© Peuples Noirs Peuples Africains no. 53/54 (1986), couverture.



Tentative terroriste contre Mongo Beti ?

C'est arrivé à Rouen le dimanche 5 avril, alors que là-bas, à Yaoundé, la police du petit dictateur intérimaire mitonnait une nouvelle arrestation de journalistes et d'universitaires. Vers 10 h donc, un inconnu sonne à l'entrée de la maison de l'écrivain. Il dit être un cousin et s'appeler Bihina; il insiste lourdement auprès de l'épouse de l'écrivain, venue ouvrir, pour être reçu immédiatement; il a des nouvelles de sa mère et un message sur cassette qu'il veut lui remettre. Qu'il revienne plus tard, lui conseille-t-on ; il est trop tôt pour recevoir, l'écrivain n'est même pas habillé, etc. Aucune de ces raisons ne convainc notre homme, qui objecte imperturbablement qu'il est pressé. C'est le style des agents de Biya.

Sortant sur le perron, Mongo Beti intime alors à l'inconnu de déguerpir. Et l'individu de jouer les hystériques, gesticulant, hurlant « Ta mère, message, cassette... » On lui ferme la porte au nez, il poursuit son cinéma, l'œil exorbité, la bouche grimaçante, au risque de troubler un quartier d'habitude paisible. Et si c'était un malade? Ou un terroriste ?

Mongo Béti alerte la police, qui arrive sans se presser. Après les explications traditionnelles avec la famille, on emmène l'inconnu. Mongo Béti apprend le lendemain par la D.S.T. qui l'a convoqué que l'inconnu n'était pas armé; en revanche, il portait sur lui une boîte contenant de la poudre brune qu'il a présentée comme « de la terre ancestrale » qu'il devait remettre à l'écrivain, ainsi qu'une fiole remplie d'un liquide noirâtre sur lequel il n'a pas voulu s'expliquer.

Paul Biya, dont les acolytes, à force de détournements, ont vidé les caisses de l'Etat au point qu'il n'est plus capable de payer les bourses des étudiants ni les salaires des fonctionnaires, en est réduit à faire le porte-porte des Etats riches pour recueillir l'aumône; mais ses espions et ses tueurs, eux, continuent à parcourir allègrement la planète. Aux frais de quelle princesse ? la C.I.A. ? la D.G.S.E. ?

Heureusement pour le petit dictateur intérimaire, son premier conseiller, chassé de TF 1 où il s'accrochait désespérément – Paris l'appelle désormais le Bokassa du Titanic – va pouvoir enfin lui consacrer l'intégrité de son génie, qui est immense (c'est lui qui le dit). Mais cela suffira-t-il pour sauver le petit Paul ?

P.N-P.A.

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