© Peuples Noirs Peuples Africains no. 24 (1981) 134-140



ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

Yénoukoumê ENAGNON, Odile TOBNER,
Guy Ossito MIDIOHOUAN et Laurent GOBLOT

Le Dernier de l'Empire, de Sembene Ousmane, l'Harmattan, coll. « Encres Noires », 2 tomes, 1981.

On est d'abord surpris, puis perplexe; persuadé d'être coupable d'un défaut d'attention, on relit les quelques paragraphes qui précèdent. Mais le malaise persiste : la langue est lourde, l'écriture maladroite, le vocabulaire ou trop savant ou trop vulgaire; le récit décousu à force de digressions vacille entre le présent et le passé sans repères évidents; des personnages sans épaisseur, parlant souvent faux, accentuent cette impression d'absence de composition, de manque de pénétration et d'analyse.

L'éditeur nous présente l'œuvre comme le récit de Cheikh Tidiane, en prélude, comprend-on plus tard, aux mémoires qu'il veut écrire et qu'il intitulera Le Dernier de l'Empire. La lecture montre cependant que le narrateur n'est pas Cheikh Tidiane : ni style direct, ni forme épistolaire. Les rares fois où il apparaît que visiblement Cheik Tidiane dévide ses souvenirs à un interlocuteur, l'auteur emploie tour à tour la première et la troisième personne; ces jongleries avec la langue enlèvent toute [PAGE 135] raison d'être à un récit qui s'insère sans souplesse dans le déroulement des événements, contrairement à ce qui se passe par exemple chez Henri Lopès dans La Nouvelle Romance. Il est donc abusif de dire que le vieux Cheikh Tidiane, qui n'est pas « doyen de l'Assemblée » comme une lecture impatiente a pu le laisser croire à Jacques Chevrier (Jeune Afrique, 23 septembre 1981, p. 70), mais ancien ministre de la Justice, « remplit ici la fonction du coryphée dans les tragédies antiques ».

De même, faut-il voir un « roman de politique-fiction » dans cet enchevêtrement d'événements et d'individus dans le cadre de la situation du Sénégal avant la passation de pouvoir de L.S. Senghor à Abdou Diouf, avec en toile de fond l'histoire politique de ce pays de Blaise Diagne à Mamadou Dia, le tout pimenté d'une évocation d'émeutes lycéennes qui doivent tout autant au Dakar de 1968 qu'au Bangui de 1979 ? Les « clefs » sont en effet d'une monotone limpidité, les identifications si évidentes qu'on pourrait à plus juste titre parler d'historiographie, mais certainement pas de fiction. Tout lecteur tant soit peu au courant de la vie politique sénégalaise risque peu de se tromper. Qu'on en juge : Léon Mignane, le « Vénérable », président de la République, disparaît un beau matin, jetant ainsi dans un premier temps l'émoi et la consternation au sein de ses ministres. La personnalité de ce Mignane s'éclaire rapidement à travers les réflexions de ceux qui l'entourent, en particulier de Cheikh Tidiane Sall; ces deux septuagénaires sont amis de longue date, même si des divergences politiques ont récemment jeté quelque froid entre eux. C'est que Mignane est un autocrate; il s'est entouré de fidèles, instruments dociles de sa politique; pratiquant la tactique de diviser pour régner, il a joué sur les intérêts contradictoires, les oppositions de caste, mais aussi les ambitions communes pour maintenir un équilibre factice. Sous le manteau idéologique de « l'Authénégraficanitus », il a pratiqué la collaboration avec les pays européens au détriment des intérêts du peuple sénégalais et des peuples africains en général. Le bilan de sa politique économique se révélant désastreux, atteint par la sénescence, il décide néanmoins de sauver la face : un coup d'Etat monté de toutes pièces et déclenché par un de ses inconditionnels, le général Ousmane Mbaye, le fera regretter par le peuple qui [PAGE 136] s'adressera alors à lui comme à un sauveur. Est-ce là la tactique d'un politicien retors, passé maître dans l'art de manipuler les hommes ? Même Jacques Chevrier n'y croit pas, qui se contente de parler « d'énigme policière » : en fait, mauvais suspense, ficelles grossières, psychologie élémentaire, ce ne sont certes pas les recettes d'un passionnant roman policier.

Plus sérieusement, si l'auteur ne réussit pas à rendre son histoire attachante, c'est qu'elle est trop vraie : on a l'impression de lire l'exposé des dessous machiavéliques d'un politicien chevronné, sans omettre les détails de sa vie privée, tels qu'un journaliste averti et pas toujours scrupuleux les dévoilerait. Première page croustillante et scandaleuse à la Watergate, mais certes pas roman ! Tout au plus une atmosphère de feuilleton facile, créée par les affrontements entre factions rivales, les rebondissements (attendus) liés à l'intervention des militaires (non attendus, quant à eux, puisqu'il s'agit des jeunes cadres de l'armée).

Peut-on toutefois créditer l'auteur de plus de profondeur et de finesse dans « la série de portraits au vitriol que brosse au passage un Sembene Ousmane particulièrement féroce » (Jacques Chevrier) ? Si l'ouvrage se voulait une farce ou une satire, ce qu'il n'est manifestement pas, on pourrait apprécier ces personnages souvent fortement typés au point de prêter à rire, même là cependant, rien de très nouveau – le théâtre africain contemporain, en langues africaines ou européenne a popularisé une approche presque caricaturale et ubuesque de certains types sociaux qu'on songe par exemple à Guillaume Oyônô-Mbia, à Bernard Dadié, ou encore aux pièces de nombreuses troupes itinérantes. Les résultats chez Sembene Ousmane sont en plus loin d'être toujours heureux, par exemple ce portrait du Premier ministre (où l'allusion est encore une fois un peu trop transparente ... ), « au cou de cigogne », « au regard de biche », « aux longues jambes », « à la tête en forme de noix de coco »...

