investissements importants ont été effectués dans les infrastructures routières et ferroviaires qui sont relativement bien développées. En ce qui concerne le développement urbain, des sommes importantes ont été investies dans les équipements sociaux et l'adduction d'eau; par contre les réseaux routiers urbains ont été négligés. Si elle n'est pas freinée, l'urbanisation rapide de la population ainsi que la nécessité de soutenir le développement des activités de production dans les villes vont poser des problèmes d'infrastructure considérables dans les années à venir. La scolarisation a augmenté rapidement à tous les niveaux, mais la qualité et l'efficacité du système se détériorent et celui-ci est mal adapté aux besoins croissants de l'économie en main-d'œuvre qualifiée, en techniciens et en cadres moyens. Les indicateurs de santé restent insatisfaisants. 7. Grâce aux revenus pétroliers et à leur gestion prudente, l'évolution des finances publiques a été globalement très bonne. La situation des finances publiques était d'ailleurs bonne avant l'avènement du pétrole puisqu'entre 1971 et 1979 le budget de fonctionnement avait été régulièrement excédentaire en dépit d'une pression fiscale relativement faible, les déficits budgétaires globaux n'avaient jamais dépassé 2 % du PIB et le recours à l'endettement extérieur était resté limité. Depuis 1980, les recettes budgétisées ne comprennent qu'une partie des recettes pétrolières consistant des redevances et des impôts sur les bénéfices des quatre compagnies pétrolières opérant au Cameroun. Les revenus que l'État tire du partage de la production, qui constituent la plus large part de ses recettes pétrolières, ont été canalisés par les comptes hors-budget. Ils ont été utilisés pour financer des dépenses en capital additionnelles à celles inscrites au budget, certains programmes de développement et des subventions d'équipement aux entreprises publiques et à d'autres établissements publics. Afin d'éviter que les ressources pétrolières ne donnent naissance à des attentes indues dans la population, l'État a géré ses recettes pétrolières avec discrétion. La part de ces recettes que la Présidence décide chaque année d'affecter aux comptes hors-budget n'est pas connue à l'avance, même des ministères techniques concernés. Au cours des dernières années, ces transferts ont représenté en moyenne un quart des recettes totales de l'État. Le montant total des revenus tirés du partage de la production n'est pas divulgué. [PAGE 364] 8. A partir de données diverses, de sources variées, la mission a estimé année par année le total des recettes pétrolières de l'État depuis 1979. En utilisant ces estimations pour établir une situation intégrée des finances publiques, en constate que les recettes totales de l'Etat ont presque quadruplé entre 1979 et 1985, passant de 20,6 % à 24 % du PIB, en dépit d'une réduction de la pression fiscale effective non pétrolière. Au cours de la même période des dépenses courantes ont augmenté dans les mêmes proportions, avec une augmentation particulièrement forte pour le poste « subventions et transferts », dont une part importante est constituée de subventions d'exploitation aux entreprises publiques. Les dépenses en capital quadruplèrent entre 1978 et 1981, mais n'augmentèrent plus ensuite en termes réels, les autorités ayant reconnu les contraintes sur la capacité d'absorption de l'investissement. Au total, l'épargne courante de l'État a représenté en moyenne plus de 13 % du PIB de 1981 à 1985. Elle a permis non seulement de financer un niveau relativement élevé de dépenses en capital, mais aussi de rembourser des dettes extérieures par anticipation et d'accumuler une épargne financière substantielle. Cette épargne financière a été placée en partie à l'étranger correspondant en fait à la part non rapatriée des recettes pétrolières et, à l'intérieur, ou la forme de dépôts dans les banques commerciales. 9. La situation financière du système bancaire est loin d'être aussi bonne que celle de l'État. Le système bancaire serait en fait en situation de quasi insolvabilité si les dépôts importants de l'État et d'autres établissements para-étatiques n'étaient pas là pour assurer sa liquidité. Les dix banques du système ont en effet un volume important de créances douteuses représentant près d'un quart du total de leurs actifs dans les secteurs du commerce et des entreprises publiques, et qui ne sont que très partiellement couvertes par des provisions. Étant donné l'affaiblissement de leurs fonds propres, les banques ont tendance à éviter les investissements à risque, en particulier dans les petites et moyennes entreprises. En outre, la structure et le niveau des taux d'intérêts intérieurs favorise le transfert des liquidités vers l'étranger et, conjuguée à d'autres facteurs institutionnels et fiscaux, décourage l'intermédiation financière en général. Si la chute des recettes pétrolières devait amener l'État à retirer ses dépôts des banques commerciales, il en résulterait une crise de liquidité sévère à moins que des mesures ne soient prises pour recapitaliser les banques. 10. L'inflation du poste « transferts et subventions » dans les dépenses de l'État, l'importance des créances douteuses des banques ainsi que le volume élevé des dépenses en capital de l'État pour le compte des entreprises témoignent des difficultés des entreprises publiques et de l'inefficacité de beaucoup d'entre elles. Les causes des mauvais résultats des 60 entreprises de tous les secteurs dans lesquelles l'État détient des participations plus ou moins importantes tiennent selon les cas de la taille excessive de l'investissement initial et de la faible rentabilité des projets, d'un personnel pléthorique, d'une structure administrative trop lourde, de l'absence d'objectifs clairement définis et de critères [PAGE 365] de performance concomitants, et d'incitations pour la direction. Ces entreprises souffrent également des maux habituels des entreprises publiques : poursuite d'objectifs sociaux sans compensation financière directe de l'État, politisation des Directions et ingérence des ministères de tutelle dans la gestion, lenteur des réactions aux évolutions du marché et mauvaise structure financière. En 1984 le total des subventions aux entreprises publiques était estimé à quelque 150 milliards de FCFA (366 millions de dollars), représentant 50 % des recettes pétrolières de l'État cette année-là et 18 % de ses dépenses totales. Préoccupé par la charge croissante que ces entreprises font peser sur le budget et leur contribution limitée à la croissance économique, le Gouvernement a établi récemment une commission spéciale pour préparer les réformes nécessaires et a déjà pris certaines mesures énergiques telle que la fermeture de la CELLUCAM (pâte à papier). 11. La croissance rapide des exportations pétrolières, dont la valeur brute est passée de quelque 12 millions de dollars en 1978 à 1,5 milliard de dollars en 1985, a transformé de façon spectaculaire la situation financière extérieure du Cameroun pendant cette période. Sur la base des ajustements apportés par la mission aux données officielles sur les transactions du secteur pétrolier et sous réserve du fait que les importations ne semblent pas être enregistrées dans leur totalité, la balance commerciale serait passée d'un déficit de 197 millions de dollars en 1979 a un excédent de 1 milliard de dollars en 1985. La balance courante s'est aussi considérablement améliorée, bien que dans une mesure moindre que la balance commerciale en raison de la progression rapide des paiements en services facteurs liés au secteur pétrolier. Si l'on tient compte des coûts de production du pétrole en devises coûts d'exploitation et amortissement de la dette et des investissements en prospection et développement et des transferts des bénéfices nets des compagnies pétrolières, la contribution nette du pétrole à la balance des paiements aurait atteint 670 millions de dollars en 1985, ce qui représente encore 53 % des exportations de biens et services non pétroliers. Un fait préoccupant à noter a été la faible croissance des exportations de biens et services non pétroliers depuis 1978 (environ 3 % par an en volume), en raison de la quasi-stagnation, globalement, des exportations agricoles traditionnelles. En revanche la part des produits industriels dans les exportations de produits non pétroliers est passée de 10 à 20 % entre 1978 à 1985. 12. La dette publique et garantie par l'État a diminué en valeur relative (par rapport au PIB) depuis 1981, les autorités ayant utilisé les revenus pétroliers pour financer l'investissement et rembourser par anticipation des emprunts commerciaux. A la fin de 1985, la dette publique et garantie mobilisée et en cours ne représentait que 25 % du PIB et sa structure était très saine avec 55 % en prêts officiels à des conditions concessionnaires et seulement 20 % en prêts commerciaux. Le service de cette dette ne faisait que 8,5 % des exportations de biens et services non facteurs (ou 12,2 % si on ne compte que les revenus nets en devises du pétrole dans les exportations). La dette privée mobilisée [PAGE 366] et en cours, y compris la dette relative au secteur pétrolier, pouvait être estimée à environ 17 % du PIB à fin 1985. 13. La diminution relative de la dette extérieure et son faible niveau témoignent de la prudence avec laquelle le Cameroun a géré ses ressources pétrolières. Tout d'abord, contrairement à la plupart des autres pays producteurs de pétrole, il ne s'est pas laissé prendre au piège qui consiste à hypothéquer ses revenus pétroliers futurs. Deuxièmement, il s'est servi d'une bonne part de ses revenus pétroliers pour financer des investissements, en particulier dans les infrastructures économiques et sociales. Cependant, malgré le secret qui entoure le secteur pétrolier et la discrétion des autorités dans le rapatriement des recettes pétrolières par les comptes hors budget, la quasi-totalité de ces revenus a été injectée dans l'économie. Ainsi, au milieu de 1986, l'épargne publique extérieure non officielle ne représentait pas plus de 10 % des recettes pétrolières totales de l'État depuis 1978, et l'épargne intérieure (créances nettes sur le secteur bancaire), 4 %. Actuellement 75 % environ des ressources extrabudgétaires sont utilisées pour financer des dépenses en capital, qui représentent environ 50 % de l'investissement total de l'État. Outre l'investissement, les recettes pétrolières budgétisées ont été utilisées pour augmenter la consommation publique : le nombre des fonctionnaires permanents a progressé de 10 % par an, ce qui constituera un lourd fardeau à l'avenir. Une large part des recettes pétrolières a aussi servi à financer les déficits croissants et à prendre en charge les dettes d'entreprises publiques non rentables ou mal gérées, et il sera difficile à l'État d'arrêter l'hémorragie que représentent ces subventions. 14. Au total, le niveau de l'investissement et des dépenses publiques et, dans une moindre mesure, celui de la consommation privée et les besoins réels d'importation de l'économie qui en résultent se sont déjà ajustés aux revenus pétroliers. Cela rendra le processus d'ajustement à la baisse des revenus pétroliers plus difficile qu'on ne le croit généralement. 15. L'évolution des revenus du pétrole et leur gestion constituent donc un déterminant important des perspectives économiques et financières du Cameroun. Au niveau actuel du prix du pétrole les réserves économiquement récupérables restant à exploiter étaient estimées par les analystes pétroliers internationaux à environ 40 millions de tonnes en avril 1986. Si le prix du pétrole remontait à 20 dollars ou plus en dollars constants de 1984, ou si les accords de partage de la production entre l'État et les compagnies pétrolières étaient révisés de façon à laisser une plus grande part à ces dernières, les réserves économiquement récupérables augmenteraient de quelque 10 millions de tonnes. Il n'y a pas à l'heure actuelle d'indications de nouveaux gisements de pétrole et les activités de prospection ont été très réduites au cours de ces dernières années. La décision récemment prise par les autorités camerounaises de rendre plus attrayantes pour les compagnies les conditions fiscales de la prospection du pétrole qui sont actuellement nettement moins favorables que celles offertes par d'autres pays pourrait relancer les [PAGE 367] activités de prospection. Cependant, même si des découvertes de nouveaux gisements intervenaient dans un proche avenir, il faudrait environ de 2 à 4 ans pour les développer. 16. La mission a élaboré deux scénarios de projections pour le pétrole. Le scénario A correspond aux prévisions que les services compétents de la Banque ont faites en avril 1986 sur la base d'une analyse de l'évolution du marché mondial à long terme. Dans ce scénario il y aurait une légère reprise du prix du pétrole dans les années calendaires 1987 et 1988. Il resterait au même niveau en prix constants de 1984 (environ 16 dollars le baril) jusqu'en 1990, pour augmenter graduellement ensuite. Le scénario B est basé sur l'hypothèse que l'accord sur des quotas de production récemment intervenu au sein de l'OPEP tiendrait. Le prix du pétrole monterait alors à 20 dollars en prix constants de 1984 en moyenne pour l'année calendrier 1987, et resterait à ce niveau ensuite. Ce prix de 20 dollars est en effet considéré comme le seuil au-delà duquel les consommateurs sont incités à utiliser d'autres sources d'énergie, ce qui n'est pas l'intérêt des producteurs de pétrole dans le long terme.
17. L'évolution future des coûts de production est un élément important de la projection des recettes pétrolières de l'État et de la contribution nette des exportations de pétrole à la balance des paiements. On fait l'hypothèse que les coûts d'exploitation par baril resteraient constants en termes réels. En ce qui concerne les charges en amortissements de la dette et de l'investissement en prospection et développement on a estimé, en l'absence de données complètes, que le montant restant à amortir était d'environ 1 200 millions de dollars au début de [PAGE 368] l'année 1986 et serait amorti en annuités décroissantes sur les six années 1986-91. Si ce chiffre était sous-estimé ou sur-estimé, ou le calendrier d'amortissement était différent, les besoins de financement extérieur du pays tels que projetés dans ce rapport s'en trouveraient modifiés d'autant pour cette période. Il résulterait des hypothèses adoptées ici une diminution rapide des coûts de production après 1987, qui compenserait en partie la chute des recettes brutes tirées du pétrole. 18. Au total, dans le Scénario A le pays aura à faire face à une chute rapide des revenus nets en devises de pétrole d'environ 670 millions de dollars en 1985 à environ 120 millions en 1991. Ces revenus seraient ensuite négatifs lorsque les reliquats de production seraient entièrement absorbés par le marché intérieur. Les recettes pétrolières de l'État, quant à elles, tomberaient de 406 milliards de FCFA en 1985 à environ 120 milliards en 1991. Dans le Scénario B la perte de recettes serait moins sévère, mais tant les revenus nets en devises que les recettes pétrolières de l'État diminueraient encore de moitié en cinq ans. Il convient de souligner le caractère aléatoire de toute projection des prix mondiaux du pétrole dans les circonstances actuelles, étant donné le nombre important des facteurs qui le déterminent, y compris les facteurs d'ordre politique et psychologique. Cependant, même si les hypothèses du scénario A s'avéraient trop optimistes et les prix du pétrole restaient au niveau de 10-15 dollars, les compagnies pétrolières seraient probablement amenées à réduire les coûts de production en rééchelonnant l'amortissement de leurs investissements et de leur dette sur une plus longue période, ce qui atténuerait l'effet de la baisse des prix sur les recettes nettes tirées du pétrole. En tout état de cause, une évolution moins favorable des prix du pétrole que celle envisagée dans ces projections ne ferait que renforcer les conclusions de ce rapport. 19. Il résultera de la diminution conjuguée des volumes et des prix du pétrole une forte contraction du Revenu Intérieur Brut du pays, de sa capacité à importer et de son épargne intérieure. La mission a élaboré un premier scénario de projections économiques et financières pour illustrer les effets à long terme sur la balance des paiements et les finances publiques de la diminution des revenus du pétrole et d'une évolution de l'économie selon les tendances des années récentes sans mesures d'ajustement particulières. Il est supposé dans ce scénario que la perte des revenus du pétrole serait simplement compensée par l'emprunt extérieur, avec la conséquence de compromettre le niveau de revenu du pays dans le futur. En dépit des hypothèses relativement optimistes retenues pour les exportations non-pétrolières et l'élasticité des importations, il résulterait des niveaux de croissance et d'investissement projetés une augmentation rapide du déficit en ressources (ou déficit de la balance commerciale). Le taux d'épargne intérieure, ajustée de l'effet des termes de l'échange, tomberait de 35 % du PIB en 1985 à moins de 18 % en 1991. Le solde courant de la balance des paiements deviendrait négatif d'environ 380 millions de dollars dès 1987. Ce déficit augmenterait jusqu'à plus d'un milliard de dollars en 1991 et atteindrait [PAGE 369] des niveaux absolument excessifs ensuite lorsque non seulement le pays n'exportera plus de pétrole mais devra en importer. Même en supposant que l'État rapatrie en 1987 le reste de son épargne financière extérieure, il lui faudrait avoir largement recours à l'emprunt commercial dès cette année pour maintenir les réserves extérieures nettes à un niveau minimum. Les besoins de financement extérieur atteindraient dès 1988 des montants qui dépasseraient la capacité d'emprunt du pays, en termes d'accès aux sources commerciales et de capacité de service de la dette dans le long terme. 20. La contrainte financière intérieure serait également importante bien que moins sévère que la contrainte extérieure. Dans un tel scénario sans ajustement il est supposé, en autres hypothèses, qu'en l'absence d'actions de réhabilitation/restructuration en profondeur des entreprises publiques, les subventions et transferts courants resteraient en termes réels au niveau de 150 milliards de FCFA par an sur toute la période de la projection et que les dépenses en capital de l'État, y compris la part des investissements des entreprises publiques qui est à la charge de l'État, continueraient de représenter 35 % de l'investissement fixe total. En revanche, on suppose que la croissance de l'emploi dans la fonction publique serait réduite à 6 % par an. L'excédent global des opérations de l'État, qui a été réalisé pratiquement chaque année depuis 1979, se transformerait alors en un déficit de quelque 335 milliards de FCFA en 1987 (7,7 % du PIB), qui croîtrait jusqu'à plus de 400 milliards de FCFA en 1991. Il s'agit-là de besoins nets de financement. Ces besoins devraient être couverts par des emprunts supplémentaires auprès des sources officielles, par des emprunts extérieurs commerciaux et par l'emprunt intérieur. Les charges récurrentes de service de ces emprunts entraîneraient une augmentation rapide des besoins bruts de financement de l'État qui deviendraient vite excessifs. 21. Les résultats financiers obtenus à partir du scénario B, pour les prix et la production de pétrole les hypothèses restant les mêmes pour toutes les autres variables de la projection sont évidemment moins mauvais mais ne seraient pas viables non plus à moyen terme. 22. Par conséquent, il ressort de ces projections que si les prix du pétrole ne s'améliorent pas sensiblement dans les mois qui viennent (Scénario A), des mesures d'ajustement de l'économie devraient être prises rapidement. Avec les hypothèses du scénario B, le pays disposerait d'un délai d'environ deux ans pour préparer un programme d'ajustement, mais l'ampleur de ce programme devrait être aussi large que dans le premier cas. Il convient d'observer cependant que, contrairement à beaucoup de pays qui ont dû entreprendre un ajustement de leur économie sous la pression d'une crise due à la baisse prolongée de leur revenu intérieur et à un endettement extérieur excessif, le Cameroun se trouve dans une situation privilégiée pour ajuster son économie sans choc brutal en raison de son faible endettement et de son épargne financière intérieure et extérieure substantielle. 23. Le Cameroun est confronté à un autre défi : la nécessité de créer [PAGE 370] des emplois à un rythme rapide. Le taux de croissance de la population pendant les années 70 a été d'environ 2,3 % par an. Il s'est accéléré dans les années récentes et devrait atteindre 3,2 % jusqu'à la fin du siècle. La population va par conséquent passer de 10 millions actuellement à plus de 15 millions en l'an 2000. Cela signifie 2 millions d'emplois à créer en moins de 15 ans. 24. 900 000 à 1 million d'emplois, au mieux, pourraient être créés dans l'industrie, la construction et les services non administratifs, d'autant qu'il faudra compter avec les réductions d'emplois qui résulteront inévitablement de la réhabilitation/restructuration des entreprises publiques. Cet objectif de création de l'emploi correspondrait à un taux de croissance de l'emploi de 5 % par an et à un taux de progrès de la productivité de 1,26 % par an (Tableau ci-dessous). Le taux de croissance correspondant de 6,3 % par an en moyenne suppose que le développement de ces secteurs repose sur des activités orientées vers l'exportation, puisque la demande intérieure d'investissement et de consommation non alimentaire ne pourrait croître à plus de 5 % par an pendant la même période étant donné la contrainte financière. Pour que le chômage ne s'étende pas dans les villes dans des proportions dramatiques, l'autre million d'emploi devra être créé dans l'agriculture et l'exploitation de la forêt. Cet objectif n'est pas impossible, un taux de croissance moyen de 3,8 % de la valeur ajoutée agricole pouvant correspondre à un taux de croissance de l'emploi de 2,2 % et de 1,56 % pour la productivité. Sa réalisation exigera cependant la mise en œuvre de politiques d'incitations énergiques, en particulier pour stimuler le développement des cultures d'exportations.
25. Le dosage des actions que l'État va prendre dans les domaines économique, fiscal et monétaire sera critique pour le niveau de revenu du pays dans le futur. En effet, bien que la chute des recettes pétrolières [PAGE 371] de l'État soit à peu près égale à celle du Revenu intérieur, toute action visant à compenser cette chute aura inévitablement une série d'effets secondaires. Par exemple, dès l'instant où l'État augmente la fiscalité ou réduit ses dépenses courantes ou ses dépenses en capital, il se produira des effets variables sur la croissance du PIB, le niveau des salaires réels et de l'épargne, et sur la balance commerciale et le taux de change réel. De la même manière, un recours accru à l'emprunt extérieur entraînera des changements dans les niveaux actuels et futurs de revenu et de consommation du pays. 26. La seule réduction des dépenses en capital ne permettrait plus de résoudre le problème de la chute des recettes pétrolières. En effet, les niveaux de dépenses récurrentes de l'Etat, y compris les besoins de financement courant des entreprises publiques qu'il a établies, et, dans une moindre mesure, de consommation privée, ainsi que, par conséquent, les besoins en importation de l'économie se sont déjà ajustés au niveau des recettes pétrolières. En outre une telle action serait dangereuse. En effet, à l'heure actuelle environ 50 % des dépenses en capital de l'État sont financées par les comptes hors-budget et une réduction de moitié de ces dépenses aurait des conséquences graves sur la croissance future de l'économie. 27. L'ajustement de l'économie va par conséquent nécessiter un ensemble de mesures simultanées et coordonnées consistant essentiellement en :
ii) une diminution graduelle et modérée du taux d'investissement par rapport au PIB, à peu près jusqu'au niveau où il se trouvait avant l'avènement du pétrole, combinée à une augmentation progressive de l'efficacité et de la rentabilité moyenne des investissements; iii) au plan des finances publiques, une réduction des dépenses en capital de l'État; un ralentissement de la croissance de la consommation publique (y compris les transferts aux entreprises publiques); et un accroissement des recettes fiscales; iv) la réhabilitation des entreprises publiques et toutes autres mesures visant à réduire leur coût pour l'économie et pour le budget; v) la stimulation de l'investissement privé, national et étranger, pour compenser la diminution relative de celui de l'État, et élargir la base productive, principalement pour l'exportation; vi) le recours accru à l'emprunt extérieur dans le cadre d'une stratégie clairement établie; et vii) une série de mesure de politique monétaire visant essentiellement à accompagner et renforcer les actions ci-dessus. 29. La mission a construit un autre scénario pour simuler les effets de cet ensemble de mesures d'ajustement, en utilisant les hypothèses du scénario A pour les prix et la production de pétrole. Les résultats indiquent que le Cameroun pourrait absorber une baisse rapide des revenus du pétrole sans à-coups excessifs sur la consommation et l'investissement, tout en maintenant la croissance au niveau nécessaire pour créer des emplois en nombre suffisant et en n'ayant que modérément recours à l'emprunt extérieur, pour autant que les politiques requises soient mises en œuvre activement sur un large front. 30. Dans ce scénario, la croissance du PIB non pétrolier serait inférieure de deux points en moyenne pendant la période 1987-91 et de un point durant 1992-96 par rapport au scénario de base sans ajustement. L'évolution des différents secteurs serait la suivante :
Le taux d'investissement fixe par rapport au PIB serait graduellement réduit jusqu'à 19,0 % en 1991 et resterait à ce niveau jusqu'en 1996. Le total des investissements fixes serait dans ce scénario de quelque 4 200 milliards de FCFA aux prix de 1984 pour la période du Sixième Plan contre 4 800 milliards dans le scénario de base. Une part croissante de la production serait exportée et la croissance de la consommation serait réduite de deux points environ par rapport au scénario de base. Avec les effets conjugués de la réduction de l'investissement, dont le contenu d'importations est élevé, et du ralentissement de la croissance, la demande d'importation serait fortement compressée pendant la période 1987-91. Le taux d'épargne intérieure, ajusté de l'effet des termes de l'échange, ne tomberait qu'à quelque 19,4 % du PIB en 1991 contre 17,9 dans le scénario de base. Le déficit courant de la balance des paiements pourrait être maintenu entre 400 et 500 millions de dollars par an sur toute la période de la projection diminuant d'une pointe à 3 % du PIB en 1989 à 2,4 % en 1996 et pourrait être financé par l'emprunt extérieur sans endettement excessif [PAGE 373] dans le long terme, pour autant qu'une stratégie d'emprunt prudente soit suivie. 31. Au plan des finances publiques, il apparaît que la chute des recettes pétrolières et le déficit budgétaire pourraient être maîtrisés sans compromettre la croissance future de l'économie avec une série de mesures fiscales et budgétaires appropriées. Il est clair qu'en 1987 et 1988 l'État devra non seulement utiliser son épargne intérieure et extérieure mais aussi accroître l'emprunt, à l'extérieur et auprès de la Banque centrale pour couvrir ses besoins de financement. Ces besoins diminueraient cependant ensuite et pourraient alors être facilement couverts par l'emprunt extérieur et intérieur. 32. En résumé, les mesures d'ajustement des finances publiques qui ont été simulées dans ce scénario seraient les suivantes :
augmentation modérée des taxes qui s'ajoutent aux tarifs communs de l'UDEAC sur les biens intermédiaires et les biens de consommation, dans le cadre d'une réforme de cette taxation (voir para. 38), de façon à porter graduellement le rapport des recettes douanières de 26,2 % de la valeur FOB des importations de biens en 1986 à 30,5 % en 1989; réduction de la croissance des dépenses récurrentes (matériels et approvisionnements) à 2 % par an en termes réels pendant la période 1987-91 et maintien d'un taux à 5 % durant 1991-96, combinés à une amélioration du recouvrement des coûts dans certains secteurs tels que l'éducation et à une stimulation du développement des services privés (santé); stabilisation des effectifs de la fonction publique jusqu'en 1991 et augmentation limitée à 2 % par an jusqu'en 1996; stabilisation du poste « transferts et subventions » courantes à un niveau inférieur à 150 milliards de FCFA en prix courants à partir de 1987, correspondant à une diminution de 4,5 % par an en termes réels; réduction, en valeur relative, des dépenses en capital de l'État, de 35 % de l'investissement fixe du pays dans les années récentes à 33 % en 1987 et 32 % ensuite, correspondant à une diminution de ces dépenses de 8 % du PIB en 1985 à 6,3 en 1991 et 6,1 en 1996 (l'investissement public direct pourrait être maintenu au niveau actuel en termes réels pendant la période d'ajustement, pour autant que les autres dépenses en capital puissent être fortement compressées); [PAGE 374] priorité accordée aux projets publics ayant un impact rapide et puissant sur la production et l'exportation (transports, infrastructure urbaine et rurale, enseignement technique et formation professionnelle) et évaluation rigoureuse de la rentabilité économique des projets; et renforcement des instruments de prévision et de planification par i) la programmation des recettes pétrolières, ii) leur prise en compte dans la programmation du budget et des investissements, iii) l'évaluation systématique des dépenses récurrentes des nouveaux investissements, et iv) la préparation d'un budget analytique dans le cadre d'un plan glissant de trois ans, intégrant l'ensemble des recettes, les dépenses de fonctionnement, les subventions, l'épargne courante, les apports nets au titre des emprunts extérieurs (et intérieurs) et les dépenses en capital. 33. En ce qui concerne les entreprises et établissements du secteur public et para-public, le Gouvernement a récemment établi une Mission pour étudier et préparer des mesures de réhabilitation. Il serait souhaitable que cette mission non seulement propose et prépare activement les mesures de réhabilitation et de privatisation des entreprises et les mesures visant à améliorer le cadre institutionnel, juridique et de gestion dans lequel elles opèrent, mais soit ensuite organisée de façon à mettre en #339;uvre ces mesures. Elle pourrait constituer par la suite l'organe technique de la tutelle de l'État pour i) assurer le suivi et le contrôle a posteriori des entreprises qui resteraient dans son portefeuille et ii) assurer que les nouveaux projets dans lesquels l'État jugera opportun de s'engager financièrement, ainsi que les projets qui seraient autofinancés par les entreprises publiques existantes, soient évalués aux plans technique, économique et financier avec la plus grande rigueur. 34. Le Cameroun dispose d'un potentiel de ressources naturelles et humaines important pour accroître ses exportations agricoles, industrielles et de services. D'un point de vue théorique la stimulation d'une réponse de la production vers l'exportation nécessiterait une diminution relative des prix intérieurs par rapport aux prix extérieurs et une augmentation relative des prix des biens et services échangeables par rapport à ceux des biens et services non échangeables. Étant donné que l'appartenance du Cameroun à l'Union monétaire union qui comporte par ailleurs de nombreux avantages ne lui permet pas d'agir sur le taux de change, il lui faudra recourir à un ensemble de mesures dans les domaines des tarifs douaniers, de la fiscalité, de la politique de prix, de la politique de crédit et des finances publiques et à un ensemble d'incitations d'ordre économique et institutionnel pour obtenir les effets voulus sur le taux de change réel. Dans le scénario d'ajustement et d'orientation vers l'exportation, on a retenu les taux de croissance suivants pour les principales catégories d'exportations : [PAGE 375]