On reste d'autant plus étonné et déçu que Sembene Ousmane n'est pas un auteur novice; s'il y avait encore effectivement dans son premier roman Le Docker Noir, publié en 1956, des maladresses, des longueurs et une certaine tendance au mélodrame facile, il s'est par la suite, [PAGE 137] et au fil des années, imposé comme un des meilleurs romanciers de la littérature africaine contemporaine en français. Si l'on y ajoute son activité de cinéaste, il semble que sa réputation n'était plus à faire. Ses prises de position, exprimées dans de nombreuses interviews, contre le colonialisme et le néo-colonialisme, ses dénonciations de l'avidité et de la corruption régnant au sein de la bourgeoisie d'affaires ainsi que dans la petite-bourgeoisie politico-bureaucratique au Sénégal, ont montré qu'il ne dissociait pas la fonction de l'écrivain de la participation aux luttes de son temps. Dans une interview récente au journal sénégalais Le Soleil du 10 juillet 1981, il réaffirmait son idéal de vie communiste et déclarait que, si ce n'était pour des raisons familiales, il partirait combattre dans les rangs de l'ANC d'Afrique du Sud. D'où les épithètes qui lui sont souvent accolées d'écrivain « militant » et même « révolutionnaire ».

Il y a pour ainsi dire une logique de l'écrivain, ou si l'on préfère une certaine fidélité à lui-même, qu'il soit essayiste, romancier, dramaturge ou poète, qui fit qu'on attend de lui un attachement non seulement à une vision du monde, mais aussi à une certaine façon de le percevoir; celle-ci se traduit entre autres dans son style, les images qu'il emploie, etc. Ecrivant en français, Sembene Ousmane a su garder, dans celles qu'on peut considérer comme ses meilleures créations, Les Bouts de bois de Dieu, Voltaïque, Blanche-Genèse, une approche et un style originaux, aptes à exprimer une réalité elle-même originale, celle de la société wolof principalement, une langue souple s'accordant, selon le besoin, à l'expression des sentiments des différentes classes et couches de la société sauf peut-être dans 0 pays, mon beau peuple ! dont les idées et l'expression s'inspirent un peu trop directement de Gouverneurs de la Rosée de l'écrivain haïtien Jacques Roumain, Sembene Ousmane a, comme l'on dit, un style. Dans Le Dernier de l'Empire au contraire, il y a comme un éclatement ou une rupture : ses personnages parlent une langue artificielle, vulgaire, ne correspondant pas au portrait physique et moral que l'auteur a tracé d'eux. Ainsi, Madjiguène, secrétaire de direction, divorcée d'un haut fonctionnaire, et qui a choisi l'union libre avec Kad, un journaliste non conformiste, sur une base d'estime et de respect réciproque, [PAGE 138] répond à une amie qui la félicite de son élégance. « Avec la nouvelle génération d'adolescentes qui arrivent sur le marché, il faut savoir rafraîchir sa salade » (p. 30, T. 11). Son ami Kad, au cours d'une « conversation entre hommes », a cette exclamation que ne renierait pas un Gérard de Villers : « Tu as vu ma femelle de Madjiguène ! Un animal ! » (p. 35, t. II). C'est d'ailleurs, Cheikh Tidiane Sall, présenté comme un homme âgé, cultivé et courtois, qui s'adresse en ces termes à Léon Mignane : « Tu me la fous mal... » (p. 159, T. I). Ces incongruités abondent. On pourrait toutefois objecter que c'est là le français que les gens parlent dans la rue, au Sénégal ou dans tout autre pays africain dit francophone à l'heure actuelle; que l'auteur, par souci de réalisme, s'en est inspiré. On aurait raison sur un point : toute langue étrangère, non ou mal maîtrisée, donne lieu à des confusions de niveaux de langue; dans les villes, le français parlé, comme l'a montré J.P. Makouta-Mboukou dans Le français en Afrique Noire, est un « français élémentaire », c'est-à-dire celui de gens qui, au mieux, sont allés quelques années à l'école; s'y ajoutent les influences du « français de caserne », celle des romans-photos très populaires, et celle des films policiers et pornographiques. Comment s'y reconnaître! Si le français reste effectivement une langue étrangère pour Sembene Ousmane, il n'en est pas moins sa langue d'écrivain; comment expliquer alors, que, dans Le Dernier de l'Empire, il en vienne à penser et écrire comme certains de ses personnages, dont la langue, on l'a vu, est pour ainsi dire en porte-à-faux par rapport à la personnalité que l'auteur leur prête ? Que dire de la multiplication des clichés : « Daouda sombrait dans les bras de Morphée » (p. 143, T. I), « Haïdara était troublé comme une vierge consentante au premier contact charnel avec l'élu de son cœur » (p. 151, T. I). Et ces relents de littérature coloniale : « la troupe folklorique composée de jeunes gazelles aux seins durs, aux corps de reptile et d'éphèbes aux biceps solides et aux cuisses musclées, dont se dégageait la senteur fortement salée de leur transpiration » (p.140, T. I). Le contraste avec les œuvres antérieures de Sembene Ousmane est particulièrement frappant, quand on remarque la prolifération de termes tombés en désuétude qui accentuent l'impression de style ampoulé : tavelure, glose, remugle, [PAGE 139] animadversion, contention, prendre langue, moult, puîné, etc.