Ces taux indiquent en substance l'effort d'exportation qui serait nécessaire sur tous les fronts pour compenser la perte des revenus du pétrole, maintenir un taux de croissance de l'économie suffisant et réaliser l'équilibre de la balance commerciale à un horizon d'une douzaine d'années, tout en reflétant ce qui semble être potentiellement réalisable dans chacun des secteurs si l'ensemble des incitations nécessaires est mis en place. 35. Pour l'agriculture les mesures principales devraient inclure :
consécutivement à l'augmentation des prix aux producteurs, l'élimination des subventions aux intrants et le renforcement du rôle du secteur privé et des coopératives dans la distribution des intrants; la déréglementation de la commercialisation des cultures de rente et la « défonctionnarisation » des coopératives ; la priorité donnée dans le programme d'investissements publics à l'infrastructure rurale et à l'amélioration du cadre de vie des populations rurales; l'établissement de contrats entre les communautés villageoises et l'État pour le financement de travaux d'amélioration du cadre de vie en échange de la libération de terres pour de nouvelles plantations; en ce qui concerne le crédit agricole, l'amélioration de l'efficacité du FONADER et l'augmentation des marges des coopératives, la mise en place d'incitations au développement des organismes de crédit mutuel, l'association de l'offre de crédit à la diffusion du progrès technologique et le développement actif de l'infrastructure en services financiers dans les zones rurales; et [PAGE 376] en plus de ces mesures d'incitations directes, d'autres réformes ou actions au niveau du soutien institutionnel à l'agriculture, dont pour la plupart le principe a déjà été décidé par le Gouvernement, devraient être mises en œuvre rapidement. 36. A long terme c'est l'exploitation des forêts qui pourrait devenir une des principales sources de devises, avec le café et le cacao. Pour atteindre cet objectif il serait nécessaire de mettre en #339;uvre un programme d'actions en profondeur aux niveaux institutionnel, juridique, technique, économique et commercial. Il convient de souligner que pour développer ce secteur il serait essentiel de faire appel à des partenaires étrangers, non seulement pour bénéficier de leur capital et leur expérience technique et opérationnelle, mais surtout pour avoir accès dans les meilleures conditions aux marchés extérieurs, en particulier pour les produits transformés du bois. 37. Les taux de croissance projetés pour les exportations manufacturières paraissent élevés, mais étant donné le niveau relativement faible des exportations à l'année de base ils constituent des objectifs tout à fait réalisables, pour autant que le cadre d'incitations nécessaire soit mis en place. Qu'il s'agisse d'exportation ou de substitution à l'importation le cadre général d'incitations doit permettre aux forces du marché le soin de susciter les décisions d'investissement et de production et viser à favoriser le développement d'industries efficaces et compétitives et qui aient un avantage comparatif certain. La production à l'exportation nécessite en outre des incitations additionnelles qui permettent aux exportateurs de concourir sur les marchés extérieurs dans les mêmes conditions que leurs concurrents d'autres pays. Avec la diminution des ressources financières de l'État et la nouvelle stratégie du gouvernement visant à limiter les interventions directes de l'État dans le développement industriel, le secteur privé va devoir générer une plus grande part de l'investissement. Il va donc falloir stimuler activement la mobilisation de l'épargne nationale et son investissement dans des activités productives. Un recours accru à l'investissement étranger direct serait également essentiel, tant en raison de l'insuffisance de l'épargne nationale que pour bénéficier du savoir-faire indispensable au développement d'activités efficaces dans l'industrie et pour avoir accès aux marchés extérieurs. Par rapport à beaucoup d'autres pays, le Cameroun dispose déjà d'atouts importants pour attirer l'investissement étranger. Il suffirait de compléter ces atouts par des incitations aussi favorables que celles offertes par les autres pays ouverts à l'investissement étranger et, surtout, un cadre administratif et de réglementation qui le facilite. 38. Pour l'industrie et l'investissement, le programme d'ajustement inclurait les réformes et actions principales suivantes :
l'uniformisation des taux de protection effective pour toutes les branches de l'industrie manufacturière tout en relevant le degré moyen de protection pour les biens intermédiaires et les biens de consommation ; la libération des prix industriels en coordination avec l'élimination des protections non-tarifaires et, dans les cas où un contrôle resterait nécessaire, le remplacement du contrôle a priori par un contrôle a posteriori; la mise en place d'un système efficace d'incitations aux exportations manufacturières; la simplification des réglementations sur l'entreprise, les salaires, l'emploi et le commerce de façon à réduire le champ d'intervention de l'administration; le renforcement et la « défonctionnarisation » des organismes d'assistance technique et financière aux PME et l'instauration d'incitations à l'investissement qui soient spécifiquement adaptées aux contraintes et conditions d'exploitation des PME; l'ajustement du Code des Investissements de façon à considérer la rentabilité économique des projets comme critère d'éligibilité principal, à assurer que les avantages fiscaux accordés aient un effet neutre sur l'intensité en capital et en main-d'œuvre des projets proposés et, en ce qui concerne l'investissement étranger, que ces avantages soient aussi attractifs et automatiques que ceux offerts par d'autres pays en compétition avec le Cameroun pour attirer l'investissement étranger; la reconstitution du capital des banques la révision des politiques de taux d'intérêt et de réescompte l'abolition graduelle des taxes sur les emprunts et les prêts (TDC, ICAI et TPCRM); et la création d'instruments pour développer le marché financier et le marché des capitaux. 39. L'insuffisance des infrastructures, en particulier dans les zones urbaines, et le manque de personnel qualifié, de techniciens et de gestionnaires constituent des contraintes sévères au développement industriel. Il n'est pas dans l'objet de ce rapport d'aborder les problèmes de l'éducation, mais il convient de souligner que le développement industriel futur du Cameroun dépendra dans une large mesure d'une réorientation fondamentale du système d'éducation en faveur de la formation professionnelle, de l'enseignement technique et des disciplines scientifiques au détriment des disciplines classiques et littéraires. En ce qui concerne l'infrastructure, les programmes d'investissement public devront continuer à donner la priorité au développement urbain et aux transports et télécommunications, en coordination avec le développement industriel, et augmenter la part des ressources affectées à la réhabilitation et l'entretien des équipements existants. [PAGE 378] 40. La mission n'avait pas eu connaissance du document final du Sixième Plan de Développement (1987-91) lorsque ce rapport a été préparé. Le Sixième Plan, qui a été publié en Novembre 1986, incorpore nombre d'objectifs et de déclarations de politique qui sont dans la ligne des mesures et politiques d'ajustement discutées dans le chapitre II dans le rapport. Le niveau de l'investissement fixe cumulé des cinq années 1987-91 envisagé par le Plan correspond à celui qui est projeté dans le Scénario d'Ajustement de ce rapport (Tableau 30). Le Gouvernement a pris déjà au cours de ces derniers mois certaines mesures dans le sens de l'ajustement. Ces mesures concernent en particulier la réhabilitation et la réduction du coût du secteur parapublic, l'apurement du rôle des fonctionnaires et agents de l'État, l'amélioration du recouvrement de certaines catégories d'impôts et la réduction de la croissance des dépenses publiques, la rationalisation de la passation des marchés publics et la réforme du cadre institutionnel de soutien au développement rural. 41. Même en introduisant les mesures d'ajustement et de stimulation des exportations discutées ci-dessus le Cameroun aura encore à faire face à des besoins de financement extérieur relativement importants. Le rapport examine plusieurs scénarios d'emprunt de façon à dégager les principes d'une stratégie d'emprunt extérieur qui permette de minimiser la charge du service de la dette dans le long terme et de limiter les risques inhérents aux fluctuations des taux d'intérêt, des recettes d'exportations et des taux de change. Ces principes sont les suivants :
il aurait intérêt à recourir largement aux prêts-projets de cofinancement des banques commerciales, dont les conditions de grâce et de maturité sont généralement nettement plus favorables que celles des crédits financiers classiques ; compte tenu des possibilités d'accès du Cameroun aux sources bilatérales, aux sources multilatérales et aux prêts commerciaux de cofinancement à des conditions améliorées, la composition optimale du total des emprunts publics et garantis par l'État serait de :
45 à 50 % des sources multilatérales 15 à 20 % en prêts-projets de cofinancement des banques commerciales moins de 10 % en crédits financiers commerciaux ou crédits-exportations. un indicateur utile est celui du rapport moyen des nouveaux engagements et des déboursements aux exportations de biens et services de l'année antérieure. Pour autant que l'on puisse prévoir une croissance des exportations d'environ 10 % par an en moyenne à prix courants dans le long terme (ce qui est le cas pour la période 1991- 2001 dans le scénario d'ajustement), et avec la combinaison optimale d'emprunts ci-dessus, l'analyse des différentes simulations suggère un critère pratique intéressant pour les décideurs, à savoir qu'il ne faudrait pas emprunter au cours d'une année donnée plus de 26 à 27 % des exportations de l'année précédente, en termes d'engagements, et 22 à 23 % en termes de déboursements, afin de maintenir le ratio du service de la dette aux exportations à un niveau n'excédant pas 15 ou 16 % dans le long terme (les rapports des nouveaux engagements en emprunts publics et garantis par l'État, et des déboursements aux exportations de l'année antérieure ont été de 20,0 % et 17,7 %, respectivement, en moyenne au cours de la période 1978-84. 42. Sur la base des déficits courants de la balance des paiements et des éléments du compte de capital tels qu'ils ressortent du scénario d'ajustement (prolongé jusqu'à l'an 2001), le scénario optimal d'emprunt extérieur donnent les résultats suivants. Les engagements futurs auprès des sources bilatérales, multilatérales et commerciales à termes améliorés sont projetés de façon exogène année par année; le modèle calcule ensuite les besoins de financement supplémentaires (sources commerciales aux termes du marché) pour maintenir les réserves extérieures en devises à un niveau minimum. Ces résultats indiquent que pour autant que le Cameroun introduise les mesures d'ajustement nécessaires de son économie, réalise les taux de croissance projetés pour ses exportations non pétrolières et suive une stratégie d'emprunt extérieur prudente, il peut maintenir ses besoins bruts en emprunts extérieurs à des niveaux tout à fait compatibles avec sa capacité d'accès aux différentes sources de financement et une charge relative de la dette très modérée dans le long terme. 43. Le modèle utilisé pour ces projections ne permet pas d'établir une cohérence stricte entre les besoins de financement extérieur du point de vue de la balance des paiements et les besoins de financement de l'État, car il ne comporte pas de module monétaire. Il apparaît cependant que les besoins nets en emprunts extérieurs officiels, c'est-à-dire emprunts de l'État ou garantis par l'État, tels qu'ils ressortent du scénario optimal d'emprunt extérieur, seraient sensiblement inférieurs aux besoins nets de financement de l'État pour la période 1987-91 et seraient équivalents pour la période 1991-1996. [PAGE 380]
Cela signifie que l'État, à moins de réduire ses dépenses plus qu'il n'est projeté, devra emprunter à l'extérieur entièrement pour son compte dans les cinq années à venir et devra en outre réduire ses dépôts dans les banques commerciales et recourir au financement de la Banque centrale. Le volume de ressources extérieures requis serait probablement difficile à mobiliser exclusivement par des prêts liés à des projets et l'État devra probablement avoir recours à des emprunts financiers libres. 44. Il est évident que toutes les réformes et actions proposées dans le rapport, aussi bien celles déjà décidées par le Gouvernement dans le cadre des Cinquième et Sixième Plans que celles qui sont proposées pour répondre à la chute des recettes du pétrole et établir les conditions d'une croissance soutenue dans le long terme ne peuvent pas être entreprises en même temps. D'une part il faudra compter avec la capacité [PAGE 381] de conception et d'exécution des services ministériels; d'autre part il ne faudrait pas bouleverser trop rapidement les structures de l'économie. Pour préparer les mesures d'ajustement, mettre en place une stratégie d'emprunt extérieur et établir des ordres de priorité et un calendrier dans le temps il serait souhaitable de constituer un groupe de coordination qui réunirait, des responsables du Ministère des Finances, du Ministère du Plan et du Ministère du Commerce et de l'Industrie. Ceci permettrait d'assurer la conciliation des impératifs financiers et des objectifs économiques.
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MEMORANDUM ÉCONOMIQUE INTRODUCTION 0.1 Un mémorandum économique sur le Cameroun (Rapport No 2 877-CM) a été publié en avril 1980. Il faisait le point des développements économiques pendant les années 70, et présentait un résumé du premier recensement effectué au Cameroun (en 1976) » ainsi qu'une étude des problèmes que pose la satisfaction des besoins élémentaires. Une analyse économique plus approfondie a été préparée en 1982-84 dont les thèmes principaux étaient le premier impact de la production pétrolière et l'évaluation du Cinquième Plan quinquennal de développement (1982-86)[2] et du processus de planification. Son but était de fournir un cadre au dialogue macroéconomique et sectoriel entre le Gouvernement camerounais et la Banque et de leur permettre d'identifier ensemble les priorités pour l'octroi de prêts. Le présent mémorandum économique se propose de faire une synthèse des principaux développements économiques et financiers depuis 1978, d'évaluer l'impact de la production pétrolière sur ces développements et d'analyser les ajustements de l'économie qu'il serait nécessaire d'apporter à l'économie à la veille du Sixième Plan de développement (1987-91) pour absorber le déclin pétrolier et établir les conditions de la croissance pour le long terme. 0.2 La population du Cameroun est de 10 millions d'habitants (chiffre de 1986) et sa superficie de 475 000 km2. C'est l'un des pays d'Afrique les plus diversifiés : ses zones climatiques sont nombreuses et variées de même que ses conditions écologiques, ses ressources naturelles, les densités de sa population, ses groupes ethniques et ses cultures traditionnelles. Le Cameroun dépendait autrefois presque exclusivement du secteur rural qui est toujours le secteur économique le plus important, avec la plus grande part de l'emploi. Le Cameroun produit du pétrole depuis 1978. En 1985, sa production a atteint 8,4 millions de tonnes de brut, soit environ 172 000 barils par jour. Il dispose également de modestes réserves de gaz encore inexploitées. L'avenir du Cameroun repose principalement sur le développement de l'agriculture, de l'élevage et de la foresterie; sur l'exploitation de l'énergie hydroélectrique et des ressources minières; sur la transformation pour l'exportation des produits de l'agriculture, de la foresterie et des produits miniers et sur [PAGE 383] certaines productions manufacturières pour le marché de l'Union douanière des États de l'Afrique centrale (UDEAC) et d'autres pays. 0.3 Les principaux centres économiques du Cameroun sont séparés par de vastes régions à faible densité de population. Les installations portuaires du pays et le réseau de transport desservent également le Tchad et la République centrafricaine qui n'ont pas d'ouverture sur la mer. Le principal axe de transport Nord-Sud et les grandes artères qui relient les différentes parties du pays sont presque terminés, de nouvelles routes sont en construction. En raison de la croissance des industries manufacturières, de la fonction publique, des transports, du bâtiment et des services, le Cameroun s'urbanise de plus en plus. Environ 36 % de la population vivent désormais dans les villes, les plus grands centres urbains étant Douala, le principal port et centre industriel du pays, et Yaoundé, la capitale. 0.4 La mise en exploitation des gisements pétroliers, en 1978, a profondément influencé l'évolution de l'économie camerounaise. En 1985, la part du pétrole dans le PIB global était passée de 17 % du PIB et était estimée à 45 % des recettes totales de l'État. Les recettes pétrolières nettes en devises représentaient quelque 35 % du total des exportations de biens et services non-facteurs. Les revenus pétroliers ont favorisé une expansion rapide de l'investissement, ce qui a permis aux secteurs non pétroliers de croître rapidement, en particulier, l'industrie manufacturière et la construction. L'épargne nationale, ayant augmenté rapidement, les investissements en immobilisations sont passés de 21 % du PIB en 1978 à plus de 25 % en 1985 et les investissements directs de l'État, non compris les investissements des entreprises publiques, sont passés d'environ 20 % à 25 % de l'investissement total. Ces faits ont eu pour résultats une augmentation du PNB par habitant en prix courants, qui est passé d'un niveau estimé à 494 dollars en 1978 à 800 dollars en 1985, ce qui représente une croissance réelle d'environ 6 à 7 % par an en termes de francs CFA. Ces résultats ont été réalisés dans un contexte international instable et défavorable tout en maintenant la stabilité financière, à l'extérieur comme à l'intérieur. Les recettes pétrolières sont utilisées avec prudence. Non seulement le Gouvernement s'est refusé à augmenter trop rapidement les emprunts extérieurs, mais il s'est même servi d'une partie de ses revenus pour rembourser sa dette. 0.5 Il faut souligner, au début de ce rapport, que la qualité et la couverture des données statistiques du Cameroun laissent à désirer, ce qui rend difficile une analyse rigoureuse : i) les transactions pétrolières ne sont enregistrées qu'en partie dans les comptes de la nation, dans les finances publiques, dans la balance des paiements et dans les réserves officielles; ii) les comptes de la nation ne sont pas disponibles au-delà de l'exercice 84; de plus, ils sont seulement établis en prix courants et leur couverture, de même que leur fiabilité, est sujette à caution; iii) les données sur la production agricole, et en particulier sur les cultures vivrières, sont sommaires et la couverture des données sur la production industrielle est incomplète; iv) il n'existe pas de données [PAGE 384] sur l'emploi, sauf pour la fonction publique; v) la balance des paiements, basée sur les règlements financiers effectués par les banques commerciales, ne couvre qu'une partie des importations et des exportations et des mouvements de capitaux, laissant une grande quantité de mouvements non identifiés sous la rubrique erreurs et omissions; vi) il n'y a pas d'indice des prix à la consommation au niveau national; et vii) les comptes détaillés de l'État ne sont pas disponibles, pas plus que les données sur l'exécution des comptes hors-budget qui financent 50 % des dépenses en capital du Gouvernement. La mission a ajusté les comptes de la nation, les données du commerce extérieur et la balance des paiements pour mieux prendre en compte les transactions pétrolières, et a préparé des estimations des comptes nationaux à prix constants. Ces estimations doivent être traitées avec réserve et ne constituent que des indicateurs généraux des résultats économiques. I. L'ÉVOLUTION RÉCENTE A. Structure et tendances de l'investissement 1.1 C'est en grande partie aux investissements en capital fixe que l'économie camerounaise doit sa croissance rapide, en particulier entre 1979 et 1981. Grâce au flux des recettes pétrolières, l'investissement en capital fixe a augmenté, passant de 21 % du PIB en 1978 (18 % en 1976) à près de 25 % en 1981. Ceci signifie que la croissance réelle des investissements fixes a été d'environ 17 % par an au cours de ces trois années. Par la suite, l'effort d'investissements fixe a été plus ou moins maintenu aux environs de 25 % du PIB jusqu'en 1983 (Tableau 1). La croissance rapide des investissements en capital fixe observée entre 1979 et 1981 était due surtout à la formation brute de capital des entreprises, qui reflète les investissements réalisés pour l'exploitation des ressources pétrolières, l'achèvement de la raffinerie de pétrole et l'exécution de plusieurs grands projets d'entreprises publiques industrielles. Une bonne partie de ces investissements ont été financés par l'État, comme le montre l'augmentation rapide, en 1981, des dépenses en capital hors-budget (Tableau 13). Ce n'est qu'à partir de 1983, cependant, que l'investissement direct de l'État a augmenté en proportion de l'investissement total et par rapport au PIB. 1.2 Le Cinquième Plan quinquennal de développement (1982-86) a tenu compte de façon réaliste de la nature temporaire du boom pétrolier et des limitations au niveau de la capacité d'absorption de l'investissement. Le niveau d'investissement planifié n'a été accru que modérément par rapport à l'épargne et au PIB. Comme le Quatrième Plan quinquennal (1977-81) avait trop encouragé les activités directement productives, y compris l'établissement d'un certain nombre de grandes entreprises industrielles publiques, ce qui ne s'est pas révélé judicieux
dans plusieurs cas, les investissements du Cinquième Plan ont fortement favorisé l'agriculture, le développement rural et les secteurs sociaux (Tableau 2). Les principaux objectifs de ce Cinquième Plan étaient : a) de réaliser l'autosuffisance alimentaire; b) de diversifier l'économie en produisant des produits primaires et en les transformant sur place; c) de mettre un terme à l'exode rural et d'atténuer les pressions que subissent les zones urbaines; d) de réduire les disparités interrégionales du développement; et e) d'améliorer la formation technique et professionnelle des Camerounais pour remplacer graduellement les cadres et les techniciens étrangers. 1.3 Pendant les trois premières années de l'exécution du Cinquième Plan, pour lesquelles on dispose de données partielles, la répartition sectorielle et le niveau des investissements se sont considérablement écartées des objectifs prévus (Tableau 2). Les deux seuls secteurs où les montants prévus par le Plan ont été dépassés sont l'équipement des administrations, et tout spécialement les bâtiments ministériels, et les industries manufacturières et l'artisanat. Le taux global de l'exécution des investissements sur le plan financier (dépenses) n'a été que de 50 % environ. Ce taux n'a été que de 34 % pour l'agriculture, de 26 % pour l'éducation et de 20 % pour la santé. Cela reflète des contraintes sévères de capacité d'absorption dans ces secteurs, pour ce qui est de l'identification et de la préparation des projets, de la prise de décisions et des procédures administratives, de la direction de l'exécution des projets et de la capacité des entreprises de construction. Les investissements dans le secteur des services commerce, transports et tourisme se [PAGE 386] sont généralement déroulés comme prévu (62 % d'exécution), alors que les investissements dans les infrastructures sont restés inférieurs aux objectifs.
B. La production 1.4 Depuis 1979 le pays a connu une croissance économique globale remarquable, bien que des déséquilibres se soient manifestés dans le développement relatif des différents secteurs. Sous réserve des insuffisances des statistiques officielles, il est probable que la croissance du PIB a été d'environ 10 % par an entre 1979 et 1985. Ce résultat est [PAGE 387] dû pour une bonne part à l'expansion rapide de la production de pétrole, qui, en atteignant 8,4 millions de tonnes pendant l'exercice 95, a fourni les ressources qui ont permis au niveau de la demande globale, et en particulier de la demande d'investissement, de s'élever rapidement. Ils s'explique également par la priorité que le Quatrième Plan (1977-81) a accordée à l'investissement directement productif ainsi que par la montée en production de plusieurs grandes entreprises publiques engagées dans la substitution aux importations. On estime que le PIB non pétrolier a augmenté d'environ 8 % par an entre 1979 et 1985. De 1967 et 1978, avant l'apparition du pétrole, l'économie avait progressé en moyenne de 5 % par an.
(basée sur les estimations des comptes nationaux par la mission en prix constants de 1980) 1.5 A l'instar du taux des investissements, il s'est produit un ralentissement de la croissance de l'économie camerounaise en 1982. La production du secteur pétrolier a plus que doublé d'année en année entre 1979 et 1981, atteignant son régime de croisière en 1982, et son taux de croissance redescendant alors à des niveaux normaux. La croissance globale du PIB qui est tombée de 14 à 8 %, tandis que celle du PIB, pétrole non compris, a été ramenée de 10 à 6 %. Si l'on fait abstraction du pétrole et des industries manufacturières, ce sont les secteurs de la construction et des services et, dans une moindre mesure, les cultures [PAGE 388] vivrières qui ont enregistré les taux de croissance les plus élevés (on trouvera au Tableau 9.2 de l'annexe les données concernant la Production vivrière). En revanche, la production agricole pour l'exportation est restée pratiquement stagnante. Ce phénomène illustre, bien que de façon limitée, le « syndrome pétrolier », c'est-à-dire les effets des revenus pétroliers sur les pays producteurs de pétrole : ce syndrome se manifeste par des pressions inflationnistes et par un effet de distorsion sur la structure de la production et de la demande intérieures en faveur des biens non échangeables. Bien que, d'après les indices ci-dessous, il ne se soit pas produit d'accélération notable de l'inflation pendant la période 1979-85, les prix intérieurs ont augmenté sensiblement plus vite que les prix à l'exportation, ce qui tendrait à indiquer des distorsions dans la croissance respective des prix des biens échangeables et non échangeables :
Ces développements ont probablement entraîné une augmentation modérée du taux de change réel, bien que les statistiques disponibles ne permettent pas de la quantifier. 1. Le pétrole et les industries extractives 1.6 On ne dispose pas de chiffres officiels sur les réserves, la production et les revenus pétroliers. Lorsque la production a commencé en 1978, les analystes pétroliers internationaux estimaient à quelque 100 millions de tonnes les réserves exploitables. Au niveau du prix actuel, on estime que les réserves restantes économiquement récupérables sont de l'ordre de 40 millions de tonnes (mars 1986). La production devrait atteindre son maximum en 1986 (8,8 millions de tonnes), puis diminuer régulièrement jusqu'au début des années 90. Les réserves économiquement récupérables pourraient augmenter quelque peu si le prix du pétrole remontait à 20 dollars ou plus le baril en dollars constants de 1984. La prospection s'est cependant ralentie depuis quelques années et, actuellement, rien ne laisse présager de nouvelles découvertes. Quatre [PAGE 389] compagnies pétrolières internationales sont actives au Cameroun où elles forment trois consortiums : Mobil/Total, Shell Pecten/Elf Serepca, Elf Serepca/Shell Pectel, qui exploitent les trois principaux gisements situés en mer près de la côte, au nord-ouest de Douala. 1.7 Une société publique autonome, la Société nationale des hydrocarbures (SNH), a été créée en 1980 pour veiller à ce que les ressources en hydrocarbures soient exploitées d'une manière rationnelle et sous le contrôle de l'État. La SNH agit pour le compte de l'État en tant que société de holding et participe à des co-entreprises en association avec les sociétés étrangères. Aux termes des accords de production, les dépenses de prospection sont réparties à égalité entre la SNH et les partenaires étrangers, de même que les coûts des nouveaux investissements. Quant au partage de la production, il semble que la SNH ait reçu 60 % des 15 premiers millions de tonnes de production cumulée; cette part est ensuite montée graduellement à 70 %. La SNH détient aussi une participation dans la raffinerie nationale (SONARA) dont les opérations ont débuté en 1981 avec une capacité d'environ 2 millions de tonnes par an. La SNH fournit à la raffinerie le brut de sa part de la production et vend le reste sur le marché du disponible. Les compagnies pétrolières vendent leur part et effectuent des versements au Trésor sous formes de redevances et d'impôts sur leurs bénéfices nets. 1.8 La production a augmenté à peu près comme indiqué au Tableau 4. Selon les estimations, la raffinerie a traité 1,08 million de tonnes de brut en 1985 pour la production de produits raffinés destinés à la consommation intérieure.