Il ne s'agit donc pas, comme on peut le constater par ces quelques exemple de fautes d'impression ou de maladresses accidentelles; du début à la fin du roman, l'expression est défectueuse, l'exposé des faits laborieux au point de susciter l'ennui. Il n'est nul besoin d'être critique spécialisé en littérature pour savoir que le travail du romancier consiste, non seulement à amasser de quoi former un riche contenu (le fond), mais encore à acquérir une technique parfaite (la forme). Etrange absence de l'un et l'autre dans ce récent roman de Sembene Ousmane !

Une explication des causes de cet échec vient à l'esprit en lisant ces propos de Sembene Ousmane dans Le Soleil (déjà cité) : « Je préfère la littérature. Maintenant quand je travaille, j'essaie de voir ce qui est visuel et ce qui ne l'est pas. La littérature c'est peindre avec des mots, le cinéma c'est écrire avec des images. » Il se peut en effet qu'il y ait eu interférence entre les deux genres, et il est vrai que certains passages du roman se présentent, du fait de l'économie de mots, du recours à des phrases brèves ou de l'utilisation de parenthèses, comme des indications scéniques. L'écriture cinématographique aurait ainsi chevauché l'écriture romanesque ou s'y serait enchevêtrée, avec pour résultat une œuvre bâtarde qui donne l'impression d'inachèvement.

En ce qui concerne la pesante monotonie du récit, on peut penser que Sembene Ousmane a voulu exposer « à chaud » des événements encore trop récents, et beaucoup plus complexes qu'il n'y paraît. Le long travail de maturation et le minimum de composition indispensables à ce qui se veut, en un sens, une vaste fresque historique, se sont trouvés escamotés; c'est un peu, toutes proportions gardées, comme si Tolstoï par exemple avait écrit Guerre et Paix au lendemain de la campagne de Russie de 1812, ou si Ngugi Wa Thiong'o avait publié Petals of Blood immédiatement après l'écrasement des résistants Mau-Mau au Kenya. On peut aussi considérer que c'était une gageure par ailleurs, et pour un marxiste le résultat d'une analyse très contestable, de vouloir intégrer dans un ouvrage une dénonciation des mœurs politiques de la classe au pouvoir au Sénégal et [PAGE 140] une méditation, qui se veut critique, sur la période coloniale ou post-coloniale par un de ceux qui, qu'on le veuille ou non, figure au nombre de ces politiciens. Dans cet ordre d'idées, on peut en effet s'interroger sur le rôle que l'auteur semble attribuer au seul personnage un peu étoffé du roman, Cheikh Tidiane, celui d'éleveur des consciences par la seule force de son expérience. De quelle sagesse est-il donc porteur ? De quoi peut-il témoigner si ce n'est de son propre échec?

« Je ne veux pas du mythe que l'on colle à Ousmane Sembene. Je n'aime pas ce mythe » : ce sont là les paroles de l'auteur lui-même. Une telle attitude exige, chez les critiques qui analysent ses œuvres, le refus de la complaisance. La critique aveugle ou flatteuse ne rend pas service à l'écrivain, elle ne peut qu'engendrer l'autosatisfaction et en définitive tarir les capacités créatrices de ce dernier; l'artiste assiste alors, comme le disait Balzac, au suicide de son talent. Néanmoins, les arrêts des critiques, particulièrement dans ce domaine encore mal connu pour beaucoup de la littérature africaine, font fréquemment autorité, soit dans les milieux universitaires, soit même dans le grand public; on comprend alors que, victimes de cette duperie, les écrivains regardent souvent la critique et les critiques avec méfiance. Distribuer des satisfecit, user de paroles dithyrambiques, se contenter de généralités, de lieux communs destinés à n'écorcher personne, c'est refuser de prendre l'œuvre au sérieux. C'est tout le contraire de cette critique « partiale, passionnée, politique » que réclamait Baudelaire. Les critiques ne sont pas alors seulement ces « gardiens de cimetière » stigmatisés par Sartre, ils peuvent être des collaborateurs exigeants de l'écrivain. Ce type de critique est nécessaire, car, comme l'écrivait Lou Sin : « si une critique est fautive, nous devons lui en opposer une autre. C'est le seul moyen d'aider la littérature et la critique à progresser. Si nous retenons nos langues en supposant que tout va bien dans le monde des lettres, le résultat sera exactement l'inverse. »

Yénoukoumê ENAGNON
17 octobre 1981.

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REGARD NOIR

L'album de photographies, Parinoir, de Nicolas Silatsa, paraît enfin, après avoir connu maintes difficultés d'édition. Boudé par l'édition blanche, car il ne montre pas ce qu'il faut faire voir du Noir, puis annoncé par les éditions Silex, mais à des conditions si draconiennes qu'elles découragèrent l'auteur, le livre voit le jour cependant, avec une préface d'Alfred Melon-Degras et une introduction de Jean-Claude Pomonti, chez son auteur : Nicolas Silatsa, B.P. 53, 93802 Epinay-sur-Seine cédex, France.