1.9 Sans compter le gaz qui est extrait avec le pétrole et que l'on brûle actuellement, le Cameroun possède des réserves de gaz naturel estimées à 110 milliard de m3. La moitié environ de ces réserves est située au nord-ouest du pays et le reste dans la région de Kribi. Comme [PAGE 390] ces réserves ne sont pas suffisantes pour justifier les investissements nécessaires à la liquéfaction du gaz pour l'exportation, ce qui avait été envisagée pendant un temps, on prévoit maintenant de l'exploiter pour approvisionner le marché intérieur. Il serait également indiqué d'exploiter le gaz associé aux pétroles, qui est actuellement brûlé, pour en extraire des combustibles. 1.10 Le Cameroun possède également quelques gisements de différents minéraux. Les réserves de minerai de fer de la région de Kribi sont estimées à environs 300 millions de tonnes. Des études sont également en cours pour l'exploitation d'importants gisements de bauxite de bonne qualité à Minim Martap et à N'Gaoundal. On a confirmé dans le Sud-Est l'existence de gisements de cuivre, de nickel, de chrome, de platine, d'or, de diamants et d'uranium de tailles diverses. 2. L'agriculture 1.11 Le secteur agricole comprend les céréales traditionnelles de subsistance et d'autres cultures vivrières, les cultures d'exportation principalement le café et le cacao l'élevage, la pêche et la foresterie. Les cultures de subsistance représentent environ 40 % de la valeur de la production agricole; les cultures d'exportation, 30 %; l'élevage et la pêche, environ 20 %; la foresterie, 8 %; et les fruits, 2 %. 1.12 Ce secteur est dominé par les petites exploitations (90 % de la production). Les 10 % restants de la production proviennent de plantations industrielles qui sont, en général, propriété de l'État. Les deux cultures de rapport du pays, le cacao et le café, ainsi que les cultures alimentaires sont le fait des petits exploitants. Les principales cultures alimentaires sont le maïs, le mil, le sorgho, le riz; les plantains, les ignames, les taros (macabo) et le manioc. Le secteur moderne est engagé également dans certaines des cultures alimentaires, surtout le riz et le maïs, mais il couvre principalement les cultures de rapport, notamment les ananas, le thé, l'hévéa, la canne à sucre, l'huile de palme, le tabac, les bananes et, depuis peu, le soja. 1.13 En partie pour permettre la consolidation de projets entrepris les années précédentes, le Cinquième Plan a accordé la priorité en agriculture à la promotion de la production des petits exploitants et au renforcement du secteur privé moderne. Cette optique semblait justifiée parce que nombre de grandes entreprises publiques agro-industrielles souffraient d'une faible productivité et de pertes financières, tandis que le secteur privé subissait un déclin à cause de la migration de la force de travail vers les centres urbains. Le Plan prévoyait que la production agricole augmenterait de 5 % par an. La croissance devait être spécialement forte pour la production des céréales, des cultures maraîchères, de l'huile de palme et du sucre. Mais, en partie à cause de la grave sécheresse de 1982/83, la production n'a augmenté que d'environ 0,5 % par an entre 1982 et 1985. La sécheresse a causé une baisse de 20 à 30 % de la production vivrière et des diminutions importantes de la production de café. Depuis que les conditions climatiques se sont [PAGE 391] améliorées, la production est repartie et, en 1984/85, elle atteint des niveaux records (Tableau 9.1 et 9.2 de l'annexe). Le Cameroun a réussi à conserver son autosuffisance en cultures vivrières et, en 1985, il est même parvenu à exporter une part appréciable de cette production vers les pays voisins. 1.14 Le Cameroun est le cinquième producteur de cacao du monde. La production de cacao a connu une croissance lente pendant la période 1981-85, mais la surface plantée a augmenté de près de 30 %, ce qui est bon signe pour la production au cours du Sixième Plan. En 1984, après une baisse due à la sécheresse, la production de café robusta a atteint le niveau record de plus de 110 000 tonnes en 1984/85 mais les nouvelles plantations se sont ralenties. En raison de la concurrence des cultures vivrières, la production de café arabica a décliné depuis 1980 et l'avenir de cette culture ne semble pas brillant si l'on n'agit pas immédiatement sur les prix à la production et si l'on ne prend pas d'autres mesures d'encouragement. La production de céréales, surtout de riz et de maïs, a aussi progressé et les objectifs du Plan ont été largement atteints. 1.15 Au cours du Cinquième Plan, le Gouvernement a concentré ses efforts sur a) l'amélioration de la productivité, b) les réformes institutionnelles pour redéfinir le rôle des différentes institutions, c) l'éducation et la formation, d) les prix, e) le crédit, et f) les programmes de soutien. Ces efforts ne semblent avoir eu qu'un succès partiel. A l'exception du programme d'amélioration des semences, les autres programmes d'amélioration de la productivité (mécanisation, protection phytosanitaire, engrais) et les programmes visant à développer le crédit agricole n'ont pas dépassé le stade de l'étude. Il en va de même pour les réformes institutionnelles. Le besoin d'améliorer la coordination entre les institutions qui gèrent les programmes aux niveaux régional et national, les opérations des organismes de développement rural, la pertinence de la recherche et l'efficacité des programmes de vulgarisation et des coopératives est toujours aussi pressant. Les programmes de formation d'agents de vulgarisation et de jeunes agriculteurs, en revanche, fonctionnent bien. Les programmes de soutien dans le domaine de l'infrastructure rurale ont été exécutés avec un certain succès, en particulier en ce qui concerne l'approvisionnement en eau (hydraulique villageoise) dans la région Nord-Est. 1.16 C'est le marché qui détermine le prix de la plupart des cultures vivrières, et la commercialisation est aux mains du secteur privé. Cette formule s'est montrée particulièrement efficace. Par contre, les prix à la production des cultures d'exportation (café, cacao, caoutchouc et coton) sont fixés par l'État, de même que ceux des denrées de base (huile de palme et riz). A l'exception du coton, les prix à la production des cultures de rapport ont eu tendance à baisser en termes réels depuis 1980, malgré plusieurs ajustements. Entre 1979 et 1984, les prix du cacao au producteur représentaient en moyenne 44 % des prix c.a.f., sauf en 1981 où ils ont atteint 61 %. Les prix à la production du café [PAGE 392] arabica ont été en moyenne de 38 % des prix c.a.f., sauf en 1981 où ils ont été de 49 % de ces prix. Les prix à la production du café robusta ont représenté en moyenne 40 % des prix c.a.f., avec un maximum de 51 % en 1981 (Tableau 5). Les prix f.o.b. ont représenté en moyenne 93 % des prix c.a.f.; les taxes d'exportation et les coûts de commercialisation et de transport intérieur ont représenté environ 20 % des prix f.o.b. pour le café et le cacao entre 1979 et 1984. Le reste est constitué de droits prélevés par l'Office national de commercialisation des produits de base (ONCPB), office de stabilisation et de commercialisation. Ces prélèvements ont représenté en moyenne 33 % du prix f.o.b. du cacao et 37 % de celui du café entre 1979 et 1984. Les écarts entre la croissance des prix à la production et l'inflation ont été en partie compensés par le système de ristournes de l'ONCPB. Ces ristournes, cependant, ne parviennent pas toujours jusqu'à tous les producteurs et obscurent les signaux donnés par les prix. Comme dans les autres pays d'Afrique subsaharienne, le but de cette politique des prix est de créer des excédents financiers pour protéger les prix à la production en cas de chute des cours mondiaux et financer des programmes publics de développement dans l'agriculture. Une bonne partie des droits prélevés par l'ONCPB est utilisée, cependant, pour financer différents programmes de développement et d'investissement dans d'autres secteurs, ce qui correspond à une lourde taxation de la production agricole. Par contre, il existe un système de subventions aux intrants, en particulier aux engrais, qui compense en partie la faiblesse des prix à la production. Ce système, cependant, aboutit à des distorsions entre producteurs et entre cultures. 1.17 Les contraintes qui pèsent sur le développement des cultures d'exportation, en plus du contrôle des prix à la production, sont notamment l'insuffisance de l'infrastructure rurale et des pistes de desserte, les carences du système de commercialisation, le régime foncier et l'exode des jeunes ruraux vers la ville. 1.18 Le Cameroun a des ressources forestières importantes couvrant environ 20 millions d'hectares dont 8 millions sont actuellement exploités, principalement dans le Sud et le Centre et dans les régions du littoral. Les produits forestiers représentent environ 65 % du trafic d'exportation du port de Douala. Le manque de vigueur de la demande du marché de l'ameublement en Europe et aux États-Unis a entraîné une diminution des exportations de bois de près de 28 % entre 1981 et 1984. En 1985, cependant, les exportations de grumes et de bois d'#339;uvre ont progressé considérablement par suite de l'augmentation de la demande et aussi grâce aux mesures d'incitation prises par le Gouvernement. Les taxes à l'exportation et les taxes sur les transports intérieurs ont été éliminées et le nouveau Code des investissements (par. 1.24) accorde des avantages aux entreprises forestières qui sont aux mains de nationaux. 1.19 L'élevage a un bon potentiel, surtout dans la partie Nord du pays. Les statistiques existantes indiquent que pendant les trois années [PAGE 393]
1982 à 1984, le cheptel bovin est passé de 3,7 à 4 millions de têtes, le nombre d'ovins et de caprins de 3,4 à 4,8 millions de têtes, et la volaille, de 10,5 à 11 millions d'unités. La pêche comprend la pèche en mer industrielle et artisanale, la pêche en rivière et la pisciculture. La consommation actuelle de poisson est estimée à 130 000 tonnes, dont 14 000 tonnes seulement sont fournies par la pêche industrielle en mer, environ 35 000 tonnes par la pêche artisanale en mer et 50 000 tonnes par la pêche en rivière. Le reste est importé. L'équipement de pêche est en général démodé et la capacité de congélation insuffisante. Ce secteur souffre aussi de coûts d'exploitation élevés et du contrôle des prix. 3. L'industrie manufacturière 1.20 Le secteur manufacturier du Cameroun est relativement développé et varié; il est essentiellement orienté vers le marché intérieur, quoique les exportations, en particulier vers les pays de l'UDEAC, ne soient pas négligeables. La valeur ajoutée du secteur manufacturier, eau et électricité comprises, représente plus de 13 % du PIB. Ce secteur est dominé par un certain nombre d'entreprises étrangères ou publiques. La présence du secteur privé national est surtout sensible au niveau [PAGE 394] des petites et moyennes entreprises. Il existe environ 40 000 PME (employant moins de 10 personnes chacune) dans le secteur manufacturier, le bâtiment et les services, et un nombre indéterminé d'artisans. Les industries des produits alimentaires, de la boisson, du tabac et des textiles représentent environ la moitié de la valeur ajoutée du secteur manufacturier. 1.21 Les statistiques sur la production industrielle laissent à désirer et leur couverture est incomplète. Pour cette raison, l'estimation de 15 % par an de la croissance de la production pendant la période 1979-85 doit être considérée avec réserve. La très faible croissance des importations, particulièrement les importations de biens intermédiaires et de matières premières, dont l'élasticité par rapport à la valeur ajoutée de l'industrie manufacturière aurait été de 0,15 seulement pendant cette période, est une indication de la surestimation probable de la croissance de l'industrie manufacturière et, par conséquent, de celle du PIB et de la consommation. La croissance industrielle rapide de la période 1979-82 tient certainement aux gros investissements réalisés dans l'aluminium, les engrais, la pâte à papier, les industries agro-alimentaires, etc., pendant le Quatrième Plan (1976-81) et à une forte demande intérieure. Toutefois, à cause de la sécheresse de 1982/83, la demande s'est ralentie, en particulier en ce qui concerne le traitement des produits agricoles du pays. Depuis le milieu de 1984, la production a repris et les gains les plus importants ont été enregistrés dans les secteurs de production traditionnels : boissons, cigarettes, sucre, savon et matériaux de construction. La raffinerie de la SONARA et l'usine d'aluminium d'ALUCAM ont également augmenté leur production de façon marginale (Tableau 8.2 de l'annexe). On ne possède aucun renseignement sur l'utilisation des capacités dans ce secteur. 1.22 Le cadre d'incitations du secteur manufacturier favorise généralement les activités à forte intensité de capital et la production pour le marché intérieur. La production intérieure est protégée de la concurrence des importations par le biais de droits d'importation établis dans le cadre du tarif extérieur commun de l'UDEAC, diverses taxes supplémentaires, des licences d'importation et d'autres mesures non tarifaires, souvent ponctuelles, prévues par le Code des investissements. Les taux des droits et des taxes varient énormément, ce qui conduit à de grandes distorsions dans la structure de la protection effective. Alors que les industries de substitution aux importations sont extrêmement protégées à l'intérieur de l'UDEAC, les produits d'exportations sont taxés et ont subi l'augmentation du taux de change réel (par. 1.5). La plupart des prix industriels sont contrôlés par l'État et sont établis sur la base du prix de revient majoré d'une marge bénéficiaire qui est indépendante des facteurs de production utilisés dans l'entreprise ou de l'efficacité des opérations. En outre, la lenteur et la pesanteur de la machine bureaucratique qui établit les prix et surveille leur application font que les prix sont ajustés avec beaucoup de retard, ce qui compromet souvent la rentabilité des entreprises. Les autres éléments du [PAGE 395] cadre d'incitations sont le Code des investissements et le système des taux d'intérêt administrés et d'encadrement du crédit (par. 1.24 et Section E). 1.23 Le Gouvernement s'inquiète de plus en plus du secteur manufacturier qui est très largement à forte intensité de capital et dont la contribution aux exportations, à l'épargne et à la création d'emplois a été faible. Il s'inquiète également de ce que ce secteur soit concentré dans certaines régions et n'a pas réellement vu le développement de l'entreprise camerounaise. C'est pourquoi il a récemment modifié ses objectifs de développement industriel : il ne favorise plus les grandes industries de substitution aux importations mais le développement de petites et moyennes entreprises et la transformation des matières premières locales pour l'exportation. 1.24 Le premier pas dans cette direction a été la refonte du Code des investissements qui accordait des avantages fiscaux pour la production de biens d'équipement et des remboursements de droits de douane sur les biens intermédiaires importés à des degrés divers selon les périodes et les catégories d'entreprises, favorisant en fait les industries à forte intensité de capital et la transformation de biens intermédiaires importés. Le nouveau Code, publié au milieu de 1984, accorde des avantages fiscaux plus généreux aux PME et modère les dispositions de l'ancien Code qui favorisaient les grandes entreprises à forte intensité de capital, en offrant à présent un accès plus automatique à ces avantages. Le Fonds d'aide et de garantie aux petites et moyennes entreprises, le FOGAPE, a été restructuré en 1984; son rôle a été élargi et ses ressources financières augmentées. Ce fonds est désormais censé fournir une assistance technique, un soutien de gestion et des garanties de crédit aux entreprises remplissant les conditions requises, mais il ne fonctionne pas encore efficacement. 1.25 Les gros investissements publics et privés dans le secteur manufacturier ont été rares entre 1982 et 1984 : on s'est en effet contenté d'achever les projets commencés pendant le Quatrième Plan, mais le climat de l'investissement semble s'être amélioré en 1985, en particulier pour les projets industriels financés par l'État et les projets de petite et moyenne entreprise du secteur privé. Ces dernières années, des investisseurs étrangers ont proposé différents projets intéressant les industries chimiques, pharmaceutiques et métallurgiques et l'industrie du caoutchouc, mais ces projets ne se sont pas matérialisés et l'investissement étranger effectif, en dehors du secteur pétrolier, est resté insignifiant. Le secteur traditionnel a fait preuve d'une grande vitalité : plus de 3 000 entreprises sont créées chaque année dans ce secteur. Une étude récente a montré que les principales difficultés que rencontrent les entrepreneurs pour la création et l'exploitation d'une petite entreprise étaient le manque de locaux, l'impossibilité de trouver un financement ou d'obtenir un crédit et les incertitudes du marché. Rares sont les entreprises qui réussissent à survivre plus de deux ou trois ans. 1.26 En dépit de la reprise des activités manufacturières en 1984-85, [PAGE 396] de nombreuses entreprises parapubliques ont encore des difficultés financières et d'exploitation et ne peuvent continuer à fonctionner qu'avec les subventions que leur accorde l'État sous différentes formes (Section E (iii)). A travers la Société nationale d'investissement (SNI), qui fait fonction de holding, l'État détient le capital, ou des participations au capital, de 60 entreprises régies par le droit des sociétés privées dans tous les secteurs de l'économie. Il détient plus de 25 % du capital de 40 de ces entreprises. Dans l'industrie manufacturière, les entreprises publiques et les sociétés d'économie mixte fournissent environ 40 % de la valeur ajoutée totale. Le Gouvernement s'inquiète de plus en plus de la charge croissante que font peser ces entreprises sur le budget et de leur contribution limitée à la croissance économique. Les causes des résultats décevants de ces entreprises ont été clairement identifiées : l'ampleur démesurée de l'investissement initial par rapport au marché, le manque de rentabilité des projets, un personnel pléthorique, une structure administrative trop lourde, l'absence de systèmes d'incitations pour la direction, l'absence d'objectifs clairement définis et de critères de performance concomitants pour l'entreprise, de même que l'absence de planification stratégique et les insuffisances des services de comptabilité et de vérification des comptes. Ces entreprises souffrent également des maux habituels aux entreprises publiques : poursuite d'objectifs sociaux sans compensation financière bien définie, politisation de la direction et ingérence des ministères de tutelle dans leur gestion, manque de souplesse pour répondre à l'évolution du marché et structure financière inadéquate (faible capital et emprunts excessifs). Le Gouvernement a établi récemment une commission spéciale qui doit proposer des réformes institutionnelles du cadre de fonctionnement des sociétés d'économie mixte et les entreprises publiques, entreprendre la réhabilitation ou la restructuration de certaines entreprises et préparer un programme de privatisation sur cinq ans d'entreprises viables du secteur concurrentiel. Devant le manque de ressources à investir et le peu d'expérience industrielle du secteur privé, l'État estime qu'il lui faut encore financer les investissements dans les secteurs de production, mais il a l'intention, dans la mesure du possible, de transférer ces investissements au secteur privé après un certain laps de temps. Seules les activités stratégiques, telles que les services publics, le secteur des hydrocarbures et certaines industries de base resteraient sous le contrôle de l'État. 4. Les autres secteurs 1.27 Le secteur du bâtiment et des travaux publics a connu une très forte croissance en 1979-81 (25 % par an) par suite de la montée en flèche de l'investissement pendant le Quatrième Plan. La croissance de ce secteur s'est ralentie à 7-8 % en 1982-85, reflétant les contraintes qui pèsent sur les entreprises de construction nationales et les retards d'exécution du vaste programme d'investissements dans l'infrastructure économique et sociale inscrit au Cinquième Plan. De nombreuses entreprises de construction sont également, depuis quelques années, en butte [PAGE 397] à des difficultés financières dues à l'accumulation des arriérés de paiement de l'État. L'activité des secteurs du commerce, des transports et des communications a été probablement plus intense que ne l'indiquent les taux modestes de croissance des comptes nationaux; toutefois, ces secteurs ont peut-être subi le contrecoup de la quasi-stagnation des exportations agricoles pendant la période examinée. En ce qui concerne les transports, il faut souligner l'accroissement rapide du trafic ferroviaire (Tableau 10.1 de l'annexe) qui reflète les efforts d'investissement accomplis pour la rénovation de l'infrastructure et l'achat de matériel roulant. Les transports routiers, qui comptent pour environ 92 % des passagers/km et 76 % des tonnes/km, constituent cependant le principal mode de transport intérieur. Le trafic passager par rail a diminué sensiblement en 1986 après l'ouverture de la route goudronnée Douala-Yaoundé. 1.28 L'apparition de la production pétrolière et les autres phénomènes économiques qui se sont produits depuis sept ans, en particulier la croissance rapide du secteur manufacturier et du bâtiment, ont provoqué des changements importants dans la structure du PIB (Tableau 6). Les plus remarquables sont la croissance de la part du pétrole (qui est passée de moins de 1 % en 1978 à plus de 17 % du total en 1985), l'augmentation de la part du secteur manufacturier (de 9 à 12 %) et la diminution de celle de l'agriculture (de 31 à 21 %). L'industrie, y compris le pétrole, les industries extractives, le secteur manufacturier, la construction, l'électricité, l'eau et le gaz, ainsi que le secteur des services procurant ensemble quelque 40 % du PIB (à l'exclusion des droits de douane), la structure de l'économie camerounaise a acquis en 1985 les caractéristiques d'une économie à revenu intermédiaire. Même si l'on fait abstraction du pétrole, on constate que la part de l'agriculture a décliné (de 32 % du total en 1978 à 25,5 % en 1985), alors que la part de l'industrie, sans compter le pétrole, est passée de 14 % en 1978 à plus de 23 % en 1985. C. L'utilisation des ressources et l'épargne 1.29 La structure de la demande finale a changé considérablement entre 1978 et 1985. L'expansion rapide des recettes pétrolières depuis 1979 a eu apparemment un effet modéré sur la consommation privée, contrairement à ce qui a été observé dans de nombreux pays en développement exportateurs de pétrole. Alors que la consommation privée a progressé à un rythme d'environ 3,3 % par an en termes réels entre 1971 et 1978, on estime sa croissance depuis 1979 à 6,2 % par an (Tableau 7). On a cependant observé un brusque accroissement de cette consommation pendant le boom pétrolier de 1979-81, qui a été suivie par une quasi-stabilisation entre 1982 et 1985. Il faut néanmoins considérer ces fluctuations avec prudence car cette consommation est calculée comme élément résiduel des comptes nationaux et il est possible que la croissance en volume des importations ait été sous-estimée [PAGE 398]
(basée sur les comptes nationaux en prix courants)
(par. 1.65). En revanche, la consommation publique a progressé à un rythme estimé à 8 % par an depuis 1979 en termes réels, par suite de la croissance inquiétante du nombre des fonctionnaires (10 % par an). Globalement, la part de la consommation totale dans le PIB est tombée à 65 % par an en 1985, après avoir atteint 83 % en 1978, tandis que les parts respectives de l'investissement fixe et des exportations ont augmenté de façon importante. 1.30 Grâce au pétrole, les exportations de biens et de services non facteurs ont été l'élément le plus dynamique de la demande entre 1978 et 1985. Comme la croissance des importations enregistrées en termes réels a été modérée à cause des progrès de la substitution aux importations et de la quasi-élimination des importations de produits pétroliers, la balance des ressources s'est améliorée de façon spectaculaire en faveur du Cameroun pendant la période étudiée. Comme le volume [PAGE 399] des importations a probablement été sous-estimé, le volume réel de l'excédent des ressources de ces dernières années a peut-être été un peu moins favorable que ne le montrent les comptes nationaux et la balance des paiements. L'effet des fluctuations des termes de l'échange sur les ressources disponibles et sur la capacité à importer a été légèrement négatif pendant la période à l'étude. Les termes de l'échange en FCFA ont eu tendance à se détériorer jusqu'en 1983, puis à s'améliorer quelque peu par la suite, en raison de la hausse des prix du café et du cacao en 1984.
(basés sur les comptes nationaux en prix constants de 1980) 1.31 Sous l'effet combiné de l'augmentation en volume des exportations de pétrole et de la hausse du dollar, l'épargne nationale brute a progressé rapidement après 1982. En 1985, elle représentait environ 34 % du PIB et était supérieure de 32 % à l'investissement (Tableau 8). Là encore, cependant, la sous-estimation probable des importations risque d'avoir causé une surestimation de l'épargne.
(basée sur les comptes nationaux aux prix courants) 1.32 La plus grande part de l'épargne provient des secteurs des ménages et des entreprises, bien que la part de ces secteurs ait décliné entre 1979 et 1981 en raison de la progression rapide de l'épargne publique. On ne dispose pas de données sur la structure et l'origine de l'épargne privée. En ce qui concerne cette dernière, cependant, rien n'indique que la structure des taux d'intérêt, relativement peu élevés, et même bien souvent négatifs en termes réels ces 10 dernières années, ait causé une diminution de l'épargne réelle des particuliers. Son niveau relativement élevé semble être fonction davantage du niveau du PIB par habitant et de sa répartition. Quoi qu'il en soit, la structure des taux d'intérêt et leurs niveaux ainsi que la structure institutionnelle du système financier ont eu tendance à empêcher la transformation de l'épargne réelle des particuliers en une forme qui puisse être facilement canalisée par les institutions financières des épargnants vers les investisseurs potentiels, et à décourager l'intermédiation financière en général[3]. [PAGE 401]
1.33 L'épargne publique, définie comme la différence entre les recettes totales[4] et les dépenses courantes, a atteint environ 13 % du PIB en 1982, année où les recettes pétrolières ont commencé à atteindre un niveau appréciable, mais elle est retombée à environ 8 % en 1985, sous l'effet de la hausse rapide des dépenses courantes. Malgré un quadruplement des dépenses d'équipement entre 1980 et 1985, le budget de l'État est resté excédentaire. En plus de l'épargne de l'État, les institutions publiques comme l'ONCPB et la Caisse nationale d'épargne dégagent des ressources substantielles, qui sont cependant gérées séparément et utilisées en partie pour financer des programmes de développement et des projets publics. D. La population, l'emploi et les salaires 1.34 Les données sur la population et l'emploi sont incomplètes et varient considérablement selon les sources. En juin 1984, la population totale était estimée à 9 468 500, dont 51 % avaient entre 15 et 59 ans. Les enfants en bas-âge et d'âge scolaire (0 à 14 ans) représentaient 43 % du total et les personnes âgées de plus de 60 ans, 6 % (Tableau 1.1 de l'annexe). Le taux de croissance de la population pendant les années 70 a été d'environ 2,3 %. Il s'est toutefois accéléré depuis lors et devrait être de 3.2 % jusqu'à la fin du siècle. En l'an 2000, la population devrait dépasser 15 millions, contre 10 millions aujourd'hui. 1.35 Le rythme de croissance de la population urbaine a suivi celui de la croissance de l'économie et des secteurs de l'industrie, de la construction et des services dont les activités sont essentiellement situées en milieu urbain. Le Cameroun bénéficie d'un réseau urbain bien développé et diversifié dont les centres principaux sont maintenant reliés par des grands axes routiers. La hiérarchie urbaine comprend deux grandes villes de plus de 500 000 habitants chacune, quatre centres régionaux (100-150 000 résidents), dix villes de 30 à 100 000 résidents, et 24 de 10 à 30 000 résidents. En 1976, 28 % de la population du pays habitait ces villes et d'autres centres moins importants de plus de 5 000 habitants. Ils constituaient la population dite « urbaine ». Cette population a augmenté à un taux moyen de 5,3 % par an; le rythme de croissance a été de 6 % pour Douala, 7,5 % pour Yaoundé et jusqu'à 9 % pour Garoua. 1.36 Depuis 1976, 65 % de l'augmentation nette de la population du pays a concerné les centres urbains, contre 35 % le milieu rural, soit l'inverse de la répartition observée dans la décennie précédente. A l'heure actuelle (1986), la population urbaine est d'environ 3,6 millions. Le Gouvernement a investi des sommes importantes dans l'extension des équipements sociaux et dans l'adduction d'eau de beaucoup de centres [PAGE 402] urbains; par contre, la construction des réseaux urbains a été très limitée et leur entretien négligé. A la suite de ce choix d'investissement, et en raison de la rigidité des systèmes de crédit liés à la propriété foncière, environ deux-tiers des habitants des plus grands centres sont logés de façon précaire dans des quartiers où l'accessibilité et les conditions sanitaires sont médiocres : tant dans le centre-ville qu'à la périphérie urbaine. 1.37 Au rythme actuel de la croissance urbaine qui s'est établie à environ 5 %, la moitié de la population du Cameroun vivrait en l'an 2000 en milieu urbain. Comme durant la décennie 1976-86, environ deux-tiers de la croissance démographique nette serait intégrée par le milieu urbain, soit 3,5 millions sur les plus de 5 millions projetés. Il convient donc de reconnaître l'urgence d'améliorer la capacité de fonctionnement des services publics essentiels tels que le cadastre et les services techniques et financiers des municipalités afin de permettre une croissance rationnelle. Compte tenu du grand nombre des centres et de leur diversité en termes de fonctions économiques, il convient également de fixer les priorités d'investissement en matière d'infrastructures urbaines en tenant compte de la contribution à l'économie nationale des secteurs productifs qui y trouvent la source de leurs activités. 1.38 Entre 1980 et 1984, les secteurs privé et parapublic ont créé environ 20 000 emplois par an et le secteur public 8 000. Le secteur traditionnel aurait créé environ 20 000 emplois par an (Tableau 9). Il n'existe pas d'estimations officielles de la population active, du chômage et du sous-emploi.
[PAGE 403] 1.39 La structure des salaires du secteur privé est généralement déterminée par des conventions collectives entre les employeurs, les syndicats et le Gouvernement. Ces conventions fixent les salaires garantis pour chaque niveau de qualification et pour les différentes catégories à chaque niveau. Le pays est divisé en trois zones : la première comprend les villes de Douala, Yaoundé, Edéa et Buéa; la deuxième, des centres urbains plus petits comme Bafia, Bafoussam, Bertoua, Garoua, Ebolowa, etc.; et la troisième comprend toutes les villes en fonction du coût de la vie mais les différences entre ces zones ont eu tendance à disparaître sous l'effet de l'amélioration des communications et de la décentralisation de l'activité économique. Le Gouvernement s'efforce donc d'éliminer progressivement ces zones. Les salaires minimums du secteur public sont fixés par décret lorsque de nouvelles conventions collectives sont signées pour le secteur privé. Les traitements du secteur public sont légèrement inférieurs à ceux du secteur privé dans les centres urbains.