Après le monopole de la parole, c'est le monopole du regard qu'il s'agit de détrôner. Qui dira en effet la puissance de l'imagerie, son emprise sur les imaginations par son réalisme, gage de vérité. Mais, cachée derrière ces plumes et ces regards « objectifs », la formidable puissance de ne pas dire et de ne pas montrer. Cette interdiction de montrer, le simple touriste peut en faire l'expérience dans maint pays africain. Tant que le troupeau d'étrangers est traîné d'exhibition folklorique en safari, les appareils peuvent crépiter. Mais qu'un original se hasarde à photographier les rues des bidonvilles ou les palais présidentiels hérissés comme des bunkers, et il se verra bien vite confisquer son appareil. [PAGE 142]

Ainsi l'Africain n'est-il montrable que sous deux formes. Dans son archaïsme, son « authenticité », lorsqu'il est chez lui, c'est le cliché ethnologique. Dans son misérabilisme, le balai à la main, lorsqu'il est en Europe, c'est le cliché raciste. Les deux clichés sont vrais, c'est même cela le caractère du cliché, fabriquer du faux avec du vrai, mais ils sont mensongers. Ils sont faits pour rassurer le regard de la domination. L'entreprise artistique de Leni Riefenstahl, à qui on doit la fixation du regard nazi sur la fête nazie dans les années 34-36, recyclée dans l'ethnologie africaine, obtient le plus vif succès en Europe. On peut même lire des attendrissements bien-pensants admirant cette « conversion » d'une ancienne raciste à l'amour des Noirs. Il n'est pire aveugle que celui qui ne voit que ce qu'il veut voir. Rien n'est pourtant plus choquant que le regard posé par Leni Riefenstahl sur les Nuers de Nubie.

L'Africain que montre Nicolas Silatsa dans son Parinoir est celui de la grande ville. Ce qu'on y lit c'est le visage de l'exil certes, mais on y voit les multiples visages vivants de l'exil, et pas seulement l'imagerie misérabiliste du balayeur. La présence du travail est aussi une prise de possession. L'ouvrier, le facteur, l'employé, l'infirmière ne sont pas de passage, ils « sont » la ville. Ce sont les racistes qui s'aperçoivent les premiers de cette prise de possession, les graffiti haineux crient leur rejet, mais ils ne peuvent rien contre la souveraineté du travail. Ce monde du travail on voudrait bien que ces Africains y aient l'air exilés et malheureux, mais ils en ont fait leur monde. Le vêtement de travail n'est pas un déguisement, c'est la nécessité qui, non pas subie mais assumée, amène à la conscience de soi.

Par contre, Bongo, sur le perron de l'Elysée – extraordinaire éloquence de l'art muet de la photographie –, étale la maladresse de se conscience d'emprunt. Croyant s'habiller en Président de la République, il s'est habillé en caïd du milieu. Costume trop neuf aux rayures trop espacées, cravate voyante, énorme gourmette. Il révèle ainsi quel est son véritable emploi, mieux qu'on ne saurait le dire. Il est rare que la photo officielle, qui n'est le plus souvent que parade insignifiante, ait cette éloquence. L'œil de Silatsa a su la distinguer. C'est en cela que le regard créateur montre ce que personne n'a jamais vu. [PAGE 143] Point n'est besoin des recherches d'un esthétisme décadent car la matière qu'il traite est foisonnante et neuve. Tout est à montrer encore sous cet angle qui est celui du principal intéressé. Le plaisir qu'on éprouve à découvrir les images de l'album de Silatsa, comparé à l'agacement que suscitent les représentations habituelles est le gage qu'une voie nouvelle est désormais ouverte.

Odile TOBNER

NOUVEAUTES

Depuis l'été dernier on peut se procurer, dans n'importe quelle librairie, l'ouvrage de Gide Le voyage au Congo, introuvable depuis des années. Passionnant à plus d'un titre, par le regard que Gide porte sur l'Afrique, par l'observation qu'on peut faire de ce regard lui-même avec ses allées et venues de l'acuité au préjugé, par le scandale politique et la polémique qui s'ensuivit, dont les principales pièces, lettres et articles, sont publiées en annexe. Un grand classique à lire, à méditer, à faire connaître.

Le voyage au Congo (Gallimard, « Idées », no 443, 21 trimestre 1981).

Voir l'article « Les Intellectuels français et l'Afrique.» P.N.-P.A. no 13, janv.-fév. 1980.

L'ensemble des articles que Renée Saurel a consacrés à l'excision, ainsi que son rapport sur la Conférence de la mi-décennie à Copenhague, est enfin publié. La préface de Simone de Beauvoir fait le point sur les deux objectifs de cette étude d'une grande richesse, la désacralisation de l'alibi culturel et l'appel pour une action efficace contre cette pratique barbare. Alors que la peur, « suscite de toutes parts la résurgence de l'irrationnel, de la bestialité, un grand vent de misogynie souffle sur la planète. Autant de raisons de ne pas renoncer à la lutte. »

L'enterrée vive (Slatkine, Genève-Paris, 1981.)

Voir l'article « Martyrologe », P.N.-P.A. no 21, mai-juin 1981.

O.T.