1.40 Si l'on en juge par les renseignements limités dont on dispose, il semble que les salaires réels aient augmenté entre 1978 et 1985 (Tableau 10), en particulier dans la Zone III, en conséquence des mesures prises par le Gouvernement pour freiner l'exode rural et réduire les différences de revenus entre les régions urbaines et rurales. On ne connaît pas avec précision les salaires qui sont effectivement versés, mais [PAGE 404] tout laisse à penser que, dans certains cas, ils sont bien supérieurs au minimum stipulé et que souvent s'y ajoutent des avantages (logement et transport). E. La situation financière intérieure i) L'évolution des recettes de l'État 1.41 Pour comprendre la situation des recettes de l'État et leur évolution, il est indispensable de distinguer les recettes pétrolières des recettes non pétrolières. Comme les revenus pétroliers n'ont commencé à affluer en quantité significative qu'en 1980, nous choisirons 1979 comme l'année qui sépare l'ère du pétrole de l'ère de l'avant-pétrole aux fins de l'analyse. Les recettes pétrolières se composent en gros de deux éléments : i) les recettes provenant du partage de la production, et ii) les redevances et les impôts sur le bénéfice que les compagnies pétrolières versent à l'État. 1.42 La Société nationale des hydrocarbures (SNH), société nationale de holding, reçoit maintenant environ 70 % de la production totale (par. 2.7)[5]. Les recettes que lui procure l'exportation sont en général déposées dans des banques étrangères avant d'être rapatriées. Elles sont alors transférées aux comptes hors budget (CHB). Les avoirs détenus sur ces comptes étrangers sont généralement gardés secrets, et les montants transférés au budget ne sont pas communiqués, même aux ministères qui les dépensent, avant le milieu de l'exercice budgétaire. Ces cinq dernières années, les montants transférés aux comptes hors budget, qui comprennent également des recettes provenant d'autres sources, ont représenté en moyenne un quart des recettes totales de l'Etat. Les chiffres exacts de ces transferts sont disponibles mais il faut toutefois estimer les recettes totales des accords de partage de production à partir de nombreuses autres sources d'informations. Le Tableau 11 présente un résumé des estimations utilisées pour évaluer les recettes que l'État tire de ces sources. 1.43 Les impôts sur le bénéfice et les redevances que les compagnies pétrolières versent à l'État sont « budgétisés » directement et, contrairement aux ressources des CHB, incorporés dès le début dans la loi de finances. Depuis 1983, ces recettes ont représenté environ un quart des recettes budgétaires (c'est-à-dire sans compter les transferts aux CHB). En fait, les redevances sont calculées de manière à ce que les recettes pétrolières de l'État soient toujours égales à 87 % du total des recettes pétrolières nettes. 1.44 Les recettes budgétaires totales, qui représentaient en moyenne 16 % du PIB en 1971 sont passées à plus de 20 % du PIB en 1979, [PAGE 405] représentant une élasticité des recettes typique des pays en développement de la tranche inférieure des pays à revenu intermédiaire[6]. Les recettes pétrolières, insignifiantes en 1979, on atteint un niveau substantiel en 1981. Les recettes totales ont atteint 24 % du PIB en 1985[7]; sur ce total, 10,9 % provenaient du secteur pétrolier. Les recettes non pétrolières sont tombées de 20 % du PIB non pétrolier en 1979 à 16 % en 1985, c'est-à-dire plus ou moins au niveau des recettes totales pour 1971. Dans l'ensemble, les recettes budgétaires ont triplé et les recettes totales ont quadruplé entre 1979 et 1985. 1.45 Plusieurs aspects de la structure du système fiscal camerounais valent d'être soulignés. En 1982 (année choisie pour l'existence de données comparatives), les impôts sur le revenu, les bénéfices et les plus-values (pétrole non compris) ont représenté 18 % des recettes courantes, contre 38,4 % en moyenne pour l'échantillon du Rapport sur le développement dans le monde (1984); par comparaison, les droits et taxes douanières ont représenté 26 % des recettes courantes, contre une moyenne de 17,5 % pour l'échantillon. De plus, bien que les impôts soient élevés pour les cultures d'exportation (par. 2.16), ces recettes vont directement à l'ONCPB qui les utilise pour certains programmes de soutien à l'agriculture et pour des investissements qui ne figurent pas au budget. On a permis à l'ONCPB d'accumuler, directement ou indirectement par le biais du Trésor, des liquidités considérables qui se sont déversées dans le système bancaire et, de là, sur des comptes à l'étranger. ii) L'évolution des dépenses de l'État 1.46 Avant même que commence l'exploitation du pétrole, le budget de fonctionnement du Cameroun était excédentaire. Entre 1971 et 1979, les déficits globaux ont été relativement faibles et n'ont dépassé 2 % du PIB qu'en 1975 et en 1976. Le budget d'équipement était en effet très modeste (1,5 % du PIB en 1971); mais, dès 1979, il est passé à 4,7 % du PIB, c'est-à-dire qu'il est monté de 10 à 30 % du budget total. Et pourtant, cette croissance en volume du budget d'équipement a pu se produire sans qu'il soit nécessaire d'emprunter beaucoup à l'étranger, de sorte que le ratio du service de la dette n'était que de 9,1 % en 1979. Le budget de fonctionnement a augmenté d'environ 9 % par an en termes réels entre 1971 et 1979. Cependant, la croissance du budget d'équipement ayant été plus forte, son importance relative dans le budget global est tombée de 90 à 70 % pendant cette même période. Pour résumer les résultats de la période de l'avant-pétrole, on peut dire que le budget global a progressé un peu plus rapidement que le PIB malgré a) des prélèvements fiscaux relativement faibles (sauf les taxes sur les cultures d'exportation prélevées par l'ONCPB, pour [PAGE 406]
[PAGE 409] lesquelles on ne dispose pas de données statistiques); b) un taux de croissance réelle d'environ 3 %; et c) un faible endettement extérieur. 1.47 Entre 1979 et 1981, les recettes pétrolières totales de l'État sont passées d'un montant négligeable à 148,8 milliards de FCFA, soit à 83 % du PIB. Pendant la même période, les dépenses courantes ont progressé de 60 % et les dépenses d'équipement de 310 %. En fait, les dépenses d'équipement ont triplé en un an, passant de 73,2 milliards de FCFA en 1980 à 226,2 milliards en 1981. Parallèlement, les dépenses de fonctionnement ont augmenté de près de 15 % par an en termes réels entre 1981 et 1985, soit de six points de pourcentage de plus qu'avant le pétrole. Les traitements et salaires et les matériels et fournitures ont progressé d'un peu plus de 11 % par an, alors que les subventions et autres transferts courants ont augmenté de près de 25 % par an en termes réels. Pendant la même période 1982-85, les dépenses publiques d'équipement ont cessé d'augmenter et, en 1985, elles étaient inférieures de 12 % en termes réels à leur niveau record de 1981. 1.48 On ne possède guère de données précises sur les investissements publics financés sur les comptes hors budget. Le Tableau 14, qui est établi à partir de données sur les dépenses budgétaires pour 1983-84, indique que près d'un quart des dépenses d'équipement ont porté sur les services publics généraux, bien souvent des équipements administratifs; un deuxième quart, sur la défense et les services sociaux et les 50 % restants sur les services économiques. Dans cette dernière catégorie, les routes absorbent près d'un quart du total et il ne reste que 8.5 % pour l'agriculture, la foresterie et la pêche. Certains investissements agricoles, cependant, sont financés sur les comptes hors budget ainsi que sur les ressources de l'ONCPB. Les comptes de l'ONCPB ne permettent pas d'évaluer ces sommes avec précision, mais si celles-ci étaient consolidées avec le budget central, les crédits alloués à l'agriculture augmenteraient de deux ou trois points. 1.49 L'épargne publique, définie comme les recettes totales, y compris toutes les recettes pétrolières, rapatriées ou non, moins les dépenses de fonctionnement[8] est positive depuis au moins 1971. En 1979, elle avait atteint 7,9 % du PIB, alors qu'elle n'était que de 2,4 % en 1971; pendant les années de prospérité pétrolière (1981-85), elle s'est élevée en moyenne à 13,3 % du PIB. En fait, pendant toute cette période, elle a été plus que suffisante pour financer la totalité des investissements publics et elle a permis non seulement d'accumuler à l'étranger des montants substantiels mais aussi de rembourser par anticipation la dette extérieure. En outre, la bonne tenue de l'épargne publique a permis au Gouvernement de maintenir un solde nettement positif auprès du secteur bancaire (Tableau 16 : Créances sur l'État). [PAGE 410]
1.50 L'utilisation discrète des ressources pétrolières pour financer des investissements supplémentaires et diverses dépenses par les comptes hors budget est due au fait que les autorités ont considéré, à juste titre, ces ressources comme temporaires. Cela a permis d'éviter que la population n'attende trop de ces ressources, et c'est probablement ce qui explique la gestion prudente des ressources pétrolières et de l'emprunt extérieur. Il est difficile, cependant, aux Ministères des Finances et du Plan et aux Ministères Techniques d'accomplir leur travail de planification et d'exercer leurs fonctions budgétaires s'ils ne savent pas suffisamment à l'avance de quel volume de ressources ils disposeront, tout comme il est difficile aux responsables de la planification de faire leur travail s'ils n'ont pas accès aux prévisions de la production et des exportations de pétrole, ni les moyens d'analyser les répercussions de ces variables sur l'économie. iii) Le fardeau des entreprises publiques 1.51 La constante inefficacité du secteur des entreprises publiques altère les bons résultats de l'économie camerounaise. La valeur ajoutée du portefeuille total de la SNI (par. 1.26) représente environ 5 % du PIB; les entreprises qui ne sont pas comprises dans le portefeuille de la SNI, comme la REGIFERCAM, la compagnie nationale des chemins de fer, représentent environ 2 % du PIB. Le total des investissements de ces sociétés figurant dans le portefeuille de la SNI s'est élevé [PAGE 411] à 50,7 milliards de FCFA en 1984, ce qui représentait 6,2 % de la formation brute de capital fixe du pays ou 1,6 % du PIB)[9]. 1.52 Rares sont les investissements importants des entreprises publiques qui ont été financés avec les bénéfices non distribués : en effet, les déficits nets d'exploitation se sont élevés en 1984 à 39,9 milliards de FCFA; en termes bruts, cela correspond à des pertes de 76,3 milliards de FCFA et à des bénéfices de 36,4 milliards de FCFA. Si ces résultats semblent représenter une certaine amélioration par rapport à l'année précédente (60 milliards de FCFA de pertes), ils font oublier le fait important qu'ils incluent les subventions de l'État. Comme elles se sont élevées à environ 90 milliards de FCFA (254 millions de dollars) en 1983, en réalité, le déficit d'exploitation global aurait été de l'ordre de 150 à 160 milliards de FCFA (425 millions de dollars) en 1983[10]. On ne dispose pas de chiffres pour les années suivantes, mais il semble que les subventions globales aient atteint 150 milliards de FCFA (366 millions de dollars) en 1984; ce qui représente environ 50 % des dépenses publiques totales de l'État pour cette année-là et 18 % des dépenses publiques totales. Pour l'année précédente, où l'on est plus sûr des chiffres. Les 90 milliards de subventions ont représenté un tiers des recettes pétrolières totales et 15 % des dépenses globales de l'État. Ces mauvais résultats sont imputables en grande partie à la CELLUCAM, la CAMSUCO et l'ALUCAM. 1.53 Le terme « subventions » désigne toute une gamme de transactions financières, dont certaines constituent des créances futures sur les entreprises en question et d'autres des transferts purs et simples. Ainsi, sur les 90 milliards de FCFA transférés par l'État à ce secteur en 1983, 36 milliards étaient des prêts supplémentaires, pour la plupart à des entreprises en difficulté, en particulier à la CELLUCAM. 8 Milliards de FCFA ont été utilisés pour le rachat de prêts à des tierces parties, spécialement pour la CAMSUCO; 9,5 milliards de FCFA ont été déboursés pour le service de la dette garantie par l'État, dont plus de 50 % pour la CELLUCAM, et près de 20 milliards ont été versés directement sous forme de subventions. Enfin, 15 milliards de FCFA ont été consacrés à des prises de participation dans des entreprises, notamment la SONEL, la compagnie nationale d'électricité. 1.54 Indépendamment des coûts financiers que représente pour l'État le soutien de ce secteur, l'économie tout entière est touchée car les ressources financières et humaines investies qui ont tendance à être gaspillées dans un système qui n'offre que peu d'incitations aux bons résultats et ne sanctionne pas les mauvais, qui ne différencie par les objectifs privés des objectifs sociaux et qui, souvent, ne tient pas compte [PAGE 412]
(Portefeuille de la Société nationale d'investissement) (millions de francs CFA) [PAGE 413] des signaux du marché (par. 1.26). Le maintien d'une main-d'œuvre pléthorique, en particulier à la CELLUCAM (la CELLUCAM a été formée récemment, voir chapitre 11) et à la CAMSUCO qui est symptomatique de ce problème a été en grande partie responsable des difficultés de ce secteur. iv) La monnaie et le crédit 1.55 La situation de la monnaie et du crédit au Cameroun a été jusqu'ici relativement saine. Entre 1980 et 1985, les prêts au secteur privé ainsi qu'aux entreprises publiques et aux sociétés d'économie mixte ont augmenté de 16 %, ce qui a suscité, conjointement à une augmentation substantielle des avoirs extérieurs nets, un taux de croissance de la masse monétaire de 22,3 % par an, plus ou moins égal au taux de croissance nominal du PIB (21,3 % par an) (Tableau 16).
1.56 A l'exception des banques commerciales, dont la liquidité est essentiellement fonction des dépôts de l'État, la situation du secteur financier camerounais est, en apparence, très saine. Le Cameroun n'a pas souffert des faiblesses souvent observées dans les autres pays africains de la zone franc où les crises de liquidité sont fréquentes. En [PAGE 414] effet, l'Etat est prêteur net envers le système monétaire camerounais. De plus, les organisations paraétatiques, comme la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS) et l'Office National de Commercialisation des Produits de Base (ONCPB) ont eux-mêmes des excédents considérables et ajoutent sensiblement à la liquidité du secteur financier. Mais avec le déclin prévu des recettes pétrolières de l'Etat, à moins que des mesures préventives ne soient prises, la santé actuelle du système risque de se détériorer sérieusement. 1.57 Le secteur des banques commerciales est actuellement en situation de quasi-insolvabilité pour avoir accordé, depuis 1980, un certain nombre de prêts mal avisés. Selon une étude récente de la Banque centrale, les 10 banques du système ont au moins 120 milliards de FCFA d'actifs non productifs (créances douteuses) (soit presqu'un quart du total des actifs du système bancaire)[11], alors que leurs réserves pour créances douteuses sont inférieures à 20 milliards de FCFA et que leur capitalisation totale est de 30 milliards de FCFA. Près de 60 milliards de FCFA ont été prêtés à des commerçants du Nord-Cameroun et ne seront probablement jamais recouvrés. Environ 40 milliards de FCFA ont été prêtés à des entreprises publiques et la situation de ces prêts au secteur parapublic est préoccupante. Et pourtant, rien ne permet d'affirmer que ces prêts, qui ne sont pas garantis par l'État, ont eu un effet d'éviction sur le secteur privé. Cette situation difficile des banques a peut-être eu, néanmoins, des effets semblables à une éviction, en particulier pour les prêts à risque aux petites et moyennes entreprises. 1.58 Le Gouvernement s'efforce de remédier à cette situation en maintenant des dépôts substantiels, de l'ordre de 125 à 150 milliards de FCFA, dans les banques commerciales. Ces fonds jouent un rôle important dans la reconstitution des liquidités des banques commerciales, à tel point que celles-ci en transfèrent une grande partie sur leurs comptes à l'étranger au lieu des les investir dans le pays. C'est ainsi qu'à la fin de 1985, leurs avoirs à l'étranger s'élevaient à 163 milliards de FCFA. Il faut dire que la structure des taux d'intérêt internationaux les y encourage puisque les taux pratiqués à Paris sont en général plus élevés que ceux du Cameroun. De plus, les banques camerounaises ne veulent plus prendre de risques étant donné l'affaiblissement de leur situation de capital. 1.59 Si l'on ne prend pas de mesures pour redonner aux banques commerciales une base plus saine, il se produira une crise de liquidité lorsque la baisse des recettes pétrolières de l'État obligera celui-ci à retirer progressivement ses dépôts des banques commerciales. Initialement, cela stimulera le rapatriement des capitaux si la structure des taux d'intérêt est favorable. De plus, la nature des dépôts de l'État changera : ils ne joueront plus comme aujourd'hui un rôle de quasi-capital mais feront plutôt fonction de dépôts à vue et feront hésiter les banquiers [PAGE 415] encore davantage à prendre le risque de prêter aux petites et moyennes entreprises. 1.60 Les taux d'intérêt camerounais, qui sont établis selon les normes de la BEAC, sont relativement faibles comparés aux taux internationaux. Plutôt que de stimuler les investissements au Cameroun, surtout dans les petites et moyennes entreprises, leur structure a entraîné des transferts de capitaux vers des comptes à l'étranger. En général, la faiblesse relative des taux d'intérêt, conjuguée aux autres éléments institutionnels et fiscaux qui ont été analysés dans l'étude récente de la Banque sur le secteur financier du Cameroun, va à l'encontre du développement de l'intermédiation financière dans l'économie. F. La situation financière extérieure i) Introduction 1.61 Le facteur qui a le plus affecté la position des paiements extérieurs du Cameroun depuis 1978 a été l'expansion rapide des exportations de pétrole qui sont passées en prix courants d'un montant estimés à 2,7 milliards de FCFA (11,5 millions de dollars) en 1978 à 721 milliards de FCFA (1 531 millions de dollars) en 1985. Ces exportations ont représenté en 1985 des gains nets en devises de 315 milliards de FCFA (670 millions de dollars) pour la balance des paiements, déduction faite des coûts de production en devises et du bénéfice net des compagnies pétrolières. Le pétrole est responsable pour une grande partie de l'amélioration spectaculaire de la balance commerciale qui, d'une position déficitaire en 1979 (90 milliards de FCFA, soit 197 millions de dollars), est aujourd'hui excédentaire (474 milliards de FCFA, soit 1 milliard de dollars en 1985). La balance courante s'est aussi améliorée mais de façon moins spectaculaire que la balance commerciale en raison de la progression rapide des paiements de services facteurs du secteur pétrolier. La croissance réelle des exportations de marchandises est surtout attribuable au pétrole car les exportations non pétrolières n'ont progressé que relativement peu pendant cette période. 1.62 Les carences des statistiques officielles rendent difficile l'analyse des résultats de la balance des paiements. Il faut en effet compter avec le fait que les recettes d'exportations de pétrole ne sont pas toutes comptabilisées, pas plus que les avoirs correspondants de l'État à l'étranger, ni les transferts des bénéfices des compagnies pétrolières étrangères, ni le service des emprunts liés au pétrole; de même, les importations ne sont pas toutes enregistrées, notamment en ce qui concerne les biens intermédiaires et les biens d'équipement. Les principales sources d'information sur la balance des paiements sont les écritures sur les transactions en devises du système bancaire camerounais et quelques renseignements supplémentaires obtenus au moyen de questionnaires envoyés aux grandes entreprises. 1.63 Les recettes pétrolières de l'État sont déposées dans des banques [PAGE 416] étrangères qui ne font pas partie du Compte d'opérations de l'Union monétaire auprès du Trésor français; ces recettes ne sont donc pas comptabilisées dans les réserves officielles. Ces fonds sont rapatriés (par. 1.42) suivant les besoins pour financer les dépenses de Est et maintenir un niveau de réserves officielles adéquat à la banque centrale (BEAC). Deuxièmement, comme la vente du pétrole se fait directement à l'étranger et en devises, les bénéfices des compagnies pétrolières étrangères ne sont pas enregistrés dans les statistiques officielles de la balance des paiements et l'on ne sait pas dans quelle mesure il est tenu compte des dépenses d'exploitation en devises. Pour les mêmes raisons, le service de la dette contractée par les compagnies pétrolières pour financer la prospection et l'exploitation du pétrole n'est pas entièrement comptabilisé. D'autre part, lorsque l'État rapatrie les fonds qu'il détient à l'étranger, ceux-ci sont normalement comptabilisés dans la balance officielle des paiements car ils passent par le système bancaire intérieur, sauf s'ils sont utilisés directement pour financer des achats à l'étranger. 1.64 La mission a inclus dans la balance des paiements des estimations des recettes totales procurées par les exportations de pétrole, des fonds rapatriés au titre des bénéfices nets des compagnies pétrolières étrangères et, comme sorties de capital, des excédents nets annuels des recettes pétrolières que l'État garde dans des banques étrangères. Toutefois, comme il était impossible de déterminer si le service de la dette pétrolière était déjà incorporé, en tout ou en partie, aux données officielles de la balance des paiements, on ne disposait d'aucune base pour remédier à une omission éventuelle à cet égard. Les erreurs et omissions nettes, qui sont déterminées à partir des mouvements des réserves officielles, comprennent donc en partie du service de cette dette. 1.65 Différents indicateurs suggèrent que les importations, surtout celles de biens intermédiaires et d'équipement, sont enregistrées de façon incomplète. D'après les estimations des importations à prix constants, établies par la mission sur la base des données officielles des comptes de la nation et de la balance des paiements, la croissance annuelle moyenne des importations de biens aurait été de moins de 1 % entre 1979 et 1985 (en prix FCFA courants, ces importations ont progressé d'environ 13 % par an, alors que l'indice des prix des importations aurait augmenté de 12 % par an). Les données sur le trafic portuaire (Tableau 10.1 de l'annexe) indiquent cependant qu'en volume, les importations ont progressé de près de 10 % par an pendant la même période, alors que les importations de produits pétroliers ont pratiquement cessé. En outre, la valeur des exportations vers le Cameroun dont font état les pays partenaires est plus élevée que la valeur des importations enregistrées par les autorités camerounaises. Enfin, le ratio des importations de biens d'équipement à l'investissement brut en capital fixe est passé de 38 % en 1978 à 20 % en 1985 et celui des importations de biens intermédiaires à la valeur brute de la production manufacturière de 37 % à 19 % dans le même laps de temps. Des changements aussi importants pendant une période courte ne peuvent s'expliquer [PAGE 417] facilement par les progrès dans la substitution des importations ou l'évolution de la composition de l'investissement. Cette sous-évaluation des importations de marchandises est peut-être due au fait que les sociétés étrangères paient certaines importations directement aux fournisseurs étrangers sans passer par le système bancaire intérieur et qu'une forte proportion des importations de biens d'équipement financées par des bailleurs de fonds étrangers n'est pas enregistrée. Ces paiements d'importations non enregistrés seraient inclus dans la balance des paiements aux rubriques des sorties de capitaux monétaires et des erreurs et omissions (Tableau 20). ii) L'évolution du commerce extérieur 1.66 Exportations. Les exportations non pétrolières en prix constants de 1980 ont progressé d'environ 3 % par an seulement (Tableau 17). Leur performance relativement modeste vient de la quasi-stagnation des exportations de produits agricoles et produits semi-finis. Le café et le cacao, les deux principales exportations agricoles traditionnelles, ont souffert de la sécheresse de 1983-84 et de la concurrence des cultures vivrières généralement plus rentables (par. 1.16). Les exportations de grumes et de produits du bois ont diminué pendant toute cette période, sauf en 1985. Les exportations des autres produits agricoles ont peu augmenté en termes réels et n'ont pas compensé la croissance lente des deux cultures d'exportation traditionnelles. Les autres exportations, notamment celles de produits manufacturés, ont eu de meilleurs résultats. Sans compter le pétrole, la structure des exportations a beaucoup changé depuis sept ans. Les deux produits de base traditionnels, qui représentaient environ 66 % des exportations non pétrolières en 1978, n'en représentaient plus que 58 % en 1985. Parallèlement, la part des produits industriels a progressé de 10 % à plus de 20 %. 1.67 Importations. D'après les données des comptes de la nation et de la balance des paiements, les importations totales de marchandises auraient augmenté de moins de 1 % par an de 1978 à 1985 en prix courants de 1980. Ce chiffre est dû, en partie, à une diminution d'environ 40 milliards de FCFA des importations de produits pétroliers, mais aussi aux autres catégories dont la valeur en termes constants a soit baissé, soit légèrement fluctué. Les importations de produits non pétroliers en pourcentage du PIB non pétrolier sont tombées de 30 % au début des années 80 à 23 % en 1985. L'année 1981 semble être une année charnière pour les importations, dont le total, comme d'ailleurs le volume des importations de nombreux groupes de produits, a soit reculé, soit progressé à des taux inférieurs à ceux de la fin des années 70. A l'exception des produits alimentaires et des boissons, l'élasticité des différentes catégories d'importations a diminué de façon substantielle après 1981 (Tableau 18). Les progrès de la substitution à l'importation expliquent une partie de cette diminution, qui reflète également le fait que toutes les importations ne sont pas enregistrées. Il y a eu, d'autre part, une croissance rapide des importations de services non [PAGE 418]
facteurs entre 1979 et 1985. Inexplicablement, ces services représentaient en 1985, 65 % des importations de produits de base comparé à 39 en 1978. 1.68 La croissance de l'industrie pétrolière, y compris l'établissement de la raffinerie de la SONARA en 1981, a modifié l'évolution de la structure des importations. Les importations de produits pétroliers [PAGE 419] raffinés sont tombées, en 1985, à 1 % seulement des importations totales de marchandises contre 13 % en 1980. Les principaux postes des importations de marchandises sont désormais les biens intermédiaires, les matières premières et les biens d'équipement; parallèlement, la part des importations de produits alimentaires a diminué, ce qui reflète l'autosuffisance alimentaire du Cameroun.
[PAGE 420] iii) La balance des paiements 1.69 Les paiements des services facteurs ont connu une croissance rapide entre 1978 et 1985 en raison des paiements d'intérêt sur la dette privée et les revenus du capital du secteur pétrolier (Tableau 19). Parallèlement, les paiements d'intérêt sur la dette publique et sur la dette garantie par l'État se sont stabilisés depuis 1982 par suite de la diminution des nouveaux emprunts, de la baisse des taux d'intérêt et du remboursement anticipé de dettes. La balance courante est passée d'un déficit de 448 millions de dollars en 1981 à un excédent de 625 millions de dollars de 1985 (8% du PIB) (Tableau 19). Cependant, comme une large part des paiements d'intérêt sur la dette contractée par les compagnies pétrolières pour la prospection et l'exploitation, ainsi qu'une part des importations, figurent en dessous de la ligne du solde des opérations courantes sous les rubriques « erreurs et omissions » et « capitaux monétaires » (Tableau 20), le déficit réel des opérations courantes a été plus important qu'il n'apparaît pour 1978-83 et son excédent réel pour 1984 et 1985 moins élevé. 1.70 Sur le compte de capital, les entrées nettes de capitaux non monétaires, qui étaient restées pratiquement constantes entre 1980 et 1983 (Tableau 20), ont accusé une chute très marquée au cours des deux derniers exercices. Ces tendances reflètent : a) l'augmentation jusqu'en 1984, puis la forte diminution en 1985, de l'investissement étranger direct net et des emprunts extérieurs nets privés, liés au développement du pétrole; b) les sorties massives de capitaux publics en 1984 et 1985 (recettes pétrolières ayant été déposées à l'étranger); et c) une régression constante des entrées nettes de capitaux publics à moyen et à long terme. Quant aux capitaux monétaires, on peut expliquer l'ampleur des montants qui sont sortis du pays, surtout pendant les deux derniers exercices, par la différence des taux d'intérêt qui favorisent les marchés financiers étrangers et par la position de liquidité des banques commerciales camerounaises. Il est difficile d'analyser l'évolution de la balance globale en raison des fluctuations du volume des capitaux pétroliers rapatriés et de l'ampleur du poste « erreurs et omissions », qui comprend des importations non enregistrées, et surtout le service d'une partie de la dette engagée pour la prospection et le développement du pétrole (par. 1.64). A la fin de l'exercice 85 (en juin 1985), on estimait les réserves nettes officielles de la banque centrale à 67 millions de dollars et les réserves nettes des banques commerciales à 297 millions de dollars; le total équivalent à environ deux mois et demi d'importations de biens et de services non facteurs. Le volume des avoirs non officiels de l'État dans des banques étrangères était encore plus élevé. 1.71 Comme l'indique le Tableau 21 : si l'on tient compte des coûts de production en devises qui comprennent une partie des coûts d'exploitation et l'amortissement et l'intérêt de la dette pétrolière et des investissements ainsi que des transports de bénéfice net des compagnies pétrolières, la contribution nette du pétrole à la balance des paiements [PAGE 421]
[PAGE 423] est passée de 210 millions de dollars en 1980 à 670 millions en 1985, soit respectivement à 16,4 % et 52,5 % des exportations de produits non pétroliers et de services non facteurs[12]. A l'avenir, le rapport des recettes pétrolières nettes en devises aux recettes brutes des exportations de pétrole augmentera car le service de la dette pétrolière et l'amortissement de l'investissement devraient diminuer rapidement. Cela compensera en partie les effets de la baisse du prix et de la production du pétrole sur la balance des paiement et les recettes de l'Etat.