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AUTHENTICITE AFRICAIN ET CRITIQUE LITTERAIRE:

LE CAS MAKOUTA M'BOUKOU

Jean-Pierre Makouta M'Boukou n'est pas un inconnu dans le monde des Lettres Africaines. En dehors de sa carte de visite impressionnante[1], nul n'ignore qu'il est romancier, poète et dramaturge : la liste complète de ses œuvres « déjà parues », « non encore publiées », et « en préparation » est tenue avec une attention scrupuleuse[2]. En 1973, il a fait paraître chez Bordas Le français [PAGE 145] en Afrique Noire, une histoire des méthode de l'enseignement du français en Afrique sub-saharienne, et vient de publier, en collaboration avec M. Didier un dictionnaire à l'usage des écoliers africains (Mes 10 000 mots Afrique), une co-éditionde Bordas et des Nouvelles Editions Africaines. Ce n'est donc pas sans raison que Robert Cornevin trouve en l'homme une « puissance de travail ( ... ) littéralement sidérante »[3] car il est aussi critique littéraire de par sa profession d'universitaire et l'on connaît ses nombreuses contributions à l'étude de la littérature négro-africaine, que ce soit sous forme d'articles parus dans diverses revues ou d'ouvrages tels que l'Introduction à la littérature noire[4] et la toute récente Introduction à l'étude du roman négro-africain de langue française[5]. Notre propos ne portera que sur ces deux derniers ouvrages.

Jean-Pierre Makouta M'Boukou ne manque aucune occasion de dénoncer les carences des « Occidentaux » en matière de critique de la littérature négro-africaine. Il est le défenseur le plus farouche d'une critique authentiquement africaine[6], fustigeant, avec une extrême sévérité, précipitation, erreurs d'interprétation, ignorance du contexte social, incompétence, paternalisme, dilettantisme, subjectivisme et manque de rigueur... Lorsque parut son Introduction à la littérature noire, nous crûmes disposer enfin d'un instrument de travail inestimable dans un domaine où le point de vue des Africains semble mineur en raison des difficultés qu'ils ont à se faire éditer, et des barrières que leur imposent la diffusion et la publicité. Hélas, l'ouvrage est tout simplement décevant. Que la « collection point de vue » des Editions CLE soit destinée au « grand public » ne peut constituer une excuse à sa faiblesse[7]. C'est un recueil de cours et de conférences préparés à la hâte et mal présentés [PAGE 146] qui s'adressent, nous dit l'auteur dans sa préface, « à tous ceux qui voudraient avoir une idée, élémentaire il est vrai, de la littérature négro-africaine » mais aussi « aux élèves des lycées (et) aux étudiants des deux premières années d'études universitaires » auxquels le critique espère « rendre service ». Pouvait-il vraiment aider ces élèves et étudiants africains sans leur proposer une vue globale, claire et cohérente de cette nouvelle discipline ?

« Nous ne ferons pas ici – écrit l'auteur – l'histoire de la littérature nègre : pas plus que nous ne suivrons une chronologie ni un classement des œuvres littéraires nègres car le monde nègre est encore un monde en désordre. Désordre psychologique, désordre social, politique et économique. La littérature s'en ressent. Il est donc trop tôt de vouloir y chercher un ordre quelconque. Il faut d'abord que le monde nègre se redécouvre lui-même; et cette redécouverte ne commence qu'au moment où le monde nègre prend conscience de son existence dans ce grand mouvement de libération, cette espèce de renaissance, ou plutôt de réhabilitation de ses valeurs les plus authentiques et jusque-là méconnues. Cette renaissance est un vaste mouvement brusque, désordonné, exaltant, pathétique, dramatique et tragique à la fois. » (sic)[8].

Nous ne saurons nous résoudre, quoi que dise le critique, à accepter l'idée d'une « introduction à la littérature négro-africaine » sans repères bibliographiques et dans laquelle la phraséologie ronronnante et la profession de foi tiennent lieu d'étude. Jacques Chevrier devait d'ailleurs, quatre ans plus tard, réussir, avec un petit effort, à dominer le prétendu désordre évoqué par Makouta M'Boukou pour cacher sa démission. Littérature nègre[9] a su éviter de sacrifier les exigences pédagogiques au profit d'une vulgarisation débilitante. Elle reste aujourd'hui encore, malgré ses insuffisances, [PAGE 147] un instrument de travail de très loin préférable aux sermons dogmatiques et moralisateurs de Makouta M'Boukou : nous soutenons fermement contre les tenants d'une critique authentiquement africaine qu'être nègre n'est pas une qualité et ne peut garantir aucune compétence. C'est le lieu ici de rappeler que toute œuvre littéraire tombe dans le domaine public dès qu'elle entre chez le libraire. Par conséquent, tout lecteur, quels que soient son niveau intellectuel, sa position sociale et sa race, est, a priori, habilité à la juger. On a beau dire, les critères de la critique littéraire restent fort subjectifs. Les résultats de l'entreprise critique ne peuvent donc être objectivement valables que dans la mesure où ils nous apparaissent cohérents et nous permettent de saisir des liaisons inaperçues ou une organisation difficile à cerner. Bien sûr, certains y réussissent mieux que d'autres. Mais seules la cohérence, l'honnêteté d'une subjectivité se reconnaissant et s'assumant comme telle, et une indispensable rigueur font le bon critique et non l'affirmation tapageuse d'une authenticité hypothétique, aussi logorrhéique que débraillée.

En second lieu, les études sur le roman africain sont légion; mais il manquait un ouvrage d'ensemble faisant une synthèse cohérente du genre dans sa forme, son évolution et sa problématique. L'Introduction à l'étude du roman négro-africain de langue française[10] se propose de combler ce vide et c'est tout à l'honneur de son auteur qui semble toujours rechercher l'utile et le concret. Ce dernier ouvrage de Makouta M'Boukou se présente comme « une réflexion profonde sur le genre romanesque négro-africain dans sa double orientation culturelle et littéraire, dans son inspiration originelle de genre né dans le terroir et dans ses intentions philosophiques et politiques ». Mais il ne tient pas sa promesse. Le lecteur est mené par des chemins tortueux et reste sur sa faim. Le roman n'est ici pour le critique qu'un prétexte à de longues et pédantes dissertations, à un étalage d'érudition : le chapitre VII (« les religions et le métissage culturel ») vise moins à nous informer sur le roman qu'à mettre en valeur la formation théologique de l'auteur; le chapitre XI (« les genres littéraires négro-africains ») [PAGE 148] n'apporte rien d'original. Deux pages eussent largement suffi à dire la même chose. Au cours magistral sur Mateo Falcone et Bug-Jargal le lecteur aurait sans nul doute préféré voir les pages 196 à 199, relatives à la production romanesque, plus étoffées, plus consistantes, et avec moins de dates erronées[11]. Un critique aussi sévère à l'endroit des autres que Makouta M'Boukou devrait se montrer plus exigeant envers lui-même.

Par ailleurs, cette façon qu'a l'auteur de parler de ses propres romans à la troisième personne relève d'une affectation gauche et anachronique qui, il faut le déplorer, continue d'être le vilain chic de nombreux universitaires africains pontifiant sous le manteau de la pseudo-impersonnalité scientifique. Voire! Pendant que (p. 224 et 225) l'auteur consacre trois lignes à Francis Bebey, cinq à Olympe Bhêly-Quenum, six à Cheikh Hamidou Kane, vingt-quatre à Yves Mudimbé, il s'en octroie plus de cinquante sans raison. L'autocritique littéraire de J.-P. Makouta M'Boukou nous semble une entreprise publicitaire destinée à faire connaître à tout prix ses romans (fort médiocres d'ailleurs) pour en promouvoir la vente : une critique alimentaire, en somme.

Nous ne parlerons pas des fautes d'orthographe. Des coquilles, dirions-nous[12]. Mais leur nombre est si impressionnant et elles sont souvent si grossières que l'on se demande comment l'auteur a pu accepter de laisser diffuser ce livre sans y adjoindre un errata.

Si l'on ajoute à cela que cette Introduction à l'étude du roman négro-africain de langue française, « précieux outil de travail pour les étudiants des universités africaines, pour les professeurs, les chercheurs et pour tous ceux [PAGE 149] qui désirent approfondir leur réflexion sur la littérature négro-africaine » (sic), ne comporte ni tableau chronologique de la production romanesque, ni bibliographie et que « l'index des noms cités » n'indique pas grand chose, on conviendra avec nous que Makouta M'Boukou a fait du travail bâclé, un mauvais livre sans aucune rigueur méthodologique. Cela ne l'empêche pourtant pas ne poursuivre sa diatribe contre la critique occidentale : « si le critique occidental est crédible en toutes saisons, écrit-il, le critique négro-africain, lui, ne l'est que rarement, pour ne pas dire jamais, soit parce qu'il n'est pas pourvu du titre de Docteur le plus élevé, dans le système; soit parce que, le possédant, il ne fait pas partie du système même, en raison de l'abîme de la race, j'allais dire de la couleur. On ne le sait que trop : les œuvres des Négro-Africains sont toujours reçues avec le sourire habituel. Tous les prétextes sont bons : tantôt la réflexion de l'auteur n'est pas mûre tantôt sa langue d'expression est incertaine, et ne peut permettre de traduire la pensée d'une œuvre négro– africaine, elle-même noyée dans une langue française douteuse »[13]. Nous laissons le lecteur juge

Toutefois, concédons à l'auteur qu'on trouve pire chez les Nouvelles Editions Africaines. Par exemple, le livre de « Monsieur B. Zadi Zaourou » (sic) sur Césaire entre deux cultures[14]. L'auteur exerce « les fonctions de Maître-Assistant (il) est stylisticien de formation, mais ( ... ) s'est également distingué par de fructueuses recherches sur la littérature orale de son pays. Monsieur Zadi est également poète et dramaturge » (sic). Mais son livre ne comporte ni sommaire, ni table des matières, ni index, ni bibliographie, ni rien. Où a-t-on jamais vu cela[15] ? Janheinz Jahn à la mémoire de qui est dédié ce livre, était si méticuleux qu'il n'eût jamais osé publier aucun travail sous cette forme. Cela n'est pourtant pas exclusivement imputable aux Nouvelles Editions Africaines : elles ont publié des ouvrages non exempts de critique, certes, [PAGE 150] mais de meilleure tenue[16]. Alors que conclure ? Que bon nombre de nos universitaires sont trop impatients d'allonger la liste de leurs publications ? Qu'ils sont trop présomptueux ? Ou simplement paresseux ? En tout cas ils ne parviendront à s'imposer sur le plan international que par la qualité et la rigueur de leurs recherches.

Guy OSSITO MIDIOHOUAN

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NOTES DE LECTURE

EUROPE : Littérature nigériane d'expression anglaise

La livraison d'octobre 1980 (no 618, 146, rue du Faubourg Poissonnière 75010 Paris) contient une intéressante anthologie de la littérature nigériane d'expression anglaise. Cette revue avait déjà publié, en avril de la même année, Martinique et Guadeloupe, Littératures. Outre des articles critiques, elle contient des nouvelles et des poésies, et des extraits d'œuvres théâtrales.