(millions de dollars) iv) L'évolution de la dette extérieure
1.72 La dette publique et garantie par l'État, qui avait augmenté assez rapidement jusqu'en 1981, a depuis diminué et s'est stabilisée en valeur absolue comme en valeur relative à mesure que les autorités ont accentué leurs recours aux recettes pétrolières pour financer les programmes de développement, sans pour autant hypothéquer les recettes pétrolières futures (Tableau 22). Pour un pays de l'Afrique subsaharienne, le poids de la dette est extrêmement modeste. Sur la base de statistiques de la [PAGE 424] Banque mondiale sur la dette, le rapport du service de la dette publique et garantie aux exportations de biens et services non facteurs était de 8,5 % seulement. Sur la base des données de la balance des paiements il aurait été de 9,3 %. Si on ne comptait dans les exportations que les recettes nettes en devises du pétrole, le coefficient du service de la dette aurait été de 12,2 %, ce qui est encore faible. Les recettes pétrolières ont également permis aux autorités d'être plus sélectives dans leurs engagements et d'obtenir des conditions d'amortissement plus intéressantes. Le total de la dette publique et de la dette garantie par l'État non amorti et déboursé par les banques commerciales a été ramené de 831 millions de dollars en 1980 à 405 millions en 1985 car les recettes pétrolières ont permis de rembourser à l'avance les dettes les moins avantageuses, tandis que la dette contractée auprès de sources officielles restait à peu près inchangée. En outre, la proportion de la dette déboursée assortie de conditions concessionnelles est passée de 40 % en 1980 à 55 % en 1985, bien que le Cameroun ne remplisse plus depuis le début des années 80 les conditions nécessaires pour obtenir certains prêts à taux concessionnel, notamment les crédits de l'IDA. A la fin de 1985, l'encours de la dette privée non garantie, y compris la dette non comptabilisée relative au secteur pétrolier, pouvait être estimé à quelque 1,4 milliard de dollars, soit 17 % environ du PIB. G. Conclusions 1.73 Les résultats économiques et financiers du Cameroun au cours des dernières années ont été remarquables, et cela, en dépit d'une conjoncture internationale difficile. Le PNB par habitant (environ 800 dollars en 1985) a augmenté de façon substantielle; la dette extérieure est exceptionnellement faible, malgré un effort d'investissement soutenu; le pays a atteint et maintenu son autosuffisance alimentaire; et enfin, la situation financière de l'État est saine. 1.74 Ces résultats globaux cachent néanmoins un certain nombre de problèmes structurels qui assombrissent l'horizon. La majeure partie de la croissance non liée au pétrole a eu lieu dans les secteurs des biens non échangeables : le bâtiment, les services et les cultures vivrières. Au total, la production des cultures d'exportation a virtuellement stagné entre 1978 et 1985. Des distorsions dans le système de protection et d'incitations ont suscité le développement d'industries à forte intensité de capital et essentiellement orientées vers le marché intérieur, avec de grandes entreprises publiques dont les pertes ne semblent pas être reflétées en totalité dans les estimations officielles de la valeur ajoutée de ce secteur. En définitive, alors que les efforts de substitution à l'importation dans l'industrie ont eu comme effet de limiter de façon substantielle la croissance des importations de marchandises, il n'y a eu qu'une faible augmentation du volume des exportations de produits non pétroliers entre 1978 et 1985. Le secteur financier est resté relativement sous-développé et sa position de liquidité, fragile. Grâce au nouveau [PAGE 425]
Code des investissements, promulgué au milieu de 1984, et à l'apparente évolution de la stratégie officielle de développement industriel, qui n'accorde plus la même importance au développement de grandes industries de substitution à l'importation, on observe une progression de l'activité d'investissement dans les petites et moyennes entreprises. L'investissement étranger, par contre, qui serait essentiel pour la mise en valeur des ressources naturelles et leur transformation pour l'exportation, a été insignifiant, sauf dans le secteur pétrolier. En dépit des efforts d'investissement importants de l'État, les infrastructures rurales, le développement urbain et les transports ont pris du retard, ce qui freine sérieusement le développement des activités de production. 1.75 Sur le plan social, le niveau de vie a continué de progresser. La scolarisation a augmenté considérablement à tous les niveaux. Cependant, la qualité et l'efficacité du système se détériorent et celui-ci n'est pas adapté aux besoins croissants de l'économie en main-d'œuvre qualifiée, en techniciens et en cadres moyens. Les indicateurs de santé restent [PAGE 426] insatisfaisants. En raison de l'accélération de la croissance de la population et de l'exode rural des jeunes, le chômage augmente dans les centres urbains, alors que certaines régions rurales connaissent une pénurie d'exploitants et de main-d'œuvre pour le développement nécessaire des cultures d'exportation. 1.76 La diminution de la dette extérieure et son faible niveau témoignent de la prudence avec laquelle le Cameroun gère ses ressources pétrolières. Tout d'abord, contrairement à la plupart des autres pays producteurs de pétrole, il ne s'est pas laissé prendre au piège qui consiste à hypothéquer ses revenus pétrolier futurs. Deuxièmement, il s'est servi d'une bonne part de ses revenus pétroliers pour financer des investissements, en particulier dans les infrastructures économiques et sociales. Cependant, malgré le secret qui entoure le secteur pétrolier et qui a permis de limiter les attentes de la population, et malgré la sagesse des autorités en ce qui concerne l'utilisation des recettes pétrolières, notamment leur rapatriement discret par les comptes hors budget, la quasi totalité de ces revenus a été injectée dans l'économie. Ainsi, au milieu de 1986, l'épargne publique extérieure non officielle ne représentait, en tout, qu'à peine 10 % des recettes pétrolières totales de l'État depuis 1978, auxquels s'ajoutent environ 4 % constitués par l'épargne intérieure (créances nettes sur le secteur bancaire). Actuellement, 75 % environ des ressources extrabudgétaires sont utilisées pour financer des dépenses en capital qui représentent environ 50 % de l'investissement public total. Les recettes pétrolières ont été également utilisées pour augmenter la consommation publique : le nombre des fonctionnaires permanents a progressé de 10 % par an, ce qui sera un lourd fardeau à l'avenir. Une large part des recettes pétrolières a aussi servi à financer les déficits croissants et à prendre en charge les dettes d'entreprises publiques non rentables ou mal gérées, et il sera difficile de renverser ce courant. En résumé, le niveau de l'investissement et des dépenses publiques et, dans une moindre mesure, celui de la consommation privée et les besoins réels d'importation de l'économie qui en résultent se sont déjà ajustés aux revenus pétroliers. Cela rendra le processus d'ajustement à la baisse des revenus pétroliers plus difficile qu'on ne le croit généralement. II PERSPECTIVES ET POLITIQUES D'AJUSTEMENT A. Les perspectives du secteur pétrolier et leurs conséquences i) Le secteur pétrolier 2.1 L'évolution des revenus du pétrole et leur gestion constituent un déterminant important des perspectives économiques et financières du Cameroun. Comme on l'a vu au chapitre 1 la part du secteur pétrolier représentait plus de 17 % du PIB et les recettes tirées du pétrole constituaient [PAGE 427] quelque 45 % des recettes totales de l'État en 1985[13]. Si l'on exclut la part des recettes du pétrole épargnée cette même année, le pétrole représente encore environ 40 % du total. Les recettes nettes en devises du secteur pétrolier après déduction des coûts de production en devises représentaient en 1985 environ 35 % du total des revenus d'exportations de biens et services. Au cours de la période 1979-85 la demande intérieure de l'économie s'est progressivement ajustée à l'apport additionnel des ressources pétrolières, dont seulement une faible part a été épargnée. 2.2 Avant les changements intervenus dans le marché mondial du pétrole au début de 1986, il était prévu, d'après le niveau des réserves du Cameroun connues et non encore exploitées, que la production du pétrole atteindrait un maximum d'environ 8 à 9 millions de tonnes pour l'année 1986 et diminuerait ensuite graduellement jusqu'en 1995, à moins que de nouvelles découvertes n'interviennent dans les années à venir. Cette perspective d'une diminution progressive des revenus du pétrole a été aggravée par la chute des cours du pétrole brut qui, non seulement, affecte directement les recettes pétrolières, mais encore, entraîne, dans les conditions actuelles de coûts de production et de partage des revenus entre l'État et les compagnies pétrolières (paras. 1.7, 1.42 et 1.43), une réduction des réserves économiquement récupérables. 2.3 Les prévisions de prix du pétrole brut sont indiquées au tableau 24. Le scénario A correspond aux prévisions que les services compétents de la Banque ont faites en avril 1986 sur la base d'une analyse de l'évolution du marché mondial à long terme. Dans ce scénario il y aurait une légère reprise du prix du pétrole dans les années calendaires 1987 et 1988. Il resterait au même niveau en prix constants de 1984 jusqu'en 1990, pour augmenter graduellement ensuite. Le scénario B est basé sur l'hypothèse que l'accord sur des quotas de production récemment intervenu au sein de l'OPEP ferait remonter le prix du pétrole à 20 dollars en prix constants de 1984 pour l'année calendrier 1987 et qu'il resterait à ce niveau ensuite. Ce prix de 20 dollars est en effet considéré comme le seuil au-delà duquel les consommateurs sont incités à utiliser d'autres sources d'énergie, ce qui n'est pas l'intérêt des producteurs de pétrole dans le long terme. 2.4 Au niveau de prix du pétrole projeté au scénario A les réserves économiquement récupérables restant à exploiter étaient estimées par les analystes pétroliers internationaux à environ 40 millions de tonnes en avril 1986. La production diminuerait jusqu'en 1995 comme indiqué au tableau 24. Si le prix du pétrole remontait à 20 dollars ou plus en dollars constants de 1984 ou si les accords de partage de la production entre l'État et les compagnies pétrolières étaient révisés de façon
à laisser une plus grande part à ces dernières, les réserves économiquement récupérables augmenteraient de quelque 10 millions de tonnes (Scénario B). Il n'y a pas à l'heure actuelle d'indications de nouveaux gisements de pétrole et les activités de prospection ont été très réduites au cours de ces dernières années. La décision récemment prise par les autorités camerounaises de rendre plus attrayantes pour les compagnies les conditions fiscales de la prospection du pétrole qui sont actuellement nettement moins favorables que celles offertes par d'autres pays pourrait relancer les activités de prospection. Cependant, même si des découvertes de nouveaux gisements intervenaient dans un proche avenir, il faudrait environ de 2 à 4 ans pour les développer. La consommation intérieure de pétrole est projetée sur la base d'une élasticité de 1,15 par rapport au PIB non-pétrolier (para. 2.10). Les exportations [PAGE 429] de pétrole brut (Tableau 24) sont déduites par différence. Dans le scénario d'ajustement (Section B), il résulterait de la croissance plus faible du PIB une croissance de la consommation intérieure de pétrole moins rapide et, par conséquent, un volume d'exportations de pétrole un peu supérieur à celui projeté ici. 2.5 L'évolution future des coûts de production est un élément important de la projection des recettes pétrolières de l'Etat et de la contribution nette des exportations de pétrole à la balance des paiements. Les coûts de production comprennent les coûts d'exploitation (coûts variables) et les charges en amortissements des investissements réalisés pour développer les gisements de pétrole (coûts fixes). On fait l'hypothèse que les coûts d'exploitation par baril resteraient constants en termes réels. Il s'agit là d'une hypothèse relativement optimiste car les techniques de récupération secondaire qui devront être utilisées en fin d'exploitation des gisements pourraient entraîner une augmentation des coût d'exploitation. La marge d'erreur sur ce point est cependant limitée étant donné qu'en 1985 les coûts d'exploitation ne représentaient qu'environ 20 % des coûts de production. En ce qui concerne les charges en amortissements on a estimé, en l'absence de données complètes, que le montant restant à amortir était d'environ 1 200 millions de dollars au début de l'année 1986 et serait amorti en annuités décroissances sur les six années 1986-91[14]. Si ce chiffre était sous-estimé ou sur-estimé, les besoins de financement extérieur du pays tels que projetés dans les sections qui suivent s'en trouveraient modifiés d'autant pour cette période. Il résulterait des hypothèses adoptées une diminution rapide des coûts de production après 1987 qui compenserait en partie la chute des recettes brutes tirées du pétrole (Tableau 25).
[PAGE 430] 2.6 Sur la base des hypothèses ci-dessus, les recettes brutes d'exportation et les recettes nettes en devises du pétrole ainsi que les recettes pétrolières de l'État évolueraient comme indiqué au tableau 26. Le cours du dollar est supposé, à titre purement illustratif, passer de 435 FCFA en 1986 à 345 FCFA en 1987 et 333 FCFA en 1988 et rester ensuite à ce niveau pour la période de la projection. Les autres éléments du calcul sont discutés aux paras. 1.42, 1.43 et 1.71. Il est supposé que la part des recettes pétrolières de l'État continuerait de représenter 87 % des revenus nets de la production de pétrole sur la période de la projection, c'est-à-dire qu'on ne prend pas en compte la renégociation possible des contrats entre l'État et les compagnies (para. 2.4). Au total, dans le scénario A le pays aura à faire face à une chute rapide des revenus nets en devises de pétrole d'environ 670 millions de dollars en 1985 à environ 120 millions en 1991. Ces revenus seraient ensuite négatifs lorsque les reliquats de production seraient entièrement absorbés par le marché intérieur. Les recettes pétrolières de l'État, quant à elles, tomberaient de 406 milliards de FCFA en 1985 à environ 120 milliards en 1991. Dans le scénario B la perte de recettes serait moins sévère mais tant les revenus nets en devises que les recettes pétrolières de l'État diminueraient encore de moitié en cinq ans. Il convient de souligner le caractère aléatoire de toute projection des prix mondiaux du pétrole dans les circonstances actuelles, étant donné le nombre important des facteurs qui le déterminent, y compris les facteurs d'ordre politique et psychologique. Cependant, même si les hypothèses du scénario A s'avéraient trop optimistes et les prix du pétrole retombaient et restaient au niveau de 10-15 dollars, les compagnies pétrolières seraient amenées à réduire les coûts de production en rééchelonnant l'amortissement de leurs investissements et de leur dette sur une plus longue période (para. 2.5), ce qui atténuerait l'effet de la baisse des prix sur les recettes nettes tirées du pétrole. En tout état de cause, une évolution moins favorable des prix du pétrole que celle envisagée dans ces projections ne ferait que renforcer les conclusions des sections qui suivent. ii) Les perspectives économiques et financières Scénario sans ajustement 2.7 Il résultera de la diminution conjuguée des volumes et des prix du pétrole une forte contraction du Revenu Intérieur Brut[15] du pays, de sa capacité à importer et de son épargne intérieure. La mission a élaboré un premier scénario de projections pour illustrer les effets à [PAGE 431]
[PAGE 432] long terme sur la balance des paiements et les finances publiques de la diminution des revenus du pétrole et d'une évolution de l'économie selon les tendances des années récentes sans mesures d'ajustement particulières. Il est supposé dans ce scénario que la perte des revenus du pétrole serait simplement compensé par l'emprunt extérieur, avec la conséquence de compromettre le niveau de revenu du pays dans le futur. 2.8 Le modèle utilisé pour faire les scénarios de projections présentés dans les paragraphes qui suivent est le « Revised Minimum Standard Model » (RMSM)[16]. On a également utilisé le Modèle d'équilibre général calculable (Computable General Equilibrium (CGE) Model) pour tester dans le scénario d'ajustement l'impact de certaines variables de politique économique telles que les prix à la production agricole, la fiscalité et les tarifs douaniers. Il convient d'observer que les projections qui suivent ne constituent en aucun cas une prédiction de l'avenir mais visent à montrer comment pourraient évoluer les principales grandeurs économiques et financières pour une série d'hypothèses données concernant un certain nombre de variables. Elles ont donc un caractère purement indicatif. 2.9 Les données réelles de l'année 1984 et les données estimées de l'année 1985 constituent la base de la projection. Deux ajustements ont été effectués dans les statistiques officielles afin d'éviter des distorsions dans la projection. La valeur ajoutée du secteur pétrolier, et par conséquent le PIB, ont été corrigés en hausse (para. 0.5) et la valeur des importations a été accrue de 10 % (para. 1.65) pour l'année de base. Du côté des emplois, la consommation privée a été ajustée de façon correspondante. 2.10 Les résultats de la stimulation d'une évolution de l'économie selon les tendances récentes sans mesures d'ajustement particulières, à partir du scénario A pour les prix et la production de pétrole, sont résumés aux tableaux 27 et 28[17]. En dépit des hypothèses relativement optimistes retenues pour les exportations non-pétrolières et l'élasticité des importations, il résulterait des niveaux de croissance et d'investissement [PAGE 433] projetés une augmentation rapide du déficit en ressources (ou déficit de la balance commerciale) et, concurremment, une chute du taux d'épargne intérieure. Le taux d'épargne intérieure, ajusté de l'effet des termes de l'échange, tomberait de 35 % du PIB en 1985 à moins de 18 % en 1991, et l'épargne intérieure ne couvrirait alors que moins de 78 % de l'investissement tel que projeté. [PAGE 434] 2.11 Sous les hypothèses retenues pour les différents éléments du compte des services facteurs et transferts, le solde courant de la balance des paiements deviendrait négatif d'environ 380 millions de dollars dès 1987. Ce déficit augmenterait jusqu'à plus d'un milliard de dollars en 1991 et atteindrait des niveaux absolument excessifs ensuite lorsque non seulement le pays n'exportera plus de pétrole mais devra en importer. Sur le plan de la balance des paiements, les mouvements nets de capitaux au titre (i) des investissements directs; (ii) des emprunts extérieurs des sources officielles; (iii) des emprunts privés; (iv) de l'amortissement et de l'intérêt de la dette et des investissements du secteur pétrolier ne couvriraient qu'une petite partie des déficits courants. Même [PAGE 435] en supposant que l'Etat rapatrie en 1987 le reste de son épargne financière extérieure, il faudrait avoir largement recours à l'emprunt commercial dès cette année pour maintenir les réserves extérieures nettes à un niveau minimum. Les besoins de financement extérieur atteindraient dès 1988 des montants qui dépasseraient la capacité d'emprunt du pays, en termes d'accès aux sources commerciales et de capacité de service de la dette dans le long terme. En supposant que les besoins bruts de financements projetés c'est-à-dire les besoins nets augmentés des charges récurrentes en amortissement et intérêts puissent être couverts chaque année jusqu'en 1991, le coefficient du service de la dette, par rapport aux exportations de biens et services, atteindraient déjà 54 % en 1993. 2.12 La contrainte financière intérieure serait également importante bien que moins sévère que la contrainte extérieure. Le modèle incorpore un module de projections des finances publiques. Les principales catégories de recettes fiscales et non fiscales et de dépenses courantes sont projetées en utilisant les élasticités et coefficients historiques; c'est-à-dire qu'on ne prévoit pas dans ce scénario de changements dans la politique fiscale. Les recettes pétrolières sont projetées comme indiqué à la section II A. Les dépenses courantes en salaires, matériels et fournitures sont projetées selon les mêmes hypothèses que la consommation publique. Il est supposé dans ce scénario qu'en l'absence d'actions de réhabilitation/restructuration en profondeur des entreprises publiques, les subventions et transferts courants resteraient en termes réels au niveau de 150 milliards de FCFA par an sur toute la période de la projection, c'est-à-dire que ces dépenses augmenteraient au rythme de l'inflation qui est supposé de 7 % par an. Enfin, les dépenses en capital de l'État, y compris la part des investissements des entreprises publiques qui est à la charge de l'État, sont calculées en supposant que leur part dans l'investissement fixe total du pays continuerait d'être de 35 %. Dans un tel scénario sans ajustement, l'excédent global des opérations de l'État qui a été réalisé pratiquement chaque année depuis 1979 se transformerait en un déficit de quelque 335 milliards de FCFA en 1987 (7,7 % du PIB), qui croîtrait jusqu'à plus de 400 milliards de FCFA en 1991. Il s'agit là de besoins nets de financement. Ces besoins devraient être couverts par des emprunts supplémentaires auprès des sources officielles, par des emprunts extérieurs commerciaux et par l'emprunt intérieur. Les charges récurrentes de service de ces emprunts entraîneraient une augmentation rapide des besoins bruts de financement, qui deviendraient vite excessifs.
(en millions de dollars à prix courants) [PAGE 439] 2.13 Les résultats financiers obtenus à partir du scénario B pour les prix et la production de pétrole les hypothèses restant les mêmes pour toutes les autres variables de la projection sont évidemment moins mauvais mais ne seraient pas viables non plus à moyen terme. Les principaux déficits intérieurs et extérieurs se comparent à ceux du scénario A comme suit :
2.14 Ces scénarios illustrent l'importance des contraintes financières intérieure et, surtout, extérieure que le pays va subir dès 1987 en raison de la chute des revenus du pétrole et fait ressortir la nécessité de prendre des mesures d'ajustement de l'économie à brève échéance. Si les prix du pétrole restent aux niveaux projetés dans le scénario A, ou tombent encore plus bas, des mesures d'ajustement devraient être prises rapidement. Sous les hypothèses du scénario B pour les prix et la production de pétrole, le pays disposerait d'un délai d'environ deux ans pour préparer un programme d'ajustement, mais l'ampleur de ce programme devrait être aussi large que dans le premier cas. Il convient [PAGE 440] d'observer cependant que, contrairement à beaucoup de pays qui ont dû entreprendre un ajustement de leur économie sous la pression d'une crise due à la baisse de leur revenu intérieur et à un endettement extérieur excessif, le Cameroun se trouve dans une situation privilégiée pour ajuster son économie sans choc brutal en raison de son faible endettement et de son épargne financière intérieure et extérieure substantielle B. Un scénario d'ajustement et les politiques économiques, fiscales et financières sous-jacentes i) Un scénario d'ajustement 2.15 Étant donné que les ressources pétrolières ont été intégralement gérées par l'État, c'est essentiellement à l'État qu'il appartient d'effectuer et de susciter l'ajustement de l'économie au déclin pétrolier. Comme on l'a vu dans les sections qui précèdent cet ajustement ne va pas être facile et le dosage des actions que l'État va prendre dans les domaines économique, fiscal et monétaire sera critique pour le niveau de revenu du pays dans le futur. En effet, bien que la chute des recettes pétrolières de l'État soit à peu près égale à celle du Revenu intérieur, toute action visant à compenser cette chute aura inévitablement une série d'effets secondaires. Par exemple, dès l'instant où l'État augmente la fiscalité ou réduit ses dépenses courantes ou ses dépenses en capital, il se produira des effets variables sur la croissance du PIB, le niveau des salaires réels et de l'épargne et sur la balance commerciale. De la même manière, un recours accru à l'emprunt extérieur entraînera des changements dans les niveaux actuels et futurs de revenu et de consommation du pays. 2.16 Sachant le caractère temporaire des ressources pétrolières, l'État avait pensé se protéger par le mécanisme des comptes hors-budget pour utiliser ses recettes pétrolières au financement de dépenses en capital supplémentaires (para. 1.42). Cependant la seule réduction des dépenses en capital ne permettrait plus de résoudre le problème de la chute des recettes pétrolières. En effet, comme on l'a analysé au chapitre 1, les niveaux de dépenses récurrentes de l'État, y compris les besoins de financement courant des entreprises publiques qu'il a établies, et, dans une moindre mesure, de consommation privée, ainsi que, par conséquent, les besoins en importation de l'économie se sont déjà ajustés au niveau des recettes pétrolières. En outre une telle action serait dangereuse. En effet, à l'heure actuelle environ 50 % des dépenses en capital de l'État sont financées par les comptes hors-budget et une réduction de moitié de ces dépenses aurait des conséquences graves sur la croissance future de l'économie. Enfin, une partie non négligeable des recettes pétrolières (les redevances et l'impôt sur les bénéfices des compagnies pétrolières) a été régulièrement inscrite au budget pour le financement de dépenses courantes rapidement croissantes. [PAGE 441] 2.17 L'ajustement de l'économie va nécessiter un ensemble de mesures simultanées et coordonnées consistant essentiellement en :
ii) une diminution graduelle et modérée du taux d'investissement par rapport au PIB, à peu près jusqu'au niveau où il se trouvait avant l'avènement du pétrole, combinée à une augmentation progressive de l'efficacité et de la rentabilité moyenne des investissements; iii) au plan des finances publiques, une réduction des dépenses en capital de l'État qui serait obtenue à la fois par la diminution du taux d'investissement du pays et la diminution graduelle de la contribution de l'État à l'investissement total; un ralentissement de la croissance de la consommation publique (y compris les transferts aux entreprises publiques); et un accroissement des recettes fiscales; iv) la réhabilitation ou la liquidation des entreprises publiques; v) la stimulation de l'investissement privé, national et étranger, pour compenser la diminution relative de celui de l'État, et élargir la base productive, principalement pour l'exportation; vi) le recours accru à l'emprunt extérieur dans le cadre d'une stratégie clairement établie; et vii) une série de mesures de politique monétaire visant essentiellement à accompagner et renforcer les actions ci-dessus. 2.19 La mission n'avait pas encore eu connaissance du document final du Sixième Plan de Développement (1987-91) lorsque ce rapport a été préparé. Le Sixième Plan, qui a été publié en Novembre 1986, incorpore nombre d'objectifs et de déclaration de politique qui sont dans la ligne des mesures et politiques d'ajustement discutées dans ce chapitre pour les différents secteurs. Le niveau de l'investissement fixe cumulé des cinq années 1989-91 envisagé par le Plan correspond à celui qui est projeté dans le Scenario d'Ajustement de ce rapport (Tableau 30). Le Gouvernement a déjà pris au cours de ces derniers mois certaines mesures dans le sens de l'ajustement. Ces mesures concernent en particulier la réhabilitation et la réduction du coût du secteur parapublic, l'apurement du rôle des fonctionnaires et agents de l'État, l'amélioration du recouvrement de certaines catégories d'impôts et la réduction [PAGE 442] de la croissance des dépenses publiques, la rationalisation de la passation des marchés publics et la réforme du cadre institutionnel de soutien au développement rural. ii) Les politiques budgétaires 2.20 Les mesures d'ajustement au plan budgétaire auront pour objectif premier d'augmenter les recettes non pétrolières et de diminuer les dépenses de l'État, ou tout au moins ralentir leur croissance. Cependant ces mesures auront également les effets directs et indirects souhaités sur les comptes extérieurs et le taux de change réel. Par exemple une augmentation de la fiscalité indirecte sur les biens de consommation freinera la croissance de la consommation privée et entraînera par conséquent une réduction des importations. Pour autant que cette mesure soit accompagnée de mesures d'incitation appropriées à l'exportation, elle devrait entraîner aussi une augmentation des exportations dans certains secteurs, puisque la demande intérieure de biens exportables serait réduite[18]. Il en serait de même d'un accroissement de la fiscalité directe sur les revenus; elle réduirait les revenus nets et donc la demande de consommation. 2.21 La réduction relative des dépenses courantes et des dépenses en capital de l'État aurait sur la balance des paiements un effet encore plus important que l'augmentation de la fiscalité[19]. En effet, une compression des salaires de la fonction publique entraînerait une réduction de la croissance de la consommation privée, avec les mêmes effets sur la balance des paiements que ci-dessus. En outre une telle mesure tendrait à réduire les salaires réels, puisque la demande d'emploi dans la fonction publique diminuerait, et, par conséquent, à abaisser le taux de change réel et favoriser l'exportation. L'impact d'une compression des dépenses récurrentes de l'État en matériels et fournitures sur les comptes extérieurs est plus difficile à évaluer étant donné qu'on ne connaît pas la part en devises de ces dépenses, mais cet impact serait certainement important. En ce qui concerne les subventions et transferts courants aux entreprises publiques et autres institutions para-étatiques, leur diminution devrait avoir un impact sur les comptes extérieurs similaire à celui d'une compression des salaires de la fonction publique, pour autant qu'une part importante de ces subventions et transferts soit utilisée pour le paiement de salaires. 2.22 La compression des dépenses d'investissement public aurait quant [PAGE 443] à elle un effet positif très important sur les comptes extérieurs étant donné le contenu d'importations élevé de l'investissement. En outre, une telle mesure conduirait à corriger les effets de type « syndrome hollandais » qu'a eu tendance à avoir le fort accroissement des dépenses en capital de l'État à partir de 1979, en particulier en ce qui concerne les secteurs de la construction et de l'administration publique. Cette mesure provoquerait une augmentation relative des prix des biens et services exportables par rapport aux biens et services non exportables et aurait par conséquent des effets secondaires positifs sur la balance commerciale en incitant les producteurs à exporter davantage. 2.23 Pour déterminer l'ordre de grandeur des mesures d'ajustement à prendre sur le plan budgétaire il est utile de se référer aux chiffres de la période qui a précédé l'apparition du pétrole. Au cours de la période 1971-79 les recettes budgétaires ont représenté en moyenne 16 % du PIB et ont augmenté jusqu'à 20 % du PIB en 1979. Les revenus du pétrole ont commencé à compter à partir de 1980 et les recettes totales de l'État ont augmenté jusqu'à 24 % du PIB total en 1985, dont 10,9 % provenait du secteur pétrolier. Par contre les recettes budgétaires non pétrolières sont simultanément tombées de 20 % du PIB non pétrolier en 1979 à moins de 16 % en 1985, soit à peu près au niveau où elles étaient en 1971. Ce taux se compare défavorablement au taux moyen de 21,8 % du PIB observé en 1981 pour le groupe des pays en voie de développement à revenu moyen[20]. Parallèlement les dépenses courantes du budget augmentèrent rapidement passant de 12,0 % du PIB non pétrolier en 1979 à 16,3 % en 1985 avec une croissance quelque peu plus marquée des subventions et transferts courants que celle des salaires, matériels et fournitures. Ceci indique que l'État dispose d'une marge de man#339;uvre appréciable pour augmenter ses recettes fiscales non pétrolières et, surtout, réduire les dépenses courantes en termes relatifs, bien que cela ne puisse se faire que graduellement et que les dépenses récurrentes induites par les investissements publics importants des années 1979-86, y compris ceux des entreprises publiques, réduisent cette marge. C'est-à-dire que les charges récurrentes du secteur public ne permettraient plus de comprimer les dépenses en matériels, fournitures et subventions courantes jusqu'à leur niveau relatif de 1979, à moins de compromettre le bon fonctionnement de la fonction publique et des dépenses en salaires que des économies substantielles vont devoir être recherchées. 2.24 Du côté des recettes, c'est principalement la fiscalité directe et la fiscalité indirecte sur les biens et services qu'il faudra augmenter. Il n'y a cependant qu'une marge limitée pour augmenter le produit de la fiscalité directe sur les sociétés étant donné la nécessité d'accroître les incitations fiscales à l'investissement privé et à l'exportation et, d'une façon générale, d'éviter des mesures qui décourageraient la production et l'entreprise. L'augmentation la plus forte pourrait porter sur la fiscalité [PAGE 444] indirecte sur les biens et services, tout en tenant compte de la nécessité d'éliminer certaines taxes ayant un effet négatif sur l'économie (section (iv)). A cet égard il pourrait être opportun de considérer une réforme de la fiscalité indirecte et la mise en place d'une taxe à la valeur ajoutée. Les autres taxes et revenus non fiscaux pourraient également être modérément accrus. Les tarifs douaniers, ou tout au moins les taxes qui s'ajoutent aux tarifs communs de l'UDF-AC, pourraient être modérément augmentés sur les biens intermédiaires et les biens de consommation, bien qu'ils soient déjà relativement élevés, mais cela devrait se faire dans le cadre de la réforme des tarifs qui est discutée plus loin (section (iii)). En outre une augmentation des tarifs moyens ne compensera que partiellement le fort ralentissement de la croissance des importations qui devra résulter du programme d'ajustement ainsi que la nécessaire élimination de toutes les taxes à l'exportation. En plus de l'augmentation de la pression fiscale, il y a une marge importante pour améliorer l'efficacité de la perception des taxes et le Gouvernement a déjà pris des mesures importantes dans ce sens. Au total, les élasticités de la croissance des principales catégories de recettes fiscales et non fiscales par rapport à la croissance du PIB non pétrolier à prix courants pourraient être les suivants, par comparaison à la période 1980-85.