Olaudah Equiano

Le plus ancien écrivain nigérian, né en 1745, fut déporté par un négrier anglais, à l'âge de 10 ans. L'histoire intéressante de la vie d'Olaudah Equiano ou Gustavus Vassa, écrite par lui-même, serait encore lue avec intérêt aujourd'hui, et sa publication pourrait faire contre-poids à de nombreux textes négriers, qui, eux, gagneraient à être oubliés. On traduit Racines, ainsi que les documents du film, mais pas le livre d'Olaudah Equiano : choix bizarre. Utile, pourtant, de savoir ce qu'a senti et pensé un enfant noir de dix ans, enfermé dans la cale d'un négrier, en 1755. En Angleterre, pendant la campagne d'abolition, à laquelle il participa, ce livre fut 17 fois réédité entre 1789 et 1827.

De culture Ibo – quatre langues (Ibo, haoussa, fang et yorouba) sont parlées au Nigéria – il fut vendu au capitaine Pascal et participa avec lui à la guerre franco-anglaise du Canada pendant laquelle il apprit à lire, ce qui jouera un grand rôle dans son existence. Revendu à 17 ans, il appartint à un quaker nommé King, à qui il racheta sa liberté; il continua par gratitude à travailler une année pour lui. Il voyagea aux Antilles, à Smyrne, au Groenland. Mais à 32 ans, il quitta la mer, dont il avait une grande expérience, et décida de rester en Angleterre, où sa liberté était moins en danger, et où l'esclavage était illégal [PAGE 152] depuis 1772. Il se lia avec John Newton, ancien négrier, repenti et converti à l'abolition, pour des raisons religieuses, auteur de Pensées sur la traite des esclaves africains.

Le livre d'Olaudah Equiano nous intéresserait par ses descriptions géographiques. Il est l'un des plus riches livres de voyages de son époque. Le caractère de son auteur est exceptionnel. Son émotion humaine, son style touchant, par moments lyrique ou coléreux, saisissent le lecteur. D'autre part, sous l'angle religieux, il rappelle Blaise Pascal. Les Anglais ont réédité son livre en 1967, mais sans le chapitre sur ce qu'il appelle « sa nuit de feu », ce qui laisse ignorer un aspect essentiel de sa personnalité.

Tutuola, Soyinka et les autres

Outre ce premier écrivain, j'ai retenu d'autres noms, qui ont éveillé mon envie :

– Amos Tutuola, dont L'ivrogne dans la brousse a été traduit par Raymond Queneau, publié en 1952 chez Gallimard. De langue yoruba, ce romancier met en scène des mythes et des fables, concernant la révolte de la jeunesse, au sein d'une société fondée sur la gérontocratie, la peur des enfants devant le monde adulte, concernant aussi le rôle du travail dans la vie humaine.

– Wole Soyinka, lui aussi yoruba, le meilleur dramaturge nigérian, acteur et metteur en scène. Romancier, il passe pour difficile d'accès, ce qui m'intimide. Mais son poème de prison, Enterré vif m'a conquis, autant que sa conduite devant l'autorité. Dans un procès politique, comme il n'est ni chrétien, ni musulman, il embarrasse ses juges, refusant de jurer sur la Bible ou le Coran, et il les force à rechercher d'autres formes juridiques. Il invoque le Dieu Ogoun, le Mars du panthéon yoruba, contre le Rhodésien Yan Smith. Il subtilise la bande magnétique d'un discours du Premier ministre, qui annonce un triomphe électoral, et lui substitue un discours de sa façon – d'où séjour en prison de 1967 à 1969. Son roman Les interprètes (Présence Africaine, 1979) décrit une société de mafias, régie par la loi du plus fort. Il est aujourd'hui professeur d'études théâtrales à l'Université d'Ifé. Le yoruba est parlé par le quart de la population du Nigéria; le changement des habitudes, l'évolution de la société ont créé le besoin d'un théâtre abondant. Contes, romans et théâtre auraient plus d'influence sur la société, alors que la poésie resterait réservée aux initiés. Les succès de Hubert Ogunde, Baba Sala, montrent que le théâtre comme partout, est le fruit de l'auteur, de l'acteur... et du besoin du public nigérian, qui serait très grand.

Les abolitionnistes

Ces notes de lecture ont des motivations personnelles. Que le lecteur me permette de conclure celles-ci par un vœu.

Si L'histoire intéressante de la vie d'Olaudah Equiano ou Gustavus Vassa – j'ai déjà souligné cet anonymat, fréquent, des créateurs noirs et féminins – qui « m'intéresse », n'est pas encore publiée en français, et si par contre, je peux dès demain, me procurer le journal de bord du père du poète breton Tristan Corbière, négrier de son état, je crois que ce n'est pas un hasard : ce serait le fait d'une nostalgie esclavagiste séculaire, qui frappe le public et les éditeurs français, depuis assez longtemps. [PAGE 153] Pour soigner cette nostalgie, je crois qu'il serait intéressant d'examiner la littérature internationale d'abolition de la traite et de l'esclavage, dont les XVIIIe, XIXe et XXe siècles ont livré de nombreux témoignages. J'ai été intéressé par la réhabilitation de La case de l'oncle Tom, que Mongo Béti a tentée dans cette revue; je crois qu'un examen de ce genre montrerait en Amérique, une prédominance de l'anglais sur l'espagnol, pour cette raison : jusqu'à une époque fort tardive, les femmes de langue espagnole d'Amérique étaient illettrées et les Noires de culture anglaise apprenaient souvent à lire par les femmes blanches. Ce fut le cas, par exemple, de Frederick Douglas. Olaudah Equiano, lui, doit d'avoir appris à lire, à la guerre franco-anglaise au Canada, à laquelle son maître participait : s'il avait été acquis par un planteur, nous ne le connaîtrions pas. Heureux hasard.