Il en résulterait une élasticité moyenne des recettes, non compris les droits et taxes de douanes, par rapport au PIB de 1,18 pour la période 1987-91. La comparaison de ce taux d'élasticité avec ceux de 1,12 et 1,10 réalisés pendant les périodes 1971-79 et 1980-85, respectivement, est une indication de l'effort fiscal qu'il est possible d'entreprendre sans compromettre la croissance et sans provoquer une contraction de l'assiette fiscale. 2.25 En ce qui concerne les recettes de droits et taxes de douanes, on suppose qu'elles augmenteraient graduellement de 26,2 % de la valeur courante (FOB) des importations de biens en 1986 à 30,5 % en 1989 et resteraient à ce niveau ensuite. Toutefois, étant donné la faible croissance des importations qui est projetée, ces recettes augmenteraient sensiblement moins vite que le PIB. Au total l'augmentation [PAGE 445] de la pression fiscale ne permettrait un accroissement graduel du ratio des recettes de l'État au PIB non pétrolier qu'à partir de 1988 (Tableau 29). 2.26 Du côté des dépenses courantes, il ne paraît pas souhaitable de réduire la croissance des dépenses récurrentes (matériels et approvisionnements) à moins de 2 % par an en termes réels pendant la période 1987-91, même si, au mieux, les dépenses d'investissement public restent constantes en termes réels pendant cette période (para. 2.33). En effet les dépenses en matériel et approvisionnement n'ont augmenté que de 4,3 % par an en termes réels de 1981 à 1985 et les analyses sectorielles indiquent que plusieurs départements ministériels santé, éducation, agriculture en particulier ne disposent pas des ressources de fonctionnement suffisantes pour entretenir leurs équipements et fournir des services efficaces. Il est certain que des économies appréciables pourraient être réalisées en améliorant le recouvrement des coûts et en réduisant les coûts dans plusieurs secteurs, ou en favorisant le développement des services privés (santé). Toutefois, ces économies permettraient au mieux une restructuration inter-sectorielle des budgets courants et il faut tenir compte également des arriérés importants que l'État devra régler aux entreprises pour atténuer les problèmes de liquidité que le ralentissement de la croissance et de l'investissement provoquera inévitablement dans des secteurs tels que celui de la construction. Pour la période 1992-96 on projette un taux de croissance réel de dépenses récurrentes de 5 % par an, ce qui serait légèrement supérieur au taux de croissance de l'investissement public pendant cette période. 2.27 Pour maîtriser le déficit budgétaire, l'effort principal devra porter sur les dépenses en personnel, outre les dépenses en capital. Les effectifs de la fonction publique ont augmenté de plus de 9 % par an de 1981 à 1985 et les dépenses en personnel de l'Etat représentaient 40 % de ses dépenses courantes en 1985. On fait l'hypothèse dans le scénario d'ajustement que ces effectifs seraient gelés jusqu'en 1991 c'est-à-dire qu'on ne recruterait des fonctionnaires qu'à concurrence des départs et n'augmenteraient qu'au rythme modéré de 2 % par an jusqu'en 1996. Ceci est à comparer au taux de 6 % retenu pour toute la période de la projection dans le scénario sans ajustement, qui représente déjà un ralentissement par rapport aux années récentes. Cette politique de stabilisation de la fonction publique devra bien entendu être soutenue par des redistributions de fonctionnaires entre les secteurs ou entre les services en fonction des besoins, avec des cours de recyclage appropriés. Il existe en effet des départements et services ministériels qui disposent d'effectifs pléthoriques alors que d'autres manquent de personnel. 2.28 Il serait également essentiel de freiner puis de réduire l'hémorragie des dépenses en subventions et transferts courants, qui ont sextuplé de 1979 à 1985, passant de 15,7 % des dépenses courantes de l'Etat à près de 25 %. On ne connaît pas la destination précise de ces [PAGE 446] subventions et transferts mais il est probable qu'ils concernent dans une très large mesure les entreprises publiques (paras. 1.52-1.54). 2.29 Le Gouvernement a récemment établi une mission de réhabilitation des entreprises du secteur public et para-public. Cette mission est composée d'une commission technique de cinq membres et d'un comité interministériel de cinq ministres. Bien que les termes de référence détaillés de cette mission ne soient pas encore connus, on s'attend à ce que le Gouvernement lui confie les tâches suivantes :
qui seraient à privatiser après réhabilitation/restructuration; dont l'exploitation serait confiée à des groupes privés avec des contrats de gestion; qui seraient à réhabiliter et/ou restructurer et à conserver dans le portefeuille de l'État; et qui seraient simplement à liquider; ii) harmoniser le cadre juridique des entreprises publiques et para-publiques; iii) redéfinir les objectifs de chaque entreprise, en précisant le cas échéant les objectifs sociaux dont les coûts seraient à compenser par des subventions, et réviser en conformité les statuts des entreprises; iv) clarifier les différents niveaux de gestion : tutelle, conseil d'administration, direction, ainsi que le rôle de la SNI, et redéfinir dans le cadre d'une nouvelle loi les relations entre ces niveaux en délimitant strictement les fonctions d'actionnaire, de stratégie et de gestion, avec l'objectif de favoriser l'autonomie de gestion des entreprises dans le cadre d'objectifs préétablis et avec un contrôle a posteriori; v) responsabiliser les directions des entreprises en introduisant des critères de performances par rapport aux objectifs, des objectifs financiers et un système d'incitations et de sanctions, et des procédures de contrôle a posteriori par les organes de tutelle; vi) introduire la planification stratégique et la planification pluriannuelle des investissements dans les entreprises; vii) introduire les contrats de plan entre les entreprises et leur tutelle. Les Contrats de plan ont pour objectif de constituer un cadre [PAGE 447] de référence qui permette l'autonomie de gestion de l'entreprise avec le contrôle à posteriori de sa tutelle[21]; viii) proposer des mesures pour améliorer les procédures et méthodes d'audit financier des entreprises et pour unifier, le cas échéant, leurs plans comptables; et ix) proposer et organiser la préparation de programmes de réhabilitation et/ou de restructuration des entreprises et participer aux missions ad hoc qui devront être constituées dans chaque cas pour la mise en œuvre de ces programmes. Il convient d'observer cependant que de tels programmes doivent être essentiellement mis en œuvre par les conseils d'administration et les équipes de direction des entreprises concernées et que leur succès dépend étroitement du degré d'engagement des personnes qui composent ces organes à leur réalisation. 2.31 Beaucoup des problèmes des entreprises publiques sont dus à la non rentabilité de leurs investissements ou au surdimensionnement initial de leurs projets. Pour éviter que cela ne se reproduise et pour maximiser l'allocation de ressources d'investissement plus rares dans les années à venir il serait essentiel que les nouveaux projets dans lesquels l'État jugera opportun de s'engager financièrement, soit directement soit en apportant sa garantie, ainsi que les projets qui seraient autofinancés par les entreprises publiques soient évalués aux plans technique, économique [PAGE 448] et financier avec la plus grande rigueur et la plus stricte indépendance. A cet égard la Sous-Direction de l'Évaluation des Projets qui a été constituée au Ministère du Plan et de l'Aménagement du Territoire a un rôle crucial à jouer. On peut imaginer également que, si elle est destinée à devenir l'organe technique de l'État pour le suivi des entreprises publiques, la mission récemment constituée soit habilitée à faire appel à des consultants qualifiés pour l'évaluation des projets futurs. 2.32 L'effet des mesures de réhabilitation des entreprises publiques et para-publiques sur le niveau des subventions que l'État doit leur apporter pour qu'elles survivent ne sera pas, bien entendu, immédiat. A titre purement illustratif, on fait l'hypothèse dans le scénario d'ajustement que les transferts et subventions courantes de l'État seraient contenus à 150 milliards de FCFA par an à partir de 1987, à prix courants. Cela signifie qu'ils diminueraient en termes réels de 4,5 % par an et ne représenteraient plus en 1991 qu'environ 20 % des dépenses courantes de l'État contre 25 % en 1985 (dans le scénario sans ajustement on a supposé que ces transferts et subventions continueraient à augmenter au rythme de l'inflation). On pourrait concevoir d'ailleurs que cette hypothèse constitue un objectif qui serait éclaté par entreprise pour les contraindre à accélérer leur réhabilitation et à améliorer leur efficacité. L'assainissement des entreprises publiques devrait, à terme, permettre également à ces entreprises de financer une part croissante de leurs investissements d'extension et de renouvellement, et de reprendre le service de leurs emprunts, présentement en partie assuré par l'État, donnant ainsi à ce dernier la possibilité d'alléger son budget de dépenses en capital. 2.33 Les dépenses en capital de l'État ont représenté 35 % de l'investissement fixe du pays en 1985, dont 25 % concernait l'investissement public direct, d'après les données de la comptabilité nationale et du budget. On retient l'hypothèse dans le scénario d'ajustement que ce rapport serait réduit à 33 % en 1987 et 32 % ensuite. Il en résulterait que les dépenses en capital de l'État diminueraient graduellement de 8 % du PIB total en 1985 à 6,3 en 1991 et 6,1 en 1996. L'extension de la projection jusqu'à 2001 (Chapitre III) indique que ce rapport pourrait remonter ensuite jusqu'à environ 6,5 - 7 % du PIB sans compromettre les équilibres financiers intérieur et extérieur, pour autant que les autres variables économiques et financières évoluent selon les hypothèses adoptées. Cette hypothèse de diminution relative des dépenses en capital de l'État n'implique pas qu'il faille réduire l'investissement public en termes réels pendant la période d'ajustement pour autant que les autres dépenses en capital, en particulier celles concernant le financement des entreprises publiques, puissent être compressées. Il faudra cependant procéder à des arbitrages difficiles dans le programme d'investissement public du Sixième Plan. Des projets à caractère social dont la rentabilité est très différée et qui contribuent à augmenter la consommation future devront être retardés. En revanche, la priorité devra être accordée aux projets publics ayant un impact rapide et puissant [PAGE 449] sur la production et l'exportation, notamment dans les secteurs des transports et de l'équipement, de l'infrastructure urbaine et rurale et l'enseignement technique et la formation professionnelle. D'une façon générale le dimensionnement des projets devra être très soigneusement considéré et leur rentabilité économique strictement évaluée de façon à maximiser l'allocation des ressources publiques. 2.34 Les principaux résultats du scénario d'ajustement budgétaire sous les hypothèses discutées dans les paragraphes ci-dessus sont résumés au tableau 29. Ce scénario vise essentiellement à indiquer de façon cohérente dans quelles conditions la chute des recettes pétrolières et le déficit budgétaire pourraient être maîtrisés sans compromettre la croissance future de l'économie. Avec les hypothèses retenues les besoins nets de financement de l'État seraient très élevés dès 1987. En 1987 et 1988 il est clair que l'État devra non seulement utiliser son épargne intérieure et extérieure mais aussi accroître l'emprunt extérieur et intérieur pour couvrir ses besoins de financement de l'État. Ces besoins diminueraient ensuite et pourraient normalement être couverts par l'emprunt extérieur. Il convient cependant de souligner qu'il s'agit-là de besoins nets de financement. Les dépenses en intérêt telles que projetées dans les dépenses courantes ne concernent que les emprunts des sources officielles passés et futurs les emprunts futurs étant projetés selon les tendances historiques. La couverture des besoins nets de financement de l'État nécessitera des montants croissants, mais raisonnables, d'engagements extérieurs (en plus de ceux déjà pris en compte dans la projection) pour couvrir également les charges récurrentes en amortissement et intérêt (voir chapitre III). L'État dispose évidemment d'un certain nombre d'alternatives au scénario décrit ci-dessus, bien que ce nombre soit limité. Il pourrait par exemple accroître la fiscalité plus qu'il n'est projeté afin de ralentir la progression de ses dépenses courantes dans une mesure moindre que celle envisagée ici. Il serait possible de réduire la taille de la fonction publique au lieu de se limiter à la stabiliser et, en contrepartie, de maintenir le niveau relatif des dépenses en capital. Ces alternatives, outre leurs implications politiques, auraient cependant de nombreux effets induits, immédiats ou à terme (paras. 2.20 - 2.22), qu'il convient d'évaluer avec soin avant d'opérer des choix. 2.35 C'est pourquoi la conception, la mise en œuvre et le suivi des mesures d'ajustement au plan budgétaire nécessiterait de renforcer les capacités institutionnelles et les instruments de prévision et de planification. Le secret placé sur les revenus du pétrole était peut-être justifié dans le passé, bien qu'il rendait difficile le travail des planificateurs (para. 1.42 et 1.50). Il ne l'est plus maintenant que les revenus diminuent et l'absence de toute mention de ce problème dans le document du Sixième Plan laisse perplexe. Pour maximiser l'utilisation des revenus du pétrole en baisse et préparer les mesures d'ajustement nécessaires, il convient en premier lieu de pouvoir programmer ces revenus dans le cadre de la préparation du budget et dans celui de la planification. Au niveau budgétaire la programmation des revenus du pétrole permettrait [PAGE 450] une meilleure programmation des investissements. Il serait également nécessaire de programmer de façon plus rigoureuse les dépenses récurrentes des investissements. Cette programmation pourrait se faire dans le cadre d'un budget analytique sans modifier la présentation du budget et les procédures officielles de budgétisation (Budget et comptes hors-budget). Ce budget analytique, à l'instar de l'analyse des finances publiques présentée dans ce rapport, intégrerait l'ensemble des recettes, y compris les recettes pétrolières, les dépenses courantes, l'épargne courante, les apports nets au titre des emprunts extérieurs (et intérieurs) et les dépenses en capital. Cette budgétisation analytique pourrait se faire dans le cadre d'un plan glissant de trois ans, qui indiquerait l'enveloppe dans laquelle seraient programmées les dépenses en capital et les dépenses courantes. Les dépenses en capital seraient déterminées sur la base de l'épargne courante, après programmation des dépenses courantes (elles-mêmes dérivées en partie des dépenses en capital de l'année précédente), et des apports nets au titre des emprunts. Ce type de programmation triennale glissante des investissements est déjà pratiquée dans certains pays d'Afrique de l'Ouest, tels que la Côte-d'Ivoire et le Sénégal, et s'est avéré très efficace pour améliorer la sélection et la budgétisation des investissements publics. Elle ne remettrait pas en cause la planification quinquennale traditionnelle puisqu'il s'agirait de programmer de façon rigoureuse, en tenant compte des ressources financières disponibles, des projets inscrits au Plan quinquennal. iii) Les politiques de production et de commerce extérieur 2.36 L'augmentation rapide des exportations non pétrolières, agricoles et industrielles va être vitale pour compenser la chute des revenus du pétrole à moyen terme. L'orientation de l'économie vers l'exportation est également essentielle pour créer de l'emploi et assurer le développement à long terme. La population du pays va passer de 10 millions actuellement à plus de 15 millions en l'an 2000 (para. 1.34). Si les tendances actuelles se poursuivaient, la plus grande part de cet accroissement concernera les zones urbaines (para. 1.37). Pour que le chômage ne s'étende pas dans les villes dans des proportions dramatiques il faudrait créer en moins de 15 ans 2 millions d'emplois en dehors de l'agriculture, en plus des quelques 830 000 emplois existant actuellement dans l'industrie, la construction et les services, y compris les quelque 400 000 emplois du secteur informel, et des quelque 150 000 emplois publics. Avec les hypothèses retenues dans le scénario d'ajustement, 900 000 à 1 million d'emplois, au mieux, pourraient être créés dans l'industrie et les services non administratifs, d'autant qu'il faudra compter avec les réductions d'emplois qui résulteront inévitablement de la réhabilitation/restructuration des entreprises publiques et du déclin du secteur pétrolier. Cet objectif de création d'emplois correspondrait à un taux de croissance de l'emploi de 5 % par an et à un taux de progrès de la productivité de 1,26 % par an (Tableau ci-dessous). Si les réformes proposées plus loin pour accroître l'efficacité de l'industrie portent leurs fruits, les progrès de la productivité seraient certainement [PAGE 451]
[PAGE 452] plus rapides et, par conséquent, la création d'emploi moindre, même avec le développement d'activités à forte intensité de main-d'œuvre. Le taux de croissance de 6,3 % par an en moyenne qui est projeté sur les quinze années 1987-2001 pour l'industrie, la construction et les services suppose que le développement de ces secteurs repose sur des activités orientées vers l'exportation, puisque la demande intérieure d'investissement et de consommation non alimentaire ne croîtrait qu'au rythme de 5,1 % par an pendant la même période. 2.37 L'autre million d'emploi devra, par conséquent, être créé dans l'agriculture et l'exploitation de la forêt pour freiner l'exode rural. Cet objectif n'est pas impossible, un taux de croissance moyen de 3,8 % de la valeur ajoutée agricole pouvant correspondre à un taux de croissance de l'emploi de 2,2 % et de 1,56 % pour la productivité. Puisque le rythme de croissance de la population rurale est évalué actuellement à environ un pour cent par an seulement, en raison de la migration vers les centres urbains des éléments les plus dynamiques de la main-d'œuvre, la réalisation du taux de croissance de l'emploi agricole proposé dans ce scénario non seulement freinerait l'exode rural mais susciterait aussi un retour à la terre. Très globalement, l'emploi pourrait évoluer comme suit, avec les hypothèses de croissance sectorielle retenues dans le scénario d'ajustement :
2.38 D'un point de vue théorique la stimulation d'une réponse de la production vers l'exportation nécessiterait une diminution relative des prix intérieurs par rapport aux prix extérieurs et une augmentation relative des prix des biens et services exportables par rapport à ceux des biens et services non exportables. Étant donné que l'appartenance du Cameroun à l'Union monétaire union qui comporte par ailleurs de [PAGE 453] nombreux avantages ne lui permet pas d'agir sur le taux de change, il lui faudra recourir à un ensemble de mesures dans les domaines des tarifs douaniers, de la fiscalité, de la politique de prix, de la politique de crédit et des finances publiques et à un ensemble d'incitations d'ordre économique et institutionnel pour obtenir les effets voulus sur le taux de change réel. 2.39 Le Cameroun dispose d'un potentiel de ressources important pour accroître ses exportations. Le potentiel agricole est riche et varié et 16 % seulement des terres sont actuellement utilisées à des fins agricoles. En plus du cacao et du café qui sont les deux produits d'exportation dominants et qui ont des perspectives de croissance, il y a un certain potentiel pour accroître les exportations de caoutchouc, de bananes, huile de palme, agrumes, thé et soja. A l'heure actuelle les perspectives du marché pour certaines de ces cultures (huile de palme, bananes, soja) ne sont pas favorables, mais le volume de leurs exportations étant présentement relativement modeste, le Cameroun devrait pouvoir conquérir une plus grande part du marché en suscitant une amélioration de la productivité et des qualités avec les incitations appropriées. Il existe aussi de bonnes possibilités pour accroître les exportations de produits vivriers, et de produits de l'élevage vers les pays voisins. D'autres produits, tel que le coton, qui ont actuellement de mauvaises perspectives à l'exportation, constituent des ressources à développer pour la transformation industrielle intérieure. A long terme la forêt devrait constituer une des ressources les plus importantes du Cameroun pour l'exportation. Le Cameroun possède en effet la plus vaste foret d'Afrique après le Zaïre et le Gabon avec des espèces riches et variées. 2.40 Les exportations industrielles du Cameroun sont actuellement modestes environ 110 millions de dollars en 1985, ou moins de 14 % du total des exportations de produits non pétroliers. Il existe de nombreuses possibilités d'expansion en particulier pour les industries basées sur les ressources locales : agro-industries et produits alimentaires transformation du bois et transformation de l'aluminium; et pour les industries à forte intensité de main-d'œuvre, telle que les textiles et la confection et certaines industries mécaniques et électriques, tels que le matériel agricole et la production des pièces détachées. Il y a également des possibilités de développement des industries de matériaux et matériels de construction pour le marché de l'UDEAC. A plus long terme, des ressources minérales importantes principalement bauxite et fer devraient pouvoir être exploitées si cela s'avère économique. Enfin, de par sa situation géographique et son niveau d'équipement relativement élevé pour les pays de la région, le Cameroun pourrait jouer son rôle important dans les activités de services, commerce et transports, pour la région équatoriale de l'Afrique. 2.41 Dans le scénario d'ajustement et d'orientation vers l'exportation, on a retenu les taux de croissance suivants pour les principales catégories d'exportations, en comparaison avec les taux de tendance du scénario de base entre parenthèses. [PAGE 454]
Ces taux indiquent en substance l'effort d'exportation qui serait nécessaire sur tous les fronts pour compenser la perte des revenus du pétrole, maintenir un taux de croissance de l'économie suffisant et réaliser l'équilibre de la balance commerciale à un horizon d'une douzaine d'années, en cohérence avec les autres variables économiques et financières, tout en reflétant ce qui semble être potentiellement réalisable dans chacun des secteurs si l'ensemble des incitations nécessaires est mis en place. Une réponse de la production pour l'exportation pourrait être obtenue relativement rapidement dans l'agriculture et l'industrie manufacturière. Il faudra par contre plusieurs années pour réaliser une augmentation substantielle des exportations de bois et développer les ressources minières étant donné les infrastructures à mettre en place et les investissements à réaliser[22]. Agriculture 2.42 Pour relancer les productions caféière et cacaoyère, une mesure indispensable serait d'offrir aux paysans des prix les plus attractifs possibles, autant pour stimuler les productions annuelles que pour susciter un rythme de plantation très élevé. L'expérience du Cameroun et d'autres pays tels que la Côte-d'Ivoire a montré de façon indiscutable combien la production et le rythme de plantation sont sensibles aux incitations de prix. Étant donné la nécessité impérative pour le Cameroun [PAGE 455] d'augmenter ses exportations et de créer de l'emploi dans l'agriculture, il s'agit d'opérer un changement radical de philosophie : les cultures d'exportation ne doivent plus être considérées comme une source de revenu pour l'État mais comme des activités économiques prioritaires qu'il convient de stimuler par tous les moyens. Le rôle de stabilisation des prix imparti à l'ONCPB et qu'il n'a jamais rempli jusqu'à présent devrait être réaffirmé. A titre transitoire, il conviendrait de mettre en place une formule qui permettrait de relever en l'espace de deux ou trois ans la part des producteurs dans le prix FOB (para. 1.16) après déduction des coûts de transport et de commercialisation, à un niveau qui laisserait à l'ONCPB une marge raisonnable pour assurer son rôle de compensation en cas de chute des cours extérieurs. La formule retenue devrait être transparente, de façon à permettre un producteur de prévoir son revenu à l'avance pour un cours mondial donné. Le système des ristournes ne permet pas cette transparence et est administrativement lourd et coûteux. Les prix de ceux des autres produits exportables qui sont contrôlés, tels que le caoutchouc, le coton et l'huile de palme devraient être libérés. En même temps il conviendrait évidemment d'éliminer toutes taxes à l'exportation de subventions à l'exportation. Dans une seconde étape, il conviendrait d'étudier l'introduction de subventions à l'exportation pour certaines cultures de rente, autres que le café et le cacao, de façon à compenser la surévaluation éventuelle du taux de change réel lorsqu'il s'avérerait nécessaire de stimuler l'exploitation d'un avantage comparatif dans le long terme et donner aux agriculteurs le même niveau de protection effective que dans l'industrie (para. 2.54). 2.43 Consécutivement à l'augmentation des prix aux producteurs il serait souhaitable de procéder à l'élimination de la plupart des subventions aux intrants qui sont sources de pénuries ou de gaspillages, en laissant les producteurs gérer leur consommation d'intrants comme ils l'entendent. En même temps, la mise en œuvre des recommandations des Ve et VIe Plans concernant le renforcement du rôle des coopératives et du secteur privé dans la distribution des intrants devrait être accélérée. 2.44 A l'instar du sous-secteur des produits vivriers où la commercialisation par le secteur privé s'est révélée très efficace, il serait nécessaire de déréglementer, et de donner au secteur privé et aux coopératives un très large rôle dans la commercialisation des cultures de rente. En même temps il serait opportun d'appliquer les propositions du Ve Plan sur la « défonctionnarisation » et l'autonomie des coopératives et la création d'Unions de coopératives, ainsi que sur le renforcement de la formation des coopérateurs et de la capacité de suvi a posteriori de la Direction de la coopération et de la mutualité du Ministère. 2.45 En plus des incitations par les prix et la liberté d'entreprise, le développement de l'infrastructure rurale (pistes rurales, approvisionnement en eau et énergie, télécommunications, équipements de stockage, équipements sociaux) et l'amélioration des conditions de vie des populations [PAGE 456] rurales seront déterminants pour fixer les populations, particulièrement les jeunes, dans les zones rurales, attirer des jeunes agronomes ou techniciens agricoles formés vers l'exploitation agricole et soutenir la production et la commercialisation. A cet égard, le sixième Plan contient un programme important pour le développement d'exploitations de taille moyenne dans plusieurs régions. L'infrastructure rurale, y compris les villes et les villages qui desservent les zones rurales, devra constituer un secteur hautement prioritaire du programme d'investissements publics. Il conviendrait de définir une stratégie permettant d'accroître la capacité de fonctionnement des services techniques et financiers des communes afin de permettre non seulement une urbanisation rationnelle (para. 1.37) mais également un soutien à la vie économique du milieu rural. Il conviendrait également que l'amélioration du cadre de vie dans les villages fasse l'objet d'un ensemble d'incitations fiscales ainsi que d'apports financiers de l'État dans le cadre de contrats avec des groupements d'agriculteurs qui créeraient des plantations, ou avec des communautés villageoises. Le financement par l'État de travaux d'amélioration du cadre de vie convenus avec les détenteurs traditionnels de terres pourrait par ailleurs constituer un moyen efficace pour résoudre les problèmes fonciers que soulèvent la libération de ces terres pour de nouvelles plantations. 2.46 A cet égard, le VIe Plan fait référence aux problèmes fonciers et à l'accès au crédit. La traduction de ces références en actions devient maintenant impérative. En ce qui concerne le crédit agricole, le rapport sur le secteur financier et les études en cours concluent à la nécessité d'améliorer l'efficacité du FONADER et d'accroître la marge des coopératives, de favoriser le développement des organismes de crédit mutuel et des caisses populaires en leur apportant éventuellement de l'assistance technique, d'associer l'offre de crédit à la diffusion du progrès technologique et surtout de développer l'infrastructure de services financiers dans les zones rurales. Cependant, le crédit agricole sera toujours difficile et coûteux et c'est plus par une politique de prix au producteur rémunérateur que par le crédit subventionné qu'on pourra augmenter les ressources du secteur agricole. 2.47 En plus de ces mesures d'incitations directes, d'autres réformes ou actions au niveau du soutien institutionnel à l'agriculture, dont, pour la plupart, le principe a déjà été décidé par le Gouvernement, s'imposent d'urgence, en particulier : i) l'établissement d'un cadre institutionnel régional qui vise à la décentralisation des décisions, une meilleure utilisation des ressources financières; et humaines, l'intensification de la coordination intersectorielle au niveau provincial et la participation des agriculteurs; ii) la réorganisation interne du Ministère, en particulier pour renforcer la conception et la diffusion de modèles d'exploitation agricole économiquement et techniquement viables et la programmation de la recherche agronomique; iii) la réorganisation des organismes chargés de la mécanisation (CENEEMA) et du crédit agricole (FONADER); iv) la création de structures de prévulgarisation et la révision des programmes de recherche agronomique de façon à mieux [PAGE 457] répondre aux besoins du secteur agricole, en particulier concernant le progrès technologique et l'amélioration des qualités; v) la rationalisation de la tutelle des sociétés de développement et des sociétés étatiques d'exploitation; vi) l'amélioration des procédures budgétaires et l'établissement d'un plan glissant pour les investissements dans le secteur agricole; et vii) le réaménagement du système et des méthodes de vulgarisation. 2.48 A long terme c'est l'exploitation des forêts qui pourrait devenir l'une des principales sources de devises, avec le café et le cacao. Pour atteindre cet objectif il serait nécessaire de mettre en œuvre un programme d'actions en profondeur aux niveaux institutionnel, juridique, technique, économique et commercial. Les principales de ces actions consisteraient à i) renforcer considérablement la capacité d'analyse et de gestion du secteur forestier au Ministère de l'Agriculture et sur le terrain; ii) rationaliser la législation du secteur forestier et des concessions en mettant en œuvre les propositions qui ont été faites par une équipe de consultants; iii) effectuer un répertoire des concessions et des moyens de transport et préparer un plan directeur des infrastructures à mettre en place; iv) réexaminer la politique de prix aux stades de l'exploitation et de la transformation (comme pour l'ensemble de l'industrie); v) améliorer l'efficacité des procédures de distribution des titres d'exploitation; vi) faire effectuer des études de marché par des consultants spécialisés et en diffuser les résultats aux investisseurs potentiels; vii) rechercher des partenaires étrangers et former un organisme unique pour négocier avec eux; viii) offrir à ces partenaires des incitations fiscales efficaces, et qui tendent à encourager la transformation du bois sur place; ix) définir une politique de reforestation et la faire mettre en œuvre par la Direction des forêts et l'ONAREF; et x) faire participer les collectivités locales à la gestion forestière et susciter la création d'activités de forestrie communautaire et d'agro-forestrie. Il convient de souligner que pour développer ce secteur il serait essentiel de faire appel à des partenaires étrangers, non seulement pour bénéficier de leur capital et leur expérience technique et opérationnelle mais surtout pour avoir accès dans les meilleures conditions aux marchés extérieurs. Industrie 2.49 Les taux de croissance projetés pour les exportations manufacturières paraissent élevés, mais étant donné le niveau relativement faible des exportations à l'année de base ils constituent des objectifs tout à fait réalisables pour autant que le cadre d'incitations nécessaire soit mis en place. Ils impliquent en effet que la part exportée de la production manufacturière passe de 5 % (à l'exclusion de l'aluminium) en 1985 à 9,0 % en 1996, ce qui est modeste. Les projections du scénario d'ajustement supposent également qu'une partie de développement de l'industrie manufacturière continuera à se faire pour la substitution des importations, ce qui aurait des effets tout aussi positifs sur la balance des paiements pour autant que ces activités soient efficaces c'est-à-dire [PAGE 458] que leur coût en ressources intérieures soit inférieur aux recettes nettes en devises qu'elles produisent). Qu'il s'agisse d'exportation ou de substitution à l'importation le cadre général d'incitations doit viser à favoriser le développement d'industries efficaces et compétitives et qui aient un avantage comparatif certain. La production à l'exportation nécessite en outre des incitations additionnelles qui permettent aux exportateurs de concourir sur les marchés extérieurs dans les mêmes conditions que leurs concurrents d'autres pays. 2.50 Il ressort des propositions du Sixième Plan que le Gouvernement entend désormais limiter les interventions directes de l'État dans le développement industriel et laisser aux forces du marché le soin de susciter et d'orienter les choix d'investissement du secteur privé. L'État n'interviendrait plus directement que de façon très sélective, en engageant ses ressources temporairement lorsque le secteur privé ne se manifesterait pas pour exploiter une opportunité d'investissement confirmée. Cette politique implique que la mission de la Direction de l'Industrie du Ministère de l'Industrie et du Commerce soit redéfinie de façon à ce que cet organe se concentre sur la préparation des réformes nécessaires et sur leur mise en œuvre, sur les activités de soutien indirect et de promotion de l'industrie et sur la préparation exclusive des projets dans lesquels il y aurait une participation de l'État. 2.51 La mise en place d'un cadre d'incitations qui permette aux industries existantes d'augmenter leur efficacité et qui favorise l'investissement dans des activités nouvelles ayant un avantage comparatif et orientées vers l'exportation, nécessiterait des réformes aux plans de la protection douanière, de la politique de prix, de la fiscalité, des conditions de l'investissement, de la politique de crédit et du soutien institutionnel. Concernant la protection douanière, il conviendrait d'éliminer progressivement la protection non tarifaire (licences d'importations) qui, en assurant une protection excessive, sinon absolue, à certaines entreprises, a entraîné le développement d'industries inefficaces. Cette protection non tarifaire pourrait être remplacée le cas échéant par des surtaxes dégressives dans le temps pour permettre aux industries existantes de se restructurer et d'accroître leur efficacité. D'une façon générale les restrictions directes aux importations empêchent aux prix de jouer le rôle moteur qui leur revient dans l'allocation des ressources. Lorsqu'une protection temporaire est jugée nécessaire, dans le cas par exemple d'une industrie naissante, il vaut mieux l'octroyer par un droit d'entrée, qui est ajustable, plutôt que par des restrictions quantitatives. 2.52 Les taux de protection tarifaire, qui sont basés sur des droits d'entrée communs à l'UDEAC et des taxes complémentaires nationales, sont très inégaux selon les produits. Pour assurer le développement des industries efficaces il serait essentiel d'harmoniser les taux de protection effective (protection calculée sur la valeur ajoutée en tenant compte du taux de change réel) pour toutes les branches de l'industrie manufacturière. Là encore il faudrait bien entendu opérer graduellement et par étapes pour ne pas soumettre l'industrie existante à des [PAGE 459] chocs trop brutaux. L'harmonisation des taux de protection effective n'impliquerait pas nécessairement une réduction du degré moyen de protection. Il serait même souhaitable de relever la protection effective moyenne sur certaines catégories de biens (biens intermédiaires et biens de consommation) (para. 2.24). Une étude des tarifs avait été faite par la BIRD au Cameroun en 1980; il serait opportun de l'actualiser pour préparer cette réforme tarifaire. 2.53 En liaison avec la réforme tarifaire, il serait essentiel d'établir un régime de liberté des prix. Tel qu'il est conçu, le système de contrôle des prix fausse complètement le rôle économique des prix et est la source de complications qui constituent une « désincitation » à la production et à l'investissement. En accordant des marges bénéficiaires identiques (calculées par rapport au chiffre d'affaires) à toutes les activités, le système en cours ne peut pas stimuler les entreprises à réduire leurs coûts et augmenter leur efficacité et ignore la nécessité pour les entreprises de dégager des marges brutes qui correspondent aux poids respectifs de leurs facteurs de production. Par ailleurs ce système donne lieu à des procédures administratives lourdes et complexes qui entraînent des retards considérables dans l'ajustement des prix aux changements dans les coûts de production, donc des pertes pour les entreprises, et sont la source de frustrations et de frais supplémentaires. La libéralisation des prix devra être effectuée par étapes en fonction du jeu de la concurrence intérieure, ou de celle des importations qui sera permise par la réforme tarifaire. Dans les rares cas où il serait nécessaire de maintenir un contrôle de prix pour des activités en situation de monopole, parce qu'elles disposent d'une protection naturelle, du fait de coût de transports élevés par exemple, il serait souhaitable que ce contrôle intervienne a posteriori et non pas a priori. Au plan fiscal, il serait souhaitable d'accélérer les études sur l'introduction d'une taxe à la valeur ajoutée en remplacement de la taxe à la production. L'administration d'une taxe à la valeur ajoutée est évidemment plus complexe car elle nécessite que les entreprises aient une bonne comptabilité, mais la TVA a l'avantage de tenir compte des facteurs de production, donc d'être équitable, et d'être neutre vis-à-vis de la protection. 2.54 A l'instar des pays qui ont adopté une politique active d'exportation il serait essentiel de mettre en place un système efficace d'incitations aux exportations manufacturières. Il faudrait en premier lieu éliminer toutes les taxes à l'exportation qui pourraient encore exister. Les exportateurs devraient, comme cela se fait couramment, bénéficier de l'exonération des droits d'entrée et des taxes complémentaires sur la part de leurs importations de biens intermédiaires qui est transformée pour l'exportation. L'administration de ces exemptions étant cependant complexe, il pourrait être envisagé de les remplacer par une subvention directe aux exportations (voir ci-dessous), en particulier dans le cas des petites et moyennes entreprises n'ayant pas une comptabilité analytique très développée. D'autres avantages, tels qu'une exonération complète ou partielle de l'impôt sur les bénéfices réalisés à l'exportation, devraient être introduits. Il faudrait cependant, dans tous les cas, [PAGE 460] moduler ces avantages en proportion de la valeur ajoutée à l'exportation (recettes nettes en devises, après déduction des consommations intermédiaires importées et de l'amortissement des équipements importés), afin d'encourager les entreprises contribuant de façon substantielle à la balance des paiements, en particulier celles dont l'activité est basée sur des biens intermédiaires d'origine intérieure, ou est à forte intensité de main-d'œuvre. Il serait préférable cependant d'étudier l'introduction d'un avantage unique consistant de subventions directes à l'exportation, qui seraient calculées de façon à compenser la protection effective. Le coût pour l'État de telles subventions serait largement compensé par la contribution positive des entreprises exportatrices à la balance des paiements du pays et par le surcroît d'activité économique, donc d'assiette fiscale, que généreraient directement et indirectement ces entreprises. Enfin, quelque soit la nature exacte des incitations fiscales qui seraient adoptées, il est indispensable que ces incitations soient uniformes pour tous les exportateurs et automatiques. 2.55 Au plan institutionnel, il serait très utile de renforcer le Centre National du Cameroun Extérieur avec la participation du secteur privé pour établir des relations avec les partenaires étrangers, faire connaître les produits camerounais sur les foires internationales et conduire des études de réglementation dans les pays clients et des études de marché, et en diffuser les résultats. Il faudra également mettre en place un bureau de contrôle des qualités et des standards et, en temps opportun, introduire un système d'assurance et de crédit à l'exportation. Toutefois, c'est l'investissement étranger qui sera la clé de toute expansion vers l'exportation, étant donné l'importance de l'apport des entreprises étrangères établies en savoir-faire et pour l'accès aux marchés extérieurs, en plus de leurs ressources financières. Transports 2.56 D'importantes ressources ont été consacrées à l'extension de l'infrastructure des transports dans la dernière décennie. Maintenant, les priorités devraient davantage porter sur la réhabilitation et l'entretien de l'infrastructure existante et sur la mise en œuvre d'une politique d'exploitation et d'entretien qui réduirait dans le long terme les coûts de transport et minimiserait les dépenses globales d'entretien et de réhabilitation périodique. En même temps une attention particulière devrait être donnée à la réduction des coûts en devises de l'entretien et du développement de l'infrastructure de transports. 2.57 Un certain nombre de mesures devraient être mises en œuvre pour atteindre ces objectifs. En premier lieu la part des ressources consacrées à la réhabilitation et l'entretien du réseau routier, qui constitue le mode de transport le plus important au Cameroun, devrait être accrue dans les ressources affectées à l'ensemble de l'infrastructure transports. En particulier, il serait essentiel d'améliorer l'entretien des réseaux de routes de collecte et de routes secondaires pour soutenir le développement rural et l'expansion des secteurs agricole et forestier, en utilisant plus largement les capacités des entreprises du secteur privé. En ce qui [PAGE 461] concerne les transports ferroviaires et aériens il serait important d'améliorer la rentabilité des entreprises publiques de ces secteurs de façon à ce qu'elles puissent autofinancer une part accrue de leurs investissements futurs, réduisant d'autant les charges de l'État. Ces entreprises devraient par conséquent être soumises à l'examen de la Mission de réhabilitation des entreprises publiques. En ce qui concerne la coordination intermodale, il serait souhaitable de réviser la fiscalité pour la rendre équitable entre les différents modes de transports. Enfin, pour réduire le coût en devises du développement et de l'entretien de l'infrastructure de transports il serait nécessaire de diversifier les capacités de réalisation et d'encourager le développement d'entreprises de travaux et de bureaux d'études nationaux. iv) Le cadre d'incitations à l'investissement et l'intermédiation financière 2.58 Avec la diminution des ressources financières de l'État, le secteur privé va devoir générer une plus grande part de l'investissement du pays. Il va donc falloir stimuler activement la mobilisation de l'épargne nationale et son investissement dans des activités productives, en particulier l'agriculture et la PME. Un recours accru à l'investissement étranger direct serait également essentiel, tant en raison de l'insuffisance de l'épargne nationale que pour bénéficier du savoir-faire indispensable au développement d'activités efficaces dans l'industrie. Par rapport à beaucoup d'autres pays, le Cameroun dispose déjà d'atouts importants pour attirer l'investissement étranger : une population industrieuse, la bonne réputation acquise par sa gestion économique et financière prudente, son appartenance à une zone monétaire qui assure une relative stabilité à sa monnaie et la libre convertibilité de celle-ci, son accès à la mer et une infrastructure portuaire importante, et un cadre juridique favorisant la création d'entreprises et les transactions commerciales. Il suffit de compléter ces atouts par des incitations aussi favorables que celles offertes par les autres pays ouverts à l'investissement étranger et, surtout, un cadre administratif et de réglementation qui le facilite. 2.59 A cet égard, il est généralement reconnu que les réglementations administratives et fiscales au Cameroun sont très contraignantes pour l'entreprise et que les procédures administratives y sont particulièrement lourdes. On a parlé du contrôle des prix (para. 2.53) qui ne contribue certainement pas à stimuler même les investissements les plus motivés. Il serait essentiel pour relancer l'investissement privé, national et étranger, de réexaminer l'ensemble des réglementations sur l'entreprise, les salaires, l'emploi, le commerce intérieur et extérieur, etc. pour les réduire et les simplifier de façon à faciliter au maximum l'activité économique et éviter que les retards mis par l'administration à prendre des décisions ne paralyse pas les entreprises, comme c'est souvent le cas actuellement. 2.60 Le Code des investissements a été révisé en 1984 (para. 1.24). Il conviendrait de la réexaminer pour voir si ses dispositions ne risquent [PAGE 462] pas d'entraîner de distorsions dans l'allocation des ressources, si les avantages fiscaux accordés sont aussi attractifs que ceux offerts par d'autres pays qui sont en compétition avec le Cameroun pour attirer l'investissement étranger et si ces avantages sont accordés avec l'automaticité qui est indispensable. En particulier, le principal critère d'éligibilité aux avantages du Code devrait être celui de la rentabilité économique des projets et non pas le montant de l'investissement. Les avantages fiscaux devraient porter plus sur l'impôt sur les bénéfices et les autres taxes liées à la valeur ajoutée que sur les droits de douane sur les équipements importés afin qu'ils aient un effet neutre sur l'intensité relative en capital et en main-d'œuvre des projets proposés. Les avantages ne devraient pas être accordés pour des périodes trop longues et il vaudrait mieux éviter les discriminations en faveur des grands projets. Enfin, on pourrait envisager d'inclure dans le Code les avantages spécifiques qui seraient accordés aux industries exportatrices (para. 2.54). 2.61 En ce qui concerne la promotion de l'investissement, il serait préférable, comme l'ont fait beaucoup d'autres pays, de confier les fonctions de promotion à un organisme autonome tel que la Chambre de Commerce, qui pourrait être mixte (participation publique et privée), mais qui serait géré comme une entreprise privée. Cet organisme pourrait reprendre une partie des responsabilités de promotion du Ministère de l'Industrie et du Commerce, en particulier pour les études sous-sectorielles et les études de marché. Il serait équipé pour fournir une assistance technique aux entreprises et aux promoteurs de projet et servirait d'intermédiaire pour mettre au rapport des investisseurs nationaux avec des partenaires étrangers. Il aiderait les investisseurs dans les démarches administratives nécessaires à leur implantation. 2.62 Étant donné leur importance pour l'expansion du tissu industriel et la création d'emplois, le Gouvernement a décidé la mise en #339;uvre d'une politique active de soutien au développement des petites et moyennes entreprises (paras. 1.23-1.24). La contribution des PME aux exportations manufacturières est actuellement minime, mais elle pourrait devenir appréciable. Beaucoup de PME connaissent des difficultés en raison du manque d'expérience de leurs dirigeants sur les plans techniques, de la gestion de la production et de la gestion financière et de la commercialisation. Il conviendrait de « défonctionnariser » le Centre d'assistance aux PME (CAPME) et de le renforcer avec des ingénieurs et des gestionnaires ayant une longue expérience de l'entreprise pour lui permettre, en plus de ses activités existantes consistant à faciliter l'accès des entreprises au crédit et au Code des investissements et à faire de la formation, d'apporter une assistance directe de gestion aux PME qui en feraient la demande et aider de nouveaux entrepreneurs à préparer et mettre en œuvre leurs projets. Après transformation, le CAPME pourrait être utilement intégré à l'organisme de promotion de l'investissement (para. 2.61). En même temps l'unité chargée des PME au Ministère de l'Industrie et du Commerce pourrait entreprendre un examen systématique des réglementations, telles que celles [PAGE 463] sur la passation des marchés publics, et des incitations existantes pour voir dans quelle mesure elles ne défavorisent pas les PME. A cet égard, il conviendrait d'examiner si les avantages du nouveau Code des investissements en faveur de la PME sont suffisamment stimulants. Les problèmes et les conditions d'exploitation des petites industries sont en effet très différents de ceux des grandes entreprises et des incitations particulières pourraient s'avérer nécessaires, telles que des subventions à la formation et au perfectionnement professionnel et des subventions aux coûts de transport pour l'exportation. Enfin il conviendrait d'améliorer l'efficacité du FOGAPE (para. 1.24) et de bien délimiter les rôles respectifs de l'organisme d'assistance aux PME et du FOGAPE, en concentrant ce dernier organisme sur les questions de crédit et de financement des PME. Le succès du FOGAPE dépendra toutefois de l'amélioration de l'ensemble du système financier (para. 2.64). 2.63 L'insuffisance des infrastructures et le manque de personnel qualifié, de techniciens et de gestionnaires constituent des contraintes sévères au développement industriel. Il n'est pas dans l'objet de ce rapport d'aborder les problèmes de l'éducation, mais il convient de souligner que le développement industriel futur du Cameroun dépendra dans une large mesure d'une réorientation fondamentale du système d'éducation en faveur de la formation professionnelle, de l'enseignement technique et des disciplines scientifiques au détriment des disciplines classiques et littéraires. En ce qui concerne l'infrastructure, les programmes d'investissement public devront continuer à donner la priorité au développement urbain et aux transports et télécommunications, en coordination avec le développement industriel, tant pour les nouveaux projets que pour la réhabilitation et l'entretien des équipements existants. 2.64 Le développement de l'intermédiation financière et le renforcement du secteur financier vont être déterminants pour accroître la mobilisation de l'épargne nationale et sa transformation pour le financement des activités productives, et pour améliorer le financement de l'économie en général. Le Rapport sur le Secteur Financier (Rapport No 6028-CM, 2 juin 1986) présente une analyse approfondie du secteur, dont il se dégage les recommandations suivantes, parmi d'autres :
(ii) Politique du taux d'intérêt et de crédit. Les actions importantes consisteraient à a) aligner la structure et le niveau des taux [PAGE 464] d'intérêt sur les taux extérieurs; b) abolir la distinction faite par la BEAC entre les prêts réescomptables et non réescomptables, et mettre en place un système d'encadrement du crédit; c) appliquer le quotient de réserve obligatoire, dont le principe avait été adopté en 1977 mais qui n'a pas encore été appliqué, de façon compatible avec le système d'encadrement du crédit; et d) abolir graduellement les taxes sur les instruments financiers (TDC, ICAI et TPCRM) qui ne contribuent pas à favoriser l'intermédiation financière. (iii) Développement du marché financier. Il conviendrait d'étudier la création d'instruments tels que des Bons du Trésor, des émissions d'obligations par les banques et les grandes entreprises et la vente dans le public d'actions des entreprises publiques. A cet égard, le Gouvernement a récemment entrepris de faire étudier la création de Fonds de placement. Le rapport suggère également la création d'un Fonds de gestion de l'épargne nationale. Le nouveau fonds serait un intermédiaire financier non bancaire polyvalent qui pourrait être dirigé par un conseil d'administration, comprenant les Ministres des Finances et du Plan et le Gouverneur de la BEAC. Le Fonds ferait appel aux ressources financières des organismes publics à excédent de liquidités, tels que l'ONCPB et la CNPS, ainsi qu'à celles de certaines institutions privées, telles que les compagnies d'assurances, pour les transformer en ressources à terme en accordant des prêts à long terme aux banques commerciales. Il ferait également office de marché secondaire, en particulier pour les opérations relevant de la SNI. v) Conlusions 2.65 Les résultats du scénario d'ajustement construit sur les hypothèses discutées dans les sections qui précèdent sont résumés aux tableaux 30 et 31. Ils indiquent que le Cameroun pourrait absorber une baisse rapide des revenus du pétrole sans à coups excessifs sur la consommation et l'investissement tout en maintenant la croissance au niveau nécessaire pour créer des emplois en nombre suffisant et en n'ayant que modérément recours à l'emprunt extérieur, pour autant que les politiques requises soient mises en #339;uvre activement. 2.66 Dans ce scénario, la croissance du PIB non pétrolier serait inférieure de deux points en moyenne pendant la période 1987-91 et de un point durant 1992-96 par rapport au scénario de base. L'évolution des différents secteurs serait la suivante :
(en millions de dollars à prix courants) [PAGE 468] Le taux d'investissement fixe par rapport au PIB serait graduellement réduit jusqu'à 19,0 % en 1991 et resterait à ce niveau jusqu'en 1996. Ce taux est à comparer à celui de 18,9 % qui a été réalisé dans les années 1973-78 avant l'apparition du pétrole. En dépit de la diminution du taux d'investissement fixe, le coefficient marginal de capital implicite de la projection serait plus élevé que dans le scénario de base pour la période 1987-91 à cause du ralentissement marqué de la croissance. Le total des investissements fixes serait dans ce scénario de quelque 4 200 milliards de FCFA aux prix de 1984 pour la période du Sixième Plan contre 4 800 milliards dans le scénario de base. 2.67 Une part croissante de la production serait exportée et la croissance de la consommation serait réduite de deux points environ par rapport au scénario de base. Avec les effets conjugués de la réduction de l'investissement, dont le contenu d'importations est élevé, et du ralentissement de la croissance, la demande d'importation serait fortement compressée pendant la période 1987-91, sous les mêmes hypothèses sectorielles d'élasticité que dans le scénario de base. L'élasticité globale des importations par rapport au PIB ne serait que de 0,15 pendant la période d'ajustement en raison de la réduction de l'investissement. Elle remonterait à 1,08 ensuite, du fait de la reprise de l'investissement et de la nécessité d'importer des quantités croissantes de pétrole pour couvrir la consommation intérieure à partir de 1994-95. Le taux d'épargne intérieure, ajusté de l'effet des termes de l'échange, ne tomberait qu'à quelque 19,4 % du PIB en 1991 contre 17,9 dans le scénario de base. L'investissement étant moins élevé, il pourrait être couvert à raison de 98 % en moyenne par l'épargne intérieure sur les cinq années 1987-91. Le déficit courant de la balance des paiements pourrait être maintenu entre 400 et 500 millions de dollars par an sur toute la période de la projection diminuant d'une pointe à 3 % du PIB en 1989 à 2,4 % en 1996[23] et pourrait être financé par l'emprunt extérieur sans endettement excessif dans le long terme, pour autant qu'une stratégie d'emprunt prudente soit suivie (chapitre III). 2.68 En ce qui concerne le compte de capital, les engagements en emprunts des sources officielles bilatérales et multilatérales ont été projetés au même niveau relativement conservateur que dans le scénario de base. Ce point est discuté au Chapitre III. Cependant certaines autres variables ont été modifiées pour simuler l'effet des différentes mesures discutées ci-dessus. Par rapport au scénario de base, les engagements en emprunts privés et les mouvements de capitaux au titres des investissements directs ont été accrus, en supposant une augmentation de l'investissement étranger, ainsi que les flux des capitaux monétaires, en réponse aux changements qui seraient introduits dans la politique de taux d'intérêt. Sous ces hypothèses, les besoins additionnels nets de [PAGE 469] financement extérieur croîtraient jusqu'à environ 200 millions de dollars en 1991 et diminueraient ensuite. 2.69 Il convient de souligner que cette projection ne constitue qu'une simulation cohérente, pour des variables extérieures données, des effets d'un ensemble de politiques visant à réduire la contrainte financière à un niveau supportable, sans compromettre le développement du pays et la création d'emplois à long terme et sans réduire la consommation à des niveaux qui seraient socialement contraignants. Une telle projection est évidemment très sensible aux hypothèses d'évolution des cours mondiaux et de l'inflation internationale. Si les conditions des marchés mondiaux et les prix des matières premières exportées par le Cameroun, en particulier pour le cacao et le café, évoluaient de façon moins favorable que projeté ici, il en résulterait des déficit extérieurs plus élevés que ceux anticipés dans ce scénario et, en conséquence, la nécessité de renforcer ou de varier les politiques d'ajustement. Des résultats similaires pourraient être atteints par des voies différentes, par exemple en réduisant la croissance de la consommation publique et privée plus qu'il n'est projeté, et moins celle de l'investissement. Il y a cependant des limites physiques à la croissance des exportations, même avec des politiques d'incitations optimales, ainsi que des contraintes sociales sur les niveaux de consommation et d'investissement qui limiteront étroitement la marge de manœuvre des autorités pour cette période d'ajustement.
2.70 Il est évident que toutes les réformes et actions énumérées dans ce chapitre, aussi bien celles déjà décidées par le Gouvernement dans le cadre des Cinquième et Sixième Plans que celles qui sont proposées pour répondre à la chute des recettes du pétrole ne peuvent pas être entreprises en même temps. D'une part il faudra compter avec la capacité de conception et d'exécution des services ministériels; d'autre part il ne faudrait pas bouleverser trop rapidement les structures de l'économie. Il est difficile d'établir des ordres de priorités et un calendrier dans le temps. Il semble cependant que les réformes et actions les plus urgentes seraient les suivantes :
la recapitalisation des banques et la révision de la politique de taux d'intérêt et de crédit (y compris la révision de la taxation sur le crédit); le démarrage du programme de réhabilitation des entreprises publiques (para. 2.29); la réforme des incitations pour les cultures d'exportation (paras. 2.42 - 2.44); et les actions pour développer le secteur forestier (para. 2.48). En ce qui concerne l'industrie et l'investissement il conviendrait d'agir dans l'ordre suivant :
instauration des incitations à l'exportation (para. 2.54) renforcement du cadre d'incitations à l'investissement (paras. 2.59-2.61); abolition de la protection non tarifaire, et élimination graduelle du contrôle des prix (paras. 2.51 et 2.53); et réforme des tarifs douaniers et taxes complémentaires pour uniformiser la protection effective pour les sous-secteurs (para. 2.52). 2.71 Pour préparer les mesures d'ajustement, en particulier les mesures concernant les finances publiques, le secteur financier et les incitations à l'industrie et à l'investissement, il serait souhaitable de constituer un groupe de coordination qui réunirait des responsables du Ministère des Finances, du Ministère du Plan, et du Ministère du Commerce et de l'Industrie. Ceci permettrait d'assurer la conciliation des impératifs financiers et des objectifs économiques. Le modèle d'équilibre général (MEGC) dont dispose le Ministère du Plan pourrait être utilisé pour tester certaines des mesures envisagées. 2.72 Enfin, au niveau de la planification, la préparation et le suivi d'un programme d'ajustement nécessiteraient une série d'actions, en particulier :
(ii) une meilleure évaluation des données sur le secteur pétrolier et leur complète intégration dans les comptes nationaux et les comptes extérieurs; (iii) la prise en compte des prévisions concernant le secteur pétrolier dans les prévisions économiques et financières à moyen terme et la détermination des enveloppes d'investissement; (iv) l'utilisation (en plus du MEGC) de modèles simples, tels que le RMSM (para. 2.8) pour évaluer, en autres variables, les [PAGE 471] niveaux d'investissement compatibles avec les contraintes financières extérieure et intérieure, programmer les besoins globaux en emprunts extérieurs du point de vue de la balance des paiements et des finances publiques et établir une stratégie d'emprunt extérieur; (v) le renforcement du plan d'investissements en établissant des ordres de priorité dans les programmes de projets publics, y compris les projets de réhabilitation et de renouvellement, sur la base de critères tels que la rentabilité économique et la coordination inter-sectorielle des projets et leur degré de préparation; ceci pourrait être réalisé dans le cadre d'un programme triennal d'investissement glissant (para 2.35); et (vi) l'évaluation systématique des coûts récurrents des projets. III. UNE STRATÉGIE D'EMPRUNT EXTÉRIEUR A. Introduction 3.1 Même en introduisant les mesures d'ajustement et de stimulation des exportations discutée; au chapitre III le Cameroun aura encore à faire face à des besoins de financement extérieur relativement importants. L'objectif de l'analyse qui suit est de définir les principes d'une stratégie d'emprunt extérieur qui permette de minimiser la charge du service de la dette dans le long terme et de limiter les risques inhérents aux fluctuations des taux d'intérêt, des recettes d'exportations et des taux de change. Le Cameroun peut emprunter auprès des sources bilatérales, des sources multilatérales et des banques commerciales soit directement, soit sous la forme de crédits à l'exportation[24]. A partir du scénario d'ajustement (A) on a étudié à l'aide du modèle (para. 2.8) l'impact de différentes combinaisons d'emprunt selon différentes sources et selon différents termes sur i) les montants récurrents d'emprunt nécessaires pour financer un déficit extérieur donné et assurer le service des dettes antérieures et ii) la charge relative du service de ces emprunts [PAGE 472] dans le futur. La présente analyse est limitée aux aspects financiers de l'emprunt extérieur. Les aspects juridiques de l'emprunt ou les avantages et inconvénients non financiers des différentes sources de financement ne sont pas abordés ici. 3.2 Les projections sont prolongées à un horizon de 16 ans (2001) de façon à pouvoir évaluer la charge du service de différentes combinaisons d'emprunts extérieurs sur une période suffisante pour tenir compte des délais de grâce (différé d'amortissement) et des durées de déboursement et de remboursement (maturité) de ces emprunts. En poursuivant le scénario d'ajustement au-delà de 1996, on a supposé entre autres hypothèses étant donné l'atténuation de la contrainte financière extérieure que (i) la croissance du PIB pourrait être soutenue à environ 6 % par an, (ii) la croissance des exportations atteindrait un rythme de croisière après les taux élevés des années 1988-96, (iii) les taux d'investissement public et privé pourraient augmenter modérément, (iv) les élasticités des différentes catégories de recettes fiscales par rapport au PIB diminueraient après l'effort fiscal de la période d'ajustement (l'élasticité moyenne des recettes non pétrolières par rapport au PIB ressortirait à 1,08 en moyenne) et (v) la masse salariale de la fonction publique augmenterait au rythme de 3,5 % par an en termes réels. Les principales grandeurs économiques évolueraient comme ci-contre. Sous ces hypothèses la balance commerciale deviendrait équilibrée après 1998 mais le déficit courant resterait encore élevé (600 à 700 millions de dollars EU par an dans le scénario d'emprunt A 1) en raison principalement des charges en intérêts sur les emprunts antérieurs. B. Scénario A-1 3.3 Dans ce scénario, qui est celui des projections de balance des paiements du tableau 30, les engagements futurs auprès des sources bilatérales et multilatérales sont projetés selon les tendances passées (période 1978-84) en tenant compte de l'inflation future, avec cependant une légère augmentation en termes réels pour les sources multilatérales. Le modèle calcule ensuite, année par année, les besoins de financement supplémentaires qui seraient nécessaires pour maintenir les réserves extérieures en devises à un niveau minimum. On suppose que les besoins de financement supplémentaires seraient couverts par des crédits financiers des banques commerciales. Les termes moyens retenus dans la projection pour ces crédits financiers sont : maturité, 7 ans, délai de grâce, 2 ans, taux d'intérêt (variable) 9 %, période de mobilisation, 1 an. Étant donné les périodes de remboursement et de grâce relativement courtes de ces crédits financiers et l'effet cumulatif des charges en amortissement, au-delà de 1996 ces besoins de financement dépasseraient 1 milliard de dollars EU par an et résulteraient dans la proportion de 60 % des charges en amortissement des emprunts commerciaux passés (Tableau 32). Ils dépasseraient largement la capacité d'emprunt du pays [PAGE 473]
[PAGE 474] en termes d'accès aux marchés financiers extérieurs dans les circonstances actuelles. 3.4 Le ratio du service de la dette aux exportations augmenterait de quelque 15,6 % en 1991 à environ 21,2 % en 1996 et 22,2 % en 2001[25]. Le ratio du service de la dette aux recettes totales de l'État atteindrait près de 25 % en 2001[26]. Le ratio de la dette mobilisée au PIB ne serait que de 23,1 % en 2001 après une pointe à près de 25 % en 1997, étant donné le rythme rapide des remboursements des emprunts commerciaux. La structure de la dette mobilisée et en cours serait cependant malsaine avec 58 % dus aux sources officielles bilatérales et multilatérales et 42 % dus aux institutions financières commerciales avec des périodes de remboursement courtes. C. Scénario A-2 3.5 Étant donné les volumes de financement auxquels des pays de taille et de niveau de revenu comparables au Cameroun ont accès, il est clair que le Cameroun dispose d'une large marge pour augmenter ses emprunts auprès des sources multilatérales, et dans une moindre mesure, auprès des sources bilatérales. Dans le scénario A-2, on fait l'hypothèse que le Cameroun utiliserait plus largement ses possibilités d'emprunt auprès des sources officielles, en particulier des sources multilatérales. [PAGE 475]
Les besoins de financement supplémentaires auprès des sources commerciales s'en trouveraient alors considérablement réduits :
Le montant total des emprunts en 1987-91 serait cependant un peu plus élevé dans le scénario A-2 (637 millions de dollars par an) que dans le scénario A-1 (592 millions) du fait que les prêts des sources officielles, qui sont généralement liés à des projets avec une période de mobilisation moyenne de cinq ans, devraient être engagés en anticipation des besoins de financement de la balance des paiements. 3.6 En raison, principalement, de la maturité et la période de grâce beaucoup plus longues des prêts des sources officielles, il résulterait de ce scénario une diminution sensible des ratios du service de la dette par rapport aux exportations et aux recettes de l'État, qui ne seraient plus que d'environ 16,8 % et 18,7 % en 2001 contre environ 22,2 % et 24,8 %, respectivement, dans le scénario A-1 (Tableau 33). 3.7 Il convient d'observer qu'un recours accru aux emprunts multilatéraux présente un inconvénient, c'est que ces emprunts ne sont pas rééchelonnables en cas de crise. Cependant la structure de la dette beaucoup plus saine qui résulterait du recours accru à ces emprunts laisserait une marge de manœuvre qui permettrait précisément d'éviter un rééchelonnement en cas d'événements adverses.
[PAGE 480] D. Scénario A-3 3.8 Le scénario A-3 suppose le recours à un nouveau mode d'emprunt qui consisterait de prêts-projets des banques commerciales à des termes plus favorables, du type des prêts B de cofinancement avec la Banque Mondiale. Les montants d'emprunts des sources bilatérales et multilatérales resteraient identiques à ceux du scénario A-2. Les termes retenus dans la projection pour ces prêts commerciaux plus favorables seraient en moyenne les suivants, par comparaison avec les crédits financiers classiques :
3.9 En ce qui concerne le rapport de la dette en cours et mobilisée au PIB, il n'y a pas de différence sensible d'un scénario à l'autre. A la fin de 1996, par exemple, ce rapport serait à peu près de 24,5 % dans chaque scénario. La structure de la dette serait cependant beaucoup plus saine dans le scénario A-3, en cas de flambée ultérieure des taux d'intérêt ou de crise intérieure ou extérieure affectant les revenus d'exportations (paras. 3.12-3.15).
3.10 Il ressort de ce scénario que, compte tenu des possibilités d'accès du Cameroun aux sources bilatérales, aux sources multilatérales et aux prêts commerciaux de cofinancement à des conditions améliorées, d'un point de vue strictement financier, la composition optimale du total des emprunts extérieurs publics et garantis par l'État serait de : 30 à 35 % des sources bilatérales 45 à 50 % des sources multilatérales 15 à 20 % en prêts-projets de cofinancement des banques commerciales moins de 10 % en crédits financiers commerciaux ou crédits-exportations. 3.11 Le modèle utilisé pour ces projections ne permet pas d'établir une cohérence stricte entre les besoins de financement extérieur du point de vue de la balance des paiements et les besoins de financement de l'État, car il ne comporte pas de module monétaire. Il apparaît cependant que les besoins nets en emprunts extérieurs officiels, c'est-à-dire emprunts de l'État ou garantis par l'État, tels qu'ils ressortent de ce scénario optimal (A-3), seraient sensiblement inférieurs aux besoins nets de financement de l'Etat (Tableau 29) pour la période 1987-91, seraient équivalents pour la période 1997-2001 et seraient supérieurs pour la période 1997-2001. Cela signifie que l'État, à moins de réduire ses dépenses plus qu'il n'est projeté, devra emprunter à l'extérieur entièrement pour son compte dans les cinq années à venir et devra en outre réduire ses dépôts dans les banques commerciales (voir Chapitre I, (Section E (iv)) et recourir au financement de la Banque centrale. Si l'investissement fixe public est maintenu au même niveau qu'en 1986 en termes réels de 1987 à 1991, le financement par l'emprunt extérieur tel que projeté au scénario A-3 représenterait en termes de déboursements [PAGE 484] 73 % de l'investissement public. Un tel volume de ressources extérieures serait probablement difficile à mobiliser exclusivement par des prêts liés à des projets et l'État devra probablement avoir recours à des emprunts financiers libres. Après cette période d'ajustement, les projections indiquent que l'État devra emprunter à l'extérieur plus que ce qui est nécessaire pour l'équilibre des finances publiques et reprendre le rôle qu'il a eu de 1980 à 1985 en dégageant une épargne financière pour le financement des secteurs économiques par le canal du secteur bancaire. E. Autres simulations 3.12 Pour examiner l'effet des variations dans les taux d'intérêt sur la charge de la dette on a simulé une « crise » modérée des taux d'intérêt pendant les années 1990-93 dans les scénarios A-1 et A-3 : les taux d'intérêt des prêts commerciaux de cofinancement et des crédits financiers augmenteraient de 8,75 à 13 % et de 9,00 à 13,25 %, respectivement, pendant les quatre années 1990-93. Comme il s'agit de prêts à taux variables, cette augmentation affecterait le montant total en cours et mobilisé sur ces prêts et crédits pendant la période 1990-93 seulement; une augmentation générale des taux d'intérêts entraînerait, avec un décalage dans le temps, un accroissement des taux des sources multilatérales, qui sont généralement calculés d'après le coût de leurs ressources à long terme. On suppose dans ce scénario que les taux des sources multilatérales augmenteraient de trois points au cours des quatre années 1992-95. Dans un souci de cohérence, on suppose aussi que le taux d'intérêt moyen des sources bilatérales augmenterait de 2 points. Dans le cas des sources officielles bilatérales et multilatérales à l'exception de la Banque mondiale, les taux sont généralement fixés pour la durée des prêts; l'augmentation affecterait par conséquent les prêts engagés pendant la période 1992-95 pour toute leur durée. En ce qui concerne les prêts de la Banque mondiale, dont le taux est variable, l'augmentation des taux d'intérêt affecterait le montant total en cours et mobilisé des prêts engagés depuis l'introduction du taux variable pendant la période 1992-95 seulement. Il convient d'observer qu'il s'agit-là d'une simulation tout à fait théorique, car une flambée des taux d'intérêt serait probablement consécutive à des variations dans les taux d'inflation et les taux de croissance des pays industrialisés ainsi que dans les cours des matières premières, qui auraient en retour différents effets sur les variables économiques de la projection. En particulier, il pourrait en résulter une augmentation de l'épargne intérieure. 3.13 On constate que l'effet d'une telle augmentation des taux d'intérêt [PAGE 485] sur la charge du service de la dette serait relativement limité et pratiquement identique dans les deux scénarios :
Cette simulation est illustrative du fait bien connu que, à moins de variations aberrantes dans les taux d'intérêt, la période de remboursement des emprunts a un impact beaucoup plus important que leur taux d'intérêt sur la charge du service de ces emprunts. 3.14 Il est intéressant d'analyser l'impact qu'aurait une baisse temporaire des exportations sur les besoins de financement et la capacité de service de la dette. A partir du scénario A-3 on a simulé une stagnation (croissance zéro) de tous les produits d'exportation pendant les deux années 1997 et 1998, ce qui peut toujours se produire à la suite de circonstances adverses intérieures ou extérieures. Il en résulterait bien entendu un ralentissement de la croissance du PIB et de la consommation, et, en conséquence, de la demande d'importation. Tous événements qui entrent également dans la simulation. La croissance des exportations reprendrait à partir de 1999 au rythme projeté initialement, mais à partir d'une base plus faible en 1998. La valeur totale des exportations de biens et services non-facteurs à prix courants ne serait donc plus que 6 750 millions de dollars en 2001 contre 7 750 millions dans le scénario initial. 3.15 Dans ce cas, à moins que le taux d'investissement du pays ne soit réduit par rapport à ce qu'à est supposé dans la projection ce qui ne serait pas souhaitable, car cela compromettrait la croissance de l'économie par la suite et que les importations soient compressées, le déficit en ressources (déficit commercial) atteindrait en moyenne 256 millions de dollars par an à prix courants en 1997-2001 contre 25 millions de dollars dans le scénario A-3. Avec l'effet cumulatif des charges en amortissement et en intérêt, il en résulterait des besoins en crédits [PAGE 486] financiers commerciaux de 312 millions de dollars par an en 1997-2001 contre 12 millions de dollars dans le scénario A-3. A supposer que l'accès aux institutions financières permette alors de couvrir ces besoins supplémentaires, le ratio du service de la dette par rapport aux exportations (les exportations étant inférieures à celles du scénario original A-3) atteindrait 20,3 % en 2001 contre 15,1 dans le scénario original. Le rapport de la dette en cours et mobilisé au PIB serait de 28,6 % contre 22,6 dans le scénario A-3. Ces ratios seraient certes élevés, mais encore supportables. 3.16 Étant donné la contrainte financière sévère à laquelle le Cameroun aura à faire face lorsque non seulement les exportations de pétrole cesseraient mais il faudrait encore importer du pétrole pour couvrir la consommation intérieure de produits pétroliers, il convient d'étudier les avantages qu'il y aurait à étaler dans le temps le rythme d'extraction du pétrole, pour autant que cela soit techniquement possible et que les contrats avec les compagnies exploitantes le permettent. L'objectif de cette politique de conservation serait de couvrir la consommation intérieure de produits pétroliers le plus longtemps possible pour donner le temps à l'économie de développer ses exportations à des niveaux suffisants pour compenser la disparition des revenus pétroliers et financer les importations de pétrole nécessaires. Cette stratégie ne s'avèrerait évidemment valable que si on prévoit une reprise des prix du pétrole en termes réels dans les années 1990, ce qui est généralement admis par les spécialistes et est supposé dans le scénario A de projections des revenus du pétrole. Dans ce scénario le prix du pétrole en dollars constants de 1984 resterait entre 15 et 16 dollars par baril de 1988 à 1990 (13,6 en 1987) et augmenterait de 2,9 % par an ensuite. (Tableau 24). 3.17 A partir du scénario A-3, on réduit la production et les exportations de pétrole de 1,5 million de tonnes pour chacune des années 1987-90, les autres variables économiques restant inchangées. Les 6 millions de tonnes ainsi épargnées seraient produites sur les six années 1994-99, à raison de 1 million de tonnes par an. Les besoins de financement extérieur seraient bien entendu plus importants dans la période 1987-91 dans ce scénario (160 millions de dollars EU de plus par an en moyenne). Le ratio du service de la dette atteindrait un maximum d'environ 22 % en 1993 contre 15,4 % dans le scénario A-3. En revanche, il diminuerait graduellement ensuite jusqu'au même niveau que dans le scénario A-3 en 2001, les besoins de financement extérieur étant alors moins élevés. On peut en conclure qu'avec les hypothèses actuelles d'évolution des prix de pétrole dans le futur une telle politique de conservation ne serait pas justifiée. 3.18 Étant donné que la capacité d'emprunt extérieur d'un État dépend de ses recettes d'exportations et des recettes publiques dans le futur il est par définition impossible de quantifier avec précision cette capacité pour une année ou une période donnée. On a établi cependant un indicateur utile qui est celui du rapport moyen des nouveaux engagements et déboursements aux exportations de biens et services de [PAGE 487] l'année antérieure. Pour autant que l'on puisse prévoir une croissance des exportations d'environ 10 % par an en moyenne à prix courants dans le long terme (ce qui est le cas pour la période 1991-2001 dans le scénario de projections économiques), et avec la combinaison optimale d'emprunts selon les différentes sources proposées au scénario A-3, l'analyse des différentes simulations suggère un critère pratique intéressant pour les décideurs, à savoir qu'il ne faudrait pas emprunter au cours d'une année donnée plus de 26 à 27 % des exportations de l'année précédente, en termes d'engagements, et 22 à 23 % en termes de déboursements, afin de maintenir le ratio du service de la dette aux exportations au niveau de 15 à 16 % dans le long terme. A titre de référence, les rapports des nouveaux engagements en emprunts publics et garantis par l'État, et des déboursements aux exportations de l'année antérieure ont été de 20,0 % et 17,7 %, respectivement, en moyenne au cours de la période 1978-84. 3.19 Pour limiter les risques de change sur le service de la dette extérieure il faut emprunter dans les monnaies de ses exportations. A l'heure actuelle les exportations de produits non pétroliers du Cameroun se font à 80 % vers l'Europe et, bien que l'on ne dispose pas de statistiques sur ce point, il est probable que les exportations pétrolières soient libellées en dollars. Avec la diminution prévue des exportations du pétrole, il est probable que la destination des exportations évoluera de la manière suivante :
On peut en déduire qu'il serait souhaitable pour le Cameroun d'emprunter principalement en ÉCU dès 1987, lorsque c'est possible. L'avantage de l'Écu européen, en plus de bien correspondre au « mix » des monnaies des exportations du Cameroun, est qu'étant basé sur un panier de monnaies, il réduit l'impact des fluctuations d'une ou plusieurs de ces monnaies. [PAGE 488]
1. POPULATION ET EMPLOI
1.2 Effectifs de la fonction publique, 1974/75-1984 1.3 Emploi dans la fonction publique, 1984 2. COMPTES NATIONAUX
2.2 Produit Intérieur Brut par branche d'activité aux prix constants 1979-80; 1978-1985 2.3 Indices de déflateurs des prix; 1978-1985 2.4 Origine et emploi des ressources aux prix courants 2.5 Origine et emploi des ressources aux prix constants 1979-80 2.6 Indices implicites de déflation des prix pour les emplois du Produit Intérieur Brut; 1978-1985 3. COMPTES EXTÉRIEURS
3.2 Balance des paiements (compte des capitaux); 1978-1985 3.3 Volume des exportations par type de produits; 1978-1985 3.4 Valeur des exports par type de produits; 1978-1985 3.5 Indices implicites des prix des exportations par type de produits (1980 = 100); 1978-1985 3.6 Valeur des importations par groupe de produits; 1978-1985 3.7 Indices des prix des importations par groupe de produits (1980 = 100); 1978-1985 3.8 Répartition géographique du commerce extérieur Exportations non pétrolières (%); 1978-1984 3.9 Répartition géographique du commerce extérieur Importations (%); 1978-1984 4. DETTE EXTÉRIEURE
4.2 Service de la dette, engagements, tirages et montant des encours de la dette publique extérieure; décembre 1985 [PAGE 489] 5. FINANCES PUBLIQUES
5.2 Dépenses budgétaires; 1978-1985 5.3 Classifications fonctionnelles des dépenses budgétaires courantes; 1980-1985 6. DONNÉES STATISTIQUES MONÉTAIRES
6.2 Situation monétaire Actif; 1978-1985 6.3 Crédits à l'économie; 1978-1985 6.4 Répartition sectorielle des crédits à l'économie; 1978-1985 7. SALAIRES ET PRIX
7.2 Indice des prix à la consommation à Douala; 1975-1975 7.3 Structure des salaires minimums; 1978-1985 8. INDUSTRIE
8.2 Indice de la production industrielle (1974/75 = 100); 1978-1985 9. AGRICULTURE
9.2 Production des principales cultures vivrières du secteur traditionnel; 1979-1985 9.3 Prix au producteur; 1970-1985 9.4 Évolution des cours des principaux produits d'exportation ;1978-1985 10. AUTRES SECTEURS
Tableau 1.1 : Statistiques démographiques, 1984
Tableau 1.2 : Effectifs de la fonction publique, 1974-75-1994 (a)
Tableau 1.3 : Emploi dans la fonction publique, 1984
Tableau 2.1 : Produit intérieur brut par branche d'activité ( aux prix courants du marché : en milliard de francs CFA)
Tableau 2.2 : Produit intérieur brut par branches d'activités (aux prix constants 1979-80 : en milliards de FCFA)
Tableau 2.3 : Indices de déflateurs des prix (1979-80 = 100)
Tableau 2.4 : Origine et emploi des ressources (aux prix courants : en milliards de FCFA)
Tableau 2.5 : Origine et emploi des ressources (aux prix constants 1979-80 : en milliards de FCFA)
Tableau 2.6 : Indices implicites de déflation des prix pour les emplois du produit intérieur brut
Tableau 3.2 : Balance des paiements (compte des capitaux) (billion CFAF/milliards FCFA)
Tableau 3.3 : Volume des exportations par type de produits (metric tons)/(en tonnes métriques)
Tableau 3.4 : Valeur des exports par type de produits (CFAF million/millions FCAF)
Tableau 3.5 : Indices implicites des prix des exportations par type de produits (1980 = 100)
Tableau 3.6 : Valeur des importations par groupe de produits (1) (FCAF million/millions FCAF)
Tableau 3.7 : Indices impicites des prix des importations par groupe de produits (1) (1980 = 100)
Tableau 3.8 : Répartition géographique du commerce extérieur Exportations non-pétrolières (1) (%)
Tableau 3.9 : Répartition géographique du commerce extérieur Importations (%)
(comprend uniquement les engagements jusqu'au 31/12/85) Prêts remboursables dans la monnaie étrangère et sous forme de biens (en milliers de dollars des États-Unis)
(comprend uniquement les engagements jusqu'au 31/12/85) Prêts remboursables dans la monnaie étrangère et sous forme de biens (en milliers de dollars des États-Unis)
(comprend uniquement les engagements jusqu'au 31/12/85) Prêts remboursables dans la monnaie étrangère et sous forme de biens (en milliers de dollars des États-Unis)
Projections basées sur les encours de la dette, y compris le montant non tiré, au 31/12/85 (comprend uniquement les engagements jusqu'au 31/12/85) Prêts remboursables dans la monnaie étrangère et sous forme de biens (en milliers de dollars des États-Unis)
Tableau 5.1 : Recettes budgétaires (in billions of CFA Francs/en milliards de francs CFA)
Tableau 5.2 : Dépenses budgétaires (in billions of CFA Francs/en millions de francs CFA)
Tableau 5.3 : Classifications fonctionnelles des dépenses budgétaires courantes (in billions of CFA francs/en milliards de francs CFA)
Tableau 6.1 : Situation monétaire Passif (1) (in billions of CFA Francs/en milliards de francs CFA)
Tableau 6.2 : Situation monétaire Actif (in billions of CFA Francs/en milliards de francs CFA)
Tableau 6.3 : Crédits à l'économie (1) (in billions of CFA Francs/en milliards de francs CFA)
Tableau 6.4 : Cameroun : Répartition sectorielle des crédits à l'économie (1) (in billions of CFA Francs/en milliards de francs CFA)
Tableau 7.1 : Indice des prix à la consommation à Yaoundé (Familles camerounaises à revenu moyen) (1968 = 100)
Tableau 7.2 : Indice des prix à la consommation à Douala (1) (May 1966 = 100)
Tableau 7.3 : Structure des salaires minimums, 1978-85 (1) (en francs CFA par mois, à partir du début de l'exercice)
Tableau 8.1 : Production industrielle
Tableau 8.2 : Cameroun Indice de la production industrielle (1974-75 = 100)
Tableau 9.1 : Production et superficies des principales cultures d'exportation Production (in tons/en tonnes)
Tableau 9.2 : Production des principales cultures vivrières du secteur traditionnel (in tons/en tonnes)
Tableau 9.3 : Prix au producteur (in CFAF per kilo/en FCFA par kilo)
Tableau 9.4 : Cameroun : Évolution des cours des principaux produits d'exportation (1) (en FCFA/kg)
Tableau 10.1 : Statistiques de transport, 1977-78 1984-85
[1] Toutes les références à une année donnée que l'on trouvera dans ce rapport se rapportent à l'année budgétaire, sauf indication contraire. 1985, par exemple, réfère à la période du 1er juillet 1984 au 30 juin 1985. [2] L'année budgétaire du Cameroun va du 1er juillet au 30 juin. Toutes les références à une année donnée que l'on trouvera dans ce rapport se rapportent à l'année budgétaire, sauf indication contraire. 1985, par exemple, réfère à la période du 1er juillet 1984 au 30 juin 1985. [3] Voir l'Etude sur Secteur Financier (No. 6028-CM), daté du 2 juin 1986. [4] Les recettes totales ne comprennent ici que la part des recettes pétrolières qui sont rapatriées par l'intermédiaire des comptes hors budget. [5] Alors que la SNH reçoit 70 % de la production totale de pétrole, elle ne paie que 30 % du coûts totaux, y compris les coûts de la prospection lorsque celle-ci s'avère positive. [6] Rapport sur le développement dans le monde (1984). Tableau 27. [7] Quelque 85 milliards de FCFA, soit 2,7 % du PlB, étaient maintenus en dépôt dans des banques étrangères. [8] Les paiements de transferts n'entrent généralement pas dans ce calcul, mais nous les avons inclus ici afin de donner une image plus claire du volume des ressources de l'État qui permettent de financer les investissements publics. [9] Le fait que les données les plus récentes disponibles en février 1996 datent de juin 1984 permet de comprendre en partie les difficultés de ce secteur. [10] Ces 90 milliards de FCFA ne représentent que les subventions versées aux 40 entreprises du portefeuille de la SNI, c'est-à-dire les entreprises où l'Etat est actionnaire à 25 % au moins. Les subventions aux 20 autres entreprises auraient été de l'ordre de 5 à 10 milliards de FCFA en 1983. [11] Pour juin 1984, date des données les plus récentes. [12] Il est intéressant de noter que les recettes pétrolières nettes en devises sont aussi égales aux recettes de l'État (Tableau 11) moins la consommation en monnaie locale de pétrole plus les coûts d'exploitation intérieurs. On peut aussi utiliser ce dernier chiffre pour estimer les recettes nettes en devises du pétrole. [13] Comme dans les chapitres précédents, toute référence à une année donnée correspond à l'année fiscale camerounaise. Par exemple, 1985 se réfère à la période du 1er juillet 1984 au 30 juin 1985. [14] Les charges en amortissements et intérêts sur ce montant sont inclues en partie dans les emprunts privés nets et en partie dans les erreurs et omissions dans les projections de balance des paiements du tableau 28. [15] Le Revenu Intérieur Brut et défini comme étant le PIB ajusté de l'effet des termes de l'échange. Il convient d'observer que les chiffres du tableau 27 sous-estiment la baisse réelle du Revenu Intérieur Brut à cause de la chute du dollar. En effet, du fait que les exportations de pétrole sont effectuées en dollars et que la plus grande partie du importations sont faites en monnaies européennes (Annexe, tableau 3.9), il résultera de la baisse du dollar une détérioration des termes de l'échange plu marquée qu'il n'apparaît au tableau 27. [16] Pour une série d'hypothèses concernant l'évolution d'un certain nombre de variables économiques et financières sur un certain nombre d'années, le modèle assure par des relations mathématiques et économétrique la cohérence interne des comptes nationaux, des comptes extérieurs, des finances publiques et de la dette extérieure, et la cohérence entre ces comptes. Le modèle comporte 140 données principales pour l'année de base (année fiscale 1985), une centaine de variables exogènes et environ 380 variables résultantes pour chaque année de la période de projection. Alors que ce modèle ne permet pas de mesurer directement l'impact de différentes politiques économiques sur les variables économiques, il est particulièrement approprié pour évaluer les besoins de financement extérieur et les besoins de financement de l'Etat correspondant à un rythme donné de croissance de la production et des exportations, de la consommation et de l'investissements, et mesurer avec précision l'impact des conditions de ces financements sur les comptes extérieurs; et les finances publiques. [17] 1. La croissance du PIB non-pétrolier serait de l'ordre de 6 % par an (7,9 % en moyenne pendant la période 1979-85 et 6,2 % en moyenne pont les quatre années 1982-95) et résulterait des hypothèses sectorielles suivantes :
La croissance du PIB total ne pourrait être que de l'ordre de 3 %, pour la période 1987-91 et 5 % ensuite, en raison de la diminution rapide de la valeur ajoutée du secteur pétrolier. On suppose dans ce scénario qu'il n'y aurait pas de réduction de l'effort d'investissement du pays. Le taux d'investissement par rapport au PIB diminuerait cependant de deux points d'ici à 1991 en raison de la cessation des investissements de développement dans le secteur pétrolier. Le coefficient marginal de capital implicite de la projection augmenterait à près de 5 dans les cinq prochaines années du fait de la proportion élevée des investissements dans les infrastructures économiques et sociales, où l'effet sur la production est nécessairement différé. Il tomberait en dessous de 4 ensuite pour la période 1992-96. 2. Les taux de croissance en volume des principales exportation, non-pétrolières sont projetés comme suit :
3. On peut supposer que le taux de croissance des exportations de cacao serait un peu plus élevé qu'au cours de la période 1979-85 en raison des nouvelles plantations effectuées, durant le Cinquième Plan (para. 1.14). On projette également un taux de croissance de 2,5 % pour le café correspondant à la tendance des sept dernières années. Il s'agit là cependant d'une hypothèse un peu optimiste si des mesures incitatives actives ne sont pas prises, en particulier en faveur de l'Arabica, qui n'est plus actuellement que partiellement récolté par les paysans en raison de sa faible rentabilité. Il est projeté une reprise modérée des exportations de bois après la chute des années récentes, en raison de mesures incitatives introduites récemment (para. 1.18). La croissance des exportations d'aluminium, ne pourraient être que marginale étant donné que l'usine produit pratiquement à pleine capacité. Les exportations de produits manufacturés augmenteraient dans ce scénario au même rythme qu'au cours de la période 1979-85. Il convient d'observer que la projection des comptes extérieurs est évidemment très sensible à long terme à de faibles différences dans les taux de croissance du volumes et des prix des exportations et des importations. Par exemple, une variation de 1 % dans le taux de croissance des exportations de cacao sur les dix années de la projection, se traduit par une différence de US$ 50 millions dans les recettes d'exportation en fin de période. 4. Les taux de croissance des principales catégories d'importations sont projetés en fonction des demandes d'investissement et de consommation et de la demande intermédiaire de l'industrie par des coefficients d'élasticité appropriés. Étant donné le peu de fiabilité des statistiques d'importations (para. 1.65), il n'est pas possible de se baser sur les élasticités historiques. On a donc utilisé des coefficients moyens d'élasticité qui tiennent compte du niveau de développement du Cameroun, de la structure de son économie, des progrès attendus dans la substitution aux importations et l'efficacité de l'économie, de la composition probable des programmes d'investissement et qui supposent le maintien de l'autosuffisante alimentaire. Il en ressort une élasticité moyenne de la croissance des importations à celle du PIB de 0,54 pour la période 1987-91. Le taux passerait à plus de 1 au cours de la période suivante à cause des importations de pétrole qui seraient alors nécessaires pour couvrir la consommation intérieure de produits pétroliers. 5. Les prix extérieurs des produits d'exportations et des principales catégories d'importation et le taux d'inflation internationale sont projetés en dollars d'après les prévisions des services spécialisés de la Banque (avril 1986). La détérioration des termes de l'échange s'aggraverait en 1987 en raison principalement de la chute du prix du pétrole, qui n'est que très partiellement compensée par la hausse récente du cours du café. Avec les hypothèses retenues dans le scénario A pour le pétrole, les termes de l'échange devraient ensuite s'améliorer progressivement pour retrouver vers 1993 leur niveau de 1985, essentiellement à cause de la réduction de la part du pétrole dans le commerce extérieur du Cameroun. On a retenu l'hypothèse que le dollar EU diminuerait de 435 FCFA en 1986 à 345 FCFA en 1987 et 333 FCFA ensuite pour toute la période de la projection. L'évolution des tenues de l'échange en FCFA dépendra évidemment de la part respective des importations et des exportations en dollars EU. 6. La consommation publique est projetée en relation directe avec la croissance de l'emploi administratif, qui serait de 6 % par an en termes réels soit un peu moins que les 7,4 % réalisés pendant la période 1979-85, et des coûts récurrents de l'investissement public (dépenses en matériels et approvisionnement). Elle croîtrait en termes réels dans ce scénario de 5,4 % par an dans la période 1987-91 et 5,6 % ensuite. La consommation totale est calculée par le modèle par solde entre les ressources et les emplois. [18] Le modèle d'équilibre général (MEGC) indique que si les droits d'entrée sur les biens de consommation étaient accrus de 38,2 à 50 % et les taxes indirectes sur ces mêmes biens étaient augmentées de 12,3 à 40 %, ces deux mesures auraient pour effets combinés de réduire le déficit courant de la balance des paiements d'environ 270 millions de dollars après deux ans. [19] Si le rapport des dépenses courantes au PIB était réduit de 20 % sur la période 1987-91 le MEGC indique qu'il en résulterait une diminution du déficit extérieur courant d'environ 160 millions de dollars. [20] Rapport sur le Développement Mondial, 1984. [21] Les contrats de plan sont des documents qui récapitulent les objectifs, les contraintes sociales, la stratégie et le programme d'investissements de l'entreprise, ainsi que les engagements correspondants (financiers et autres) de l'État envers l'entreprise, et comportent des critères de performance et des objectifs financiers. Les contrats de plan sont généralement préparés avec les entreprises qui ont été assainies et opèrent en régime de croisière. Ils peuvent cependant être utilisés pour récapituler les points et étapes principales des programmes de réhabilitation/restructuration à mettre en œuvre par les entreprises. Les contrats de plan sont généralement établis pour des périodes de 3 à 5 ans et mis à jour et renégociés chaque année. Ils sont normalement plus détaillés et plus contraignants pour les entreprises en situation de monopole que pour celles en situation concurrentielle. [22] Le taux de 70 % par an pour les produits miniers durant 1992-96, qui s'applique à une base très faible, est purement notionnel. [23] Par rapport au scénario de base le déflateur projeté pour le PIB a été réduit de 7,0 à 4,5 % par an, ce qui serait inférieur au taux d'inflation internationale projeté et reflèterait la dépréciation attendue du taux de change réel. [24] Au cours des sept années 1978-84 le Cameroun a emprunté un total de 1 028 millions de dollars des pays suivants : Belgique, Canada, Danemark, France, République Fédérale d'Allemagne, Italie, Japon, Koweit, Pays-Bas, Qatar, Arabie Saoudite, Suisse, Emirats Arabes Unis, Royaume Uni; un total de 827 millions de dollars des institutions multilatérales suivantes : Banque Africaine de Développement, Fonds Africains de Développement, BADEA, Fonds Européen de Développement, Banque Européenne d'Investissement, Fonds International pour le Développement Agricole, Banque Islamique de Développement, Fonds Spécial de l'OPEP et Banque Mondiale; et un total de 763 millions de dollars auprès de banques commerciales d'Europe et des États-Unis (non compris les emprunts privés non garantis par l'Etat). [25] Ces projections ont été élaborées sur la base de la situation de la dette extérieure à fin 1984 et d'estimations préliminaires pour 1995. Les données sur la dette à fin 1985 ont été publiées juste avant que ce rapport soit diffusé (Tableaux 4.1 et 4.2 de l'annexe statistique). Elles indiquent que les remboursements en principal pour 1986 ont dû être plus élevés qu'il avait été estimé auparavant. Par conséquent, les besoins en capitaux projetés seraient quelque peu plus élevés que ceux indiqués au tableau 32 ainsi que, en retour, les ratios de service de la dette. Le scénario A-1 a été refait sur la base de la situation révisée de la dette extérieure. Les ratios du service de la dette qui en ressortent seraient comme suit :
Étant donné que ces différences ne sont pas de nature à modifier l'évaluation de la solvabilité du Cameroun et ne changent pas les conclusions qui se dégagent de l'analyse qui suit, il n'a pas été jugé nécessaire de réviser les scénarios de projections qui sont présentés dans ce chapitre. [26] Ce rapport n'a qu'une valeur de référence. En effet, sauf en cas de défaillance, les entreprises publiques et autres institutions dont les emprunts extérieurs sont garantis par l'État assurent en principe le service de leurs dettes. |