« L'Europe » serait-elle tentée par un travail sur la littérature abolitionniste ? Je serais prêt à y participer.

Sa Majesté le Hasard réunit souvent sous ma plume des éléments fort disparates, mais qui ont un point commun. Ainsi, nous avons reçu à la revue deux brochures éditées par la revue Parler, qui constituent deux dossiers au sujet d'un autre abolitionnisme, qui, lui, est d'actualité depuis l'élection socialiste française : des textes, chansons, poèmes, émission de télévision sur la peine de mort, nous donnent une image de la réalisation de ce que je voudrais...

Parler rédaction et administration, 28, rue Docteur-Calmette, 38 000 Grenoble.

Autres livres reçus

Lamine Senghor, vie et œuvre, 1889-1927, biographie du leader sénégalais, réédition de son conte, La violation d'un pays, d'articles, de discours, de documents de police, de jugements rendus contre lui, édité par le Front Culturel Sénégalais (Fernent Mënna Taalug Daay).

Julie Lirus : Identité antillaise (Editions Caribéennes, 6, rue Crétet, 75009 Paris), Psychologue antillaise, Julie Lirus aide par ce livre ses compatriotes à prendre conscience de ce qui les unit.

Laurent GOBLOT


[1] Docteur en théologie; Docteur en littérature française; Docteur en linguistique; Ancien député du Congo; Ancien membre de l'Association interparlementaire de Langue Française; Ancien membre du Comité Directeur de l'Association des Ecrivains de Langue Française; Ancien membre du Jury du Grand Prix Littéraire d'Afrique Noire; Ancien membre du Jury de l'Agence de Coopération Culturelle et Technique; Membre de l'Académie des Sciences d'Outre-Mer; Membre du Conseil International de Langue Française; Membre fondateur du Prix Mondial de la Paix; « Fondateur titulaire de l'Enseignement Supérieur Français [ ... ] mis à la disposition de la Côte d'Ivoire pour exercer les fonctions de Maître de Conférences de Lettres Modernes à l'Université d'Abidjan» (sic)... !

[2] Retenons quelques œuvres déjà parues

Les initiés (nouvelles), Yaoundé, Cle, 1970, 88 p.

En quête de la liberté (roman autobiographique), Yaoundé, CLE, 1970, 168 p.

Le contestant (roman), La Pensée Universelle, 1973, 256 p.

Les exilés de la forêt vierge (roman), Paris, P.-J. Oswald, 1974, 208 p.

L'Ame bleue (poèmes), Yaoundé, CLE, 1971, 109 p.

Cantate de l'ouvrier (poème), Paris, P.-J. Oswald, 1974, 73 p.

[3] Cornevin (Robert), Littératures d'Afrique noire, PUF, 1976, 205 p.

[4] Yaoundé, CLE, Coll. « Point de vue», no 2, 1970, 140 p.

[5] Nouvelles Editions Africaines, CLE, 1980, 350 p.

[6] Cf. L'Afrique Littéraire et artistique no 50 (sur la réception critique des littératures négro-africaines).

[7] Marcien Towa ne fait d'ailleurs que confirmer notre jugement dans son remarquable essai sur Léopold Sédar Senghor : Négritude ou servitude? Yaoundé, CLE, Coll. « Point de vue », no 7, 1971, 117 p.

[8] Op. cit.,pp. 81-82.

[9] Chevrier (Jacques), Littérature nègre, Paris, Hatier, 1974, 288 p.

[10] Op. cit.

[11] Si les dates données par Makouta M'Boukou sont celles des premières éditions, il y aurait alors des rectifications à apporter : Climbié n'est pas de 1953 mais de 1956; La légende de M'Pfoumou ma Mazono (et non « Mfumu ma-Mazono ») est de 1954 et non de 1955; Maïmouna, de 1953 et non de 1955; Sous l'orage de 1957 et non de 1958; Cette Afrique-là de Jean Ikelle Matiba (et non « Ikela Matiba ») est de 1963 et non de 1962... Cf. Bibliographie des auteurs africains de Langue Française, Paris, Fernand Nathan, 4e édition, 1979, 245 p.

[12] Les Nouvelles Editions Africaines devraient faire un sérieux effort pour améliorer leur composition typographique car d'excellents ouvrages publiés par elles manquent de soin sur ce plan.

[13] Op. cit., p. 10.

[14] Zadi Zaourou (Bernard), Césaire entre deux cultures, Abidjan-Dakar, N.E.A., 1978, 287 p.

[15] Bien entendu, nous n'excluons pas la possibilité d'être malheureusement tombé sur un exemplaire défectueux. Alors, qu'on nous le dise. Nous ferons valoir nos droits.

[16] Citons deux exemples :

– Chemin-Degrange (Arlette), Emancipation féminine et roman africain, N.E.A., 1980, 360 p.

– Fanou-Siefer (Léon), Le mythe du nègre et de l'Afrique Noire dans la littérature française de 1800 à la 2e Guerre mondiale, N.E.A., 1980, 223 p